
Des pays du Golfe, l'Égypte et la Jordanie ont tenu vendredi un sommet "informel" à Ryad, pour discuter d'un plan alternatif au projet de Donald Trump de placer Gaza sous contrôle américain et de déplacer la population du territoire palestinien dévasté par la guerre.
Une source proche du gouvernement saoudien a confirmé à l'AFP que le sommet "s'est tenu et s'est achevé dans l'après-midi" vendredi.
"Les discussions étaient confidentielles", a-t-elle ajouté alors qu'aucun communiqué officiel n'a été publié à l'issue de la rencontre. La source a fait état de l'"absence" de Oman, les cinq autres pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ayant participé au sommet.
Les médias officiels saoudiens ont évoqué une "rencontre fraternelle, informelle", sans préciser sa teneur, la chaîne Al Ekhbariya publiant une photo de groupe des participants, souriant, avec le roi Abdallah II de Jordanie et le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, sans cravate.
La présidence égyptienne a annoncé, dans un communiqué, que le président Sissi a quitté Ryad après avoir participé à une "rencontre informelle autour de la question palestinienne".
Dès avant la rencontre, l'Arabie saoudite a tenté de modérer les attentes en qualifiant la rencontre d'"informelle", précisant que ses décisions figureraient à l'ordre du jour du sommet arabe prévu en Égypte le 4 mars.
La vision du président américain pour Gaza a fait l'objet d'un large consensus arabe, mais des divergences pourraient apparaître quant à la question de la gouvernance future du territoire palestinien et du financement de sa reconstruction, soulignent diplomates et experts.
"Nous sommes à un tournant historique majeur du conflit israélo-arabe ou israélo-palestinien (...) où les États-Unis, sous la présidence de Trump, pourraient instaurer de nouvelles réalités irréversibles sur le terrain", estime Andreas Krieg, du King's College de Londres. Il s'agit selon lui de la rencontre "la plus importante depuis très longtemps" dans la région.
La bande de Gaza a été ravagée par 15 mois de guerre entre Israël et le Hamas, qui a pris le pouvoir dans le petit territoire en 2007. Elle a été déclenchée par l'attaque du mouvement islamiste palestinien sur le sol israélien le 7 octobre 2023.
Sa reconstruction est estimée à plus de 53 milliards de dollars, selon l'ONU.
Le président américain propose le déplacement de ses 2,4 millions d'habitants en Jordanie et en Égypte et la transformation du petit territoire palestinien en "Riviera du Moyen-Orient".
Son projet a soulevé un tollé international, Israël l'a toutefois soutenu.
Le roi de Jordanie avait indiqué la semaine dernière devant des journalistes à Washington que l'Égypte présenterait une réponse au projet de Donald Trump.
Plan égyptien
La réunion devait se pencher sur un "plan égyptien de reconstruction" de la bande de Gaza, avait indiqué une source proche du gouvernement saoudien.
L'Égypte n'a pas officiellement évoqué son plan, mais selon Mohammed Hegazy, membre du Conseil égyptien des affaires étrangères, un groupe de réflexion influent au Caire, il est composé de trois phases étalées sur trois à cinq ans.
"Pendant la première phase, de six mois, (...) des équipements lourds déblaieront les décombres et trois zones sécurisées pour reloger les déplacés seront aménagées", explique l'ex-diplomate. "Des logements mobiles seront fournis."
La seconde phase nécessitera "une conférence internationale sur la reconstruction", précise-t-il.
Et la troisième visera à "relancer un processus politique en vue d'une solution à deux États", israélien et palestinien vivant côte à côte, pour régler ce conflit vieux de plusieurs décennies, ajoute-t-il. Une solution rejetée par Israël.
"Le plus grand défi du plan égyptien est son financement", a indiqué un diplomate arabe à l'AFP, tout comme la question particulièrement sensible de la gouvernance de Gaza après la guerre.
La source proche du gouvernement saoudien a estimé qu'un "accord" devrait être trouvé entre les dirigeants arabes.
"Il serait inconcevable que les dirigeants arabes se réunissent sans parvenir à une vision commune, mais l'essentiel réside dans le contenu de cette vision et dans la capacité à la mettre en œuvre", nuance un diplomate.
Pour Andreas Krieg, c'est "une occasion exceptionnelle pour les Saoudiens de mobiliser l'ensemble des pays du Conseil de coopération du Golfe, ainsi que l'Égypte et la Jordanie, afin de définir une position commune" face au projet de Donald Trump.
Haitham el-Tabei, avec AFP
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