Blanchiment d’argent: Cap sur la sortie de la liste grise

L’arrestation, ce week-end, d’un passager en possession de 2,5 millions de dollars en liquide à l’aéroport international Rafic Hariri de Beyrouth (AIB) marque une étape significative dans la lutte contre le transport illégal de devises. Elle reflète la volonté des autorités libanaises de renforcer les contrôles et d’éradiquer ce type de pratiques.

Sous la supervision du général Fadi Kfoury, le service de sécurité de l’aéroport agit conformément aux directives du président Joseph Aoun et du Premier ministre Nawaf Salam. Ces instructions s’appliquent également aux points de passage terrestres et maritimes, et visent à endiguer toute tentative de contrebande d’argent.

 

Le Liban sous surveillance renforcée

En octobre 2024, le Groupe d’action financière (GAFI/FATF) a inscrit le Liban sur sa liste grise, plaçant ainsi le pays sous surveillance renforcée. L’État libanais doit désormais mettre en œuvre un plan d’action afin de combler les “défaillances stratégiques” de son cadre de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Dès l’obtention de la confiance du Parlement, le ministre de la Justice, Adel Nassar, a mis en place une commission présidée par le fiscaliste Karim Daher. Cette instance a pour mission d’élaborer une stratégie de sortie de la liste grise dans un délai de 45 jours à compter de la date de sa notification officielle de la décision ministérielle.

 

Une sortie de la liste grise est possible

Le Liban a déjà réussi à se retirer de cette liste en juin 2001, après l’adoption de la loi 318/2001, qui a établi un cadre juridique pour la lutte contre le blanchiment d’argent. Cette loi a notamment permis la création de la Commission spéciale d’investigation (SIC), une unité de renseignement financier rattachée à la Banque du Liban (BDL). Elle a également défini le blanchiment d’argent comme un crime et instauré des accords de coopération internationale pour le partage d’informations financières.

En 2015, le Parlement libanais a renforcé cette législation en adoptant la loi 44/2015, qui a élargi son champ d’application et introduit des mesures plus strictes, notamment contre le financement du terrorisme tout en identifiant plusieurs infractions sous-jacentes liées au blanchiment d’argent, notamment le trafic de drogue, le terrorisme, la corruption, l’évasion fiscale, la traite des êtres humains et le crime organisé.  Cette réforme visait à éviter l’inscription du Liban sur la liste noire du GAFI.

 

Les objectifs de la commission

La commission ad hoc, créée par le ministre Adel Nassar, a pour missions principales de: surveiller l’activité des institutions financières illégales, telles que “al-Qard al-Hassan”, et les obliger à respecter les procédures financières légales, proposer des amendements aux lois nécessitant une réforme selon les exigences du Fonds monétaire international (FMI), notamment celles concernant la transparence financière des entreprises et des particuliers, établir un cadre juridique pour résoudre la crise de l’économie de cash, restaurer la confiance dans le secteur bancaire et garantir le remboursement des dépôts des épargnants.

Il est important de rappeler que le véritable problème du Liban aujourd'hui ne se limite pas à l’effondrement financier et économique. Il inclut également l’évasion douanière, la contrebande illégale et la corruption financière. Ces facteurs aggravent la crise et compliquent la recherche d'une solution. Ces problèmes, dont la résolution dépend de l’État, restent cependant sans règlement, l’État demeurant dans une inertie préoccupante.

 

Les Philippines, un exemple à suivre

Le 22 février dernier, les Philippines ont été retirées de la liste grise du GAFI après avoir mis en place les réformes nécessaires pour combler les lacunes de leur cadre juridique en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Ce retrait aura un impact positif pour les deux millions de Philippins travaillant à l’étranger, qui envoient chaque année des fonds vers leur pays d’origine.

Actuellement, 25 pays figurent sur la liste grise, parmi lesquels l’Algérie, la Côte d'Ivoire, la Croatie et Monaco. En revanche, des pays comme la Corée du Nord, l'Iran et la Birmanie restent classés sur la liste noire, qui désigne les juridictions les plus risquées en matière de criminalité financière.

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