
Alors que la situation à Gaza connaît une escalade dramatique, marquée par la reprise des hostilités et une intensification des frappes, les incertitudes sur l’avenir du conflit entre Israël et le Hamas se multiplient. Alors que les sources palestiniennes font état de plus de 400 morts depuis lundi, Ici Beyrouth a interrogé le général Khalil Helou afin de décrypter les dynamiques en jeu, les conséquences possibles pour la stabilité régionale et les risques d’un nouvel embrasement au Liban.
1. Quels sont les principaux facteurs ayant conduit à la rupture de la trêve entre Israël et le Hamas, et quelles pourraient être les répercussions sur la stabilité régionale? Un scénario similaire est-il envisageable au Liban?
Il est important de préciser qu’il ne s’agissait pas d’un cessez-le-feu, mais d’une trêve temporaire de 42 jours, permettant l’échange de prisonniers et une suspension des hostilités. L’objectif était d’ouvrir la voie à une négociation plus large sur un cessez-le-feu durable et la libération de tous les otages.
Cependant, à l’issue de cette période, Israël a tergiversé, retardant les discussions sur la phase suivante. De son côté, le Hamas a montré une certaine disposition au compromis, indiquant même qu’il était prêt à ne pas faire partie de la future gouvernance de Gaza, à condition d’obtenir certaines garanties. Dans ce contexte, plusieurs initiatives ont émergé, notamment un plan arabe pour la reconstruction de Gaza et des propositions américaines.
Mais trois stratégies se sont heurtées: celle du Hamas, qui cherche à survivre et à limiter les dégâts; celle d’Israël, qui vise à l’éliminer; et celle des États-Unis, alignée sur la position israélienne tout en proposant des solutions de reconstruction. Ce conflit d’approches a rendu l’échec inévitable.
Aujourd’hui, Israël exerce une pression militaire maximale pour forcer le Hamas à céder sur la libération des otages et à renoncer à son rôle à Gaza. La fin des combats n’est pas pour demain, malgré le fait que l’opinion publique internationale est de plus en plus critique face aux pertes humaines.
Concernant le Liban, un scénario similaire est possible. Depuis la trêve de novembre, Israël a multiplié les incursions et les frappes contre le Hezbollah, causant plus de 130 morts. Si la situation s’aggrave entre Israël et l’Iran, une escalade au Liban pourrait s’ensuivre. Bien que le Hezbollah cherche à préserver ses forces après de lourdes pertes, il pourrait être contraint d’intervenir sous pression iranienne. De leur côté, les Israéliens pourraient saisir n’importe quel prétexte pour intensifier leurs attaques contre le Hezbollah, rendant la situation explosive.
2. La politique de pression maximale sur l’Iran, initiée sous Trump, pourrait-elle changer la donne à Gaza?
Pas nécessairement. L’influence directe de l’Iran sur le Hamas reste limitée. Malgré leur alliance idéologique, l’Iran n’a pas apporté de soutien militaire direct au Hamas dans ce conflit et n’a pas pris de mesures pour défendre Gaza, se contentant de réponses ciblées à des attaques en Syrie.
L’Iran ne peut ni acheminer d’aide militaire significative à Gaza ni influencer directement l’issue du conflit. Son soutien au Hamas est avant tout symbolique, moral et politique. Ainsi, même si l’Iran subit des pressions internationales accrues, cela n’aura probablement pas d’impact majeur sur la situation à Gaza.
3. Comment la reprise des hostilités affecte-t-elle les négociations en cours concernant la libération des otages détenus par le Hamas, et quelles sont les perspectives d'une résolution pacifique dans ce contexte?
La reprise des combats freine évidemment les négociations, mais l’Égypte et le Qatar devraient tenter de relancer les discussions avec Israël. Il n’y a pas forcément de contradiction entre la pression militaire israélienne et la poursuite des négociations, mais les exigences d’Israël risquent de devenir de plus en plus élevées.
De son côté, le Hamas semble peu enclin à faire des concessions majeures. Nous sommes donc dans une impasse: ce qu’Israël n’a pas réussi à obtenir en quinze mois de guerre, il ne l’obtiendra pas en deux semaines d’offensive. Certes, le Hamas est affaibli, mais il conserve son réseau de tunnels, le soutien d’une partie de la population gazaouie et un arsenal lui permettant encore de combattre.
Le conflit entre dans une phase prolongée, marquée par des tensions, non seulement à Gaza, mais aussi au Yémen et dans le cadre plus large du bras de fer entre Israël et l’Iran. Cette escalade ne signifie pas nécessairement une conclusion imminente, mais plutôt une nouvelle phase d’un affrontement qui dure depuis des décennies.
Commentaires