
Le chef de la diplomatie iranienne, Abbas Araghchi, a estimé jeudi que des «désaccords fondamentaux» demeurent avec les États-Unis, à la veille d'un nouveau cycle de pourparlers sur le nucléaire iranien à Rome sous médiation omanaise.
Téhéran et Washington, ennemis depuis la Révolution islamique de 1979, ont entamé le 12 avril des discussions sur l’épineux dossier du programme nucléaire iranien.
Les deux pays ont affiché publiquement ces derniers jours leur désaccord sur la question sensible de l’enrichissement d’uranium.
L’émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, qui mène les discussions pour Washington, a estimé dimanche que les États-Unis «ne pouvaient autoriser ne serait-ce qu’un pour cent de capacité d’enrichissement» à l’Iran.
«L’Iran ne peut pas avoir une capacité d’enrichissement, car cela en fait finalement une puissance nucléaire de seuil», a argué mercredi le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio.
Téhéran, qui défend un droit au nucléaire civil, considère cette demande comme une ligne rouge, contraire aux dispositions du Traité de non-prolifération (TNP) dont l’Iran est signataire.
«Il y a toujours des désaccords fondamentaux entre nous», a déclaré jeudi à la télévision d’État Abbas Araghchi, avertissant que si les États-Unis insistent pour empêcher l’Iran d’enrichir de l’uranium «il n’y aura pas d’accord».
Le chef de la diplomatie iranienne, qui mène pour son pays les négociations avec les États-Unis, s’est dit ouvert à «davantage d’inspections» des sites nucléaires iraniens dans un souci de «transparence».
— «Dans la bonne direction» —
«Nous n’avons donc aucun problème de principe», a ajouté M. Araghchi, soulignant que «si l’Iran voulait se doter d’armes nucléaires, il l’aurait déjà fait».
Les pays occidentaux, États-Unis en tête, et Israël, considéré par des experts comme la seule puissance nucléaire au Moyen-Orient, soupçonnent l’Iran de vouloir se doter de l’arme nucléaire.
Le président américain Donald Trump a parlé jeudi de l’Iran avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, selon la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt.
M. Trump estime que les négociations avec Téhéran, vues avec scepticisme voire franche hostilité par le dirigeant israélien, «vont dans la bonne direction», a-t-elle ajouté.
La chaîne de télévision CNN, citant plusieurs responsables américains sous couvert d’anonymat, a affirmé mardi qu’Israël, ennemi juré du pouvoir iranien, se préparait à frapper les installations nucléaires iraniennes.
L’Iran tiendra les États-Unis pour responsables de toute attaque israélienne contre ses installations nucléaires, a mis en garde Abbas Araghchi.
«En cas d’attaque des installations nucléaires de la République islamique d’Iran par le régime sioniste, le gouvernement américain (...) portera une responsabilité juridique», a écrit dans une lettre adressée au secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, et dévoilée jeudi, le chef de la diplomatie iranienne.
— «Réponse dévastatrice» —
Le pouvoir iranien, qui fait de la cause palestinienne un pilier de sa politique étrangère, ne reconnaît pas l’État d’Israël, qualifié à l’envi de «régime sioniste».
«Si le délirant régime sioniste commet un acte insensé et lance une attaque, il recevra assurément une réponse dévastatrice et décisive dans sa petite géographie vulnérable», a insisté pour sa part le porte-parole des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique du pays, le général Ali Mohammad Naïni, cité par l’agence Isna.
Les discussions entre l’Iran et les États-Unis représentent le plus haut niveau d’engagement entre les deux pays depuis le retrait unilatéral par Washington en 2018 d’un accord international sur le nucléaire iranien conclu trois ans plus tôt.
Le président américain Donald Trump, à l’origine de cette décision durant son premier mandat (2017-2021), avait rétabli de lourdes sanctions américaines contre l’Iran dans le cadre de sa politique dite de «pression maximale».
Il cherche dorénavant à négocier un nouveau pacte avec Téhéran, qui espère de son côté une levée des sanctions qui asphyxient son économie.
Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’Iran enrichit actuellement l’uranium à 60 %, bien au-delà de la limite de 3,67 % autorisée par l’accord de 2015, mais en deçà du taux de 90 % nécessaire pour un usage militaire.
Téhéran a pris ses distances avec ses engagements de 2015 en représailles au retrait américain de l’accord.
Par Payam Doost Mohamadi et Shaun Tandon, AFP
Commentaires