«Il ne faut pas que le moment Liban soit doublé par un moment Syrie», avertit Le Drian
L'émissaire français, Jean-Yves Le Drian, accueilli par le président Joseph Aoun, le 10 juin. ©Présidence de la République

Lors d'une interview à la chaîne LBCI, Jean-Yves Le Drian, envoyé spécial du président français Emmanuel Macron pour le Liban, a salué l’action menée par le pouvoir pour mettre le pays sur la voie d’un redressement. Il a toutefois jugé que beaucoup reste à faire et averti que le Liban risque de rater le coche alors que l’attention de la communauté internationale se porte de plus en plus sur la Syrie

Jean-Yves Le Drian s’est d’emblée félicité de l’élection de Joseph Aoun à la tête de l’État. Selon lui, cette élection a marqué «l’apparition d’un moment libanais» et a constitué un signe de confiance pour le peuple libanais.

Il a souligné que le Liban, «après des années de stagnation et d’inefficacité, commence enfin à voir les bases d’un État fonctionnel se poser», même si «ce n’est pas encore à plein régime».

M. Le Drian a dans le même ordre d’idées, affirmé que le Liban est désormais «reconnu et respecté au niveau international».

Il s’est aussi félicité de ce que le gouvernement actuel est «cohérent, homogène et solidaire», et que plusieurs réformes ont déjà été entamées «en toute transparence». «Le Liban avance, alors qu’il a failli mourir», a-t-il insisté.

Des réformes à poursuivre

Cependant, le défi reste de taille. L’émissaire français a mis en relief le fait que de nombreux sujets demeurent «sur la table» et que le Liban doit poursuivre son chantier de réformes sans délai. «Il ne faut pas que le moment Liban soit doublé par un moment Syrie», a-t-il averti en précisant que l’attention de la communauté internationale est «en train de se déplacer du Liban vers la Syrie».

M. Le Drian a quand même estimé que le changement qui est intervenu dans ce pays, est bénéfique pour le Liban pour peu que celui-ci parvienne à saisir les opportunités qui se présentent.

Dans ce contexte, il a salué l’ouverture d’une session extraordinaire de la Chambre, dans laquelle il a vu une avancée positive. «Il faut que le Liban poursuive sans relâche le processus de réformes», a-t-il insisté, soulignant que l’enjeu est de taille: le pays doit impérativement renouer avec la confiance des bailleurs de fonds et garantir un environnement propice à l’investissement.

Jean-Yves Le Drian a évoqué à ce même propos la question de l’inscription du Liban sur la liste noire de la Commission européenne, qui témoigne, à ses yeux, de l’urgence des réformes.

Le recours au FMI est aussi, selon lui, une condition indispensable à cette même fin. Il a rappelé que si les conférences internationales précédentes en faveur du Liban n’ont pas porté leurs fruits, c’est avant tout en raison de l’absence de réformes substantielles de la part du pays.

Le prochain rendez-vous pourrait avoir lieu à l'automne, a-t-il avancé, une occasion pour le Liban de prouver sa résilience face aux défis économiques et politiques qu'il continue de traverser.

Le monopole des armes

Par ailleurs, M. Le Drian a lié la reconstruction des régions dévastées au Liban-Sud, par le rétablissement de la sécurité dans cette partie du pays.

À ce titre, il a réitéré la nécessité de confier le monopole des armes à l'État, et plus spécifiquement à l’armée libanaise, pour garantir une reconstruction efficace. « Seule l'armée libanaise devrait être en charge de cette mission», a-t-il insisté.

Il a réaffirmé que la France soutenait pleinement la démarche du président Aoun en vue d’un monopole des armes. Selon lui, cette démarche «combine fermeté et prudence». «C’est exactement ce qui caractérise le rôle d’un président», a commenté l’émissaire français. Il a souligné qu’il était crucial pour le Liban de ne pas rater ce moment politique et sécuritaire.

Dans ce même contexte, M. Le Drian a évoqué la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui reste selon lui un cadre essentiel pour maintenir la stabilité et la sécurité au Liban-Sud. Il a également souligné l'importance de faire respecter l'accord de cessez-le-feu «dans toutes ses dimensions» et a précisé que la France soutient le renouvellement du mandat de la FINUL, «car son retrait mettrait en péril la mise en œuvre de la 1701 et pourrait entraîner un risque de guerre».

Jean-Yves Le Drian a également exprimé le souhait que les pays du Golfe s’associent aux efforts menés pour le redressement du Liban. Il a également précisé que bien que des divergences existent parfois entre Paris, Washington et Riyad, les trois parties s’accordent sur l’importance de préserver l’intégrité territoriale du Liban et de soutenir sa souveraineté.

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