
De passage à Paris, le DJ néerlandais Armin van Buuren évoque son nouvel album, son mode de vie rigoureux et l’impact de l’intelligence artificielle sur la musique. Il défend l’importance du lien humain dans les performances live et appelle à une régulation des outils génératifs.
Armin van Buuren, compositeur néerlandais considéré comme l’un des meilleurs DJ du monde depuis plus de 20 ans, estime que l’intelligence artificielle (IA) est un "outil formidable" qui doit être régulé et ne remplace pas la "connexion" entre un artiste et son public.
À quelques jours de la sortie du deuxième volet de son neuvième album studio Breathe, le 27 juin, la star de la trance, connue pour son tube Blah Blah Blah, était de passage à Paris lundi soir.
Avant de mixer sur une terrasse du Centre Pompidou à l’invitation de la plateforme de streaming Deezer, il s’est confié à l’AFP sur sa carrière, qui s’est transformée avec l’évolution de l’industrie musicale.
Après Ibiza, vous voilà à Paris devant près de 400 personnes. Comment réussissez-vous ces grands écarts?
Depuis quelques années, j’ai commencé à considérer ma vie non pas comme mon travail ou mon hobby, mais comme un sport de haut niveau. Je l’approche plus comme un athlète: je fais beaucoup d’exercice physique, je mange sainement. Ne plus faire la fête. Pas de drogues. Pas d’alcool.
Pourquoi un tel mode de vie?
J’ai aussi 48 ans. Quand on a 28 ans, la vie est plus facile. On se remet facilement d’une gueule de bois. Je veux continuer à faire cela pendant de nombreuses années. Mais je dois être réaliste et aussi accepter que je dois prendre soin de mon corps.
Dans quel état d’esprit avez-vous composé votre nouvel album?
C’est comme une photographie de toute la musique que j’ai créée ces deux dernières années. Je pense que je vais mieux dans ma vie. Je reviens d’une époque où j’étais un peu déséquilibré, je faisais trop de concerts. Maintenant, j’ai plus de temps pour moi, je passe plus de temps avec ma famille.
Comment voyez-vous l’évolution de l’industrie musicale face à l’IA?
Ce n’est pas seulement l’IA, c’est aussi qu’il est beaucoup plus facile de faire de la musique aujourd’hui qu’il y a 25, 30 ans. Lorsque j’ai commencé à produire, il fallait un grand studio et beaucoup de synthétiseurs. C’était très cher. Aujourd’hui, on peut acheter un logiciel, on peut faire un très bon morceau en une heure. Il y a plus de musique, pas seulement à cause de l’IA, mais aussi parce que les gens font de la musique de manière générale. Même pour moi, lorsque je sors un bon morceau, je n’ai plus la garantie qu’il cartonnera. Et l’IA n’aide pas. Il y a des fermes qui ne font que produire des chansons et encore des chansons. Mais j’utilise aussi l’IA comme outil pour créer des voix, m’aider à trouver l’inspiration ou les paroles. C’est un outil formidable.
L’IA générative doit-elle être régulée?
Oui, je le pense. Parce que l’IA est entraînée à partir du travail d’un grand nombre d’esprits géniaux. C’est un peu injuste d’utiliser leur travail et d’y apposer ton nom, alors que tu n’as pas fait le travail. Et ce n’est pas très juste pour tous les gens des années 1970 ou 1980 qui ont dû faire de gros investissements pour sortir cette musique.
Comment voyez-vous ces technologies?
Je pense qu’il n’y a rien de mal à ce que les machines prennent le contrôle de nos vies, tant que nos emplois sont garantis. Et tant que l’élément humain reste présent. Quand les gens sortent et écoutent de la musique, ils veulent voir un autre être humain exprimer ses émotions. L’IA ne pourra jamais remplacer cela. Cela reste important d’avoir un vrai DJ qui mixe. Un être humain qui est là, qui prend le micro, qui essaie d’établir une connexion.
Vous avez enregistré deux titres (Stardust en 2015 et Epica Maxima en 2023) avec une figure de la scène électro française, Jean-Michel Jarre. Que représente à vos yeux la French Touch?
Jean-Michel Jarre a joué un rôle très important dans l’acceptation du synthétiseur en tant qu’instrument. Des gens comme Daft Punk, David Guetta, Bob Sinclar… La France a vraiment laissé son empreinte, particulièrement sur la scène électronique. Sans l’atmosphère de Paris, l’art, la culture, la scène des clubs, la musique serait différente.
Avec AFP
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