Bardot, Birkin… le chic du panier d’été sur le podium
Panier d'été Ralph Lauren ©Ralph Lauren

Les paniers en osier signent leur grand retour dans la cour des grandes maisons: de Loewe à Hermès, ces accessoires estivaux mêlent artisanat, nostalgie Birkin et élégance bohème. Focus sur leur renouveau haut de gamme, durable et irrésistiblement chic.

Depuis quelques saisons déjà, les paniers en osier ou en raphia ne sont plus cantonnés aux marchés ou aux plages: les grandes maisons de mode les réinventent en pièces de luxe estivales. Une tendance qui se nourrit d’un double héritage: la praticité décontractée d’un côté, et l’esprit chic et solaire de la Riviera de l’autre. Ce qui était un objet du quotidien devient aujourd’hui un manifeste de style, un pont entre nature et sophistication.

Le retour en grâce du panier ne date pas d’hier. Bien avant Jane Birkin, Brigitte Bardot en avait déjà fait un accessoire de style. Dès les années 1950, on la voit arpentant les ruelles de Saint-Tropez, panier rond au bras, assorti à ses robes légères à pois, cheveux au vent et sandales aux pieds. À «La Madrague», son refuge tropézien, le panier l’accompagnait partout, modeste mais iconique. C’est elle qui, sans le savoir, ancre l’image du panier dans l’imaginaire du chic méridional.



Brigitte Bardot & Jane Birkin. © Ici Beyrouth

Quelques années plus tard, Jane Birkin reprend le flambeau à sa manière. Plus bohème, plus londonienne, elle emporte ses paniers en osier partout: marchés, tournages, soirées, promenades. Elle y glisse biberons, rouges à lèvres, journaux, cigarettes, le tout dans un joyeux désordre. Ce style sans filtre deviendra sa signature.

C’est même l’un de ces paniers qui va faire basculer l’histoire de la maroquinerie. En 1981, à bord d’un vol Paris–Londres, Jane est assise à côté de Jean-Louis Dumas, président d’Hermès. Son panier déborde, renverse son contenu, et elle lâche, mi-exaspérée: «Pourquoi aucun sac n’est-il jamais assez pratique?»

Dumas, séduit par la scène, esquisse un modèle sur un sac en papier. Quelques années plus tard, naît le Birkin, devenu depuis un symbole mondial du luxe absolu. Ironie du sort: ce sac mythique est né d’un panier sans fermeture ni poches.

Jane, fidèle à elle-même, n’en fait pourtant jamais un totem. Elle continue à porter ses paniers, et personnalise ses rares Birkins avec autocollants, gri-gris et mots griffonnés au stylo. Une élégance libre, indifférente aux règles imposées.
Alémais & Anna Sul. © Ici Beyrouth

L’objet mode le plus désirable de l’été 

Aujourd’hui, le panier revient en force, propulsé sur les podiums par les plus grandes maisons. Loewe, la marque espagnole, domine cette tendance avec ses modèles en raphia tressé ou en osier naturel. Les collections Anagram ou Paula’s Ibiza, réalisées à la main, affichent des prix allant de 800 à 1.000 € (environ 860 à 1.080 $), selon les tailles et les finitions.


Jacquemus & Loewe. © Ici Beyrouth

Les chiffres parlent d’eux-mêmes: les recherches sur «Loewe raffia basket» ont explosé de 1.600% sur Net-a-Porter en quelques mois. Saint Laurent, Prada et Jacquemus emboîtent le pas avec leurs propres versions, cousues de détails en cuir, anses croisées et doublures en lin lavé. Même Chanel a présenté, lors d’un défilé croisière, un panier rigide orné d’un fermoir bijou, preuve que la vannerie a désormais sa place sur les catwalks les plus codifiés.

Mais le panier ne séduit pas que par son style. Il incarne aussi une mode plus responsable, fondée sur l’artisanat et la lenteur. Les matières, raphia, paille, osier, palmier nain, nécessitent un tressage patient, manuel, transmis depuis des générations.

Chez Loewe, certains modèles sont réalisés en collaboration avec des artisans du Maroc, de Colombie ou d’Espagne, où la vannerie est encore vivante. Dans certaines régions, ce savoir-faire est même inscrit au patrimoine immatériel de l’Unesco. Le panier devient ainsi un objet porteur de mémoire, de territoire et de dignité artisanale.

Cet objet tressé se distingue aussi par son ancrage matériel. Il évoque le travail de la main, l’irrégularité assumée, la beauté imparfaite du fait main. Il rassure par sa simplicité, tout en s’inscrivant dans une logique de transmission. Chaque panier devient ainsi unique, et c’est sans doute cette unicité que le luxe cherche à retrouver.

Le panier reste un cabas pratique. Deux grandes silhouettes dominent: le market shopper, souvent souple et doté de poignées en cuir, et le fisherman bag, plus rigide, souvent ovoïde, celui que portait Birkin. Loewe a multiplié les déclinaisons urbaines: mini, cross-body, poignées longues. Les prix varient de 395 à 775 € (425 à 830 $), selon les modèles.

H&M & Chloé. © Ici Beyrouth

Comment le porter?

Selon la styliste Sarah Corbett-Winder, qui en possède «au moins 40», le panier va avec tout: robe vaporeuse, espadrilles, chemise oversize, pantalon en lin. L’historien Tony Glenville décrypte l’effet qu’il produit: «Il dit que vous êtes créatif·ve, que vous aimez les pique-niques et que vous avez probablement une maison à la campagne.»

À la ville comme à la plage, il se marie avec les matières naturelles: coton, toile, lin, chanvre. Le style «retour de vacances sans quitter Paris» a encore de beaux jours. Et pour les plus pointus, les paniers se mixent aujourd’hui avec des looks plus affirmés: costume fluide, blazer oversize, ou même tailleur monochrome, où ils viennent casser la rigidité par une touche artisanale.

Certains puristes estiment que le panier est un sac d’été, point final. «On ne le sort pas après septembre ni avant Pâques», tranche Glenville. D’autres assument de le porter même en automne, en le mariant à des tons neutres et des manteaux légers. L’originalité fait le reste. En hiver, certaines influenceuses vont jusqu’à le doubler de tissu ou à l’associer à des looks en laine brute pour lui donner un supplément d’âme. Preuve que les codes peuvent toujours être réinventés.

Vanessa Bruno & Mango. © Ici Beyrouth

Si le panier Loewe atteint les 1.000 €, les marques grand public n’ont pas tardé à réagir. Mango, Zara, M&S ou New Look proposent des modèles entre 50 et 150 € (55 à 160 $). Le panier M&S à 45 £ (≈ 49 € / 53 $) a même été surnommé «le dupe parfait» du Loewe à 450 £, preuve qu’on peut flirter avec le style sans vider son compte.

Le panier, né dans les champs et adopté par les icônes, s’offre aujourd’hui une nouvelle vie dans la haute couture. Il conjugue élégance discrète, conscience artisanale et liberté de ton. Chaque été, il revient sans forcer, comme une évidence. Un accessoire, oui, mais porteur d’un monde.

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