Le 11 août, le président Donald Trump a annoncé le déploiement d’environ 800 militaires de la Garde nationale à Washington, DC, afin d’assumer temporairement le contrôle fédéral de la police de la ville.
Présentée comme une réponse à une supposée flambée de la criminalité, cette décision a suscité de vives critiques, d’autant que les données officielles révèlent, au contraire, une nette baisse de la violence.
Durant la conférence de presse qu’il a tenue en présence de la procureure générale Pam Bondi chargée de superviser cette prise de contrôle, Donald Trump a qualifié sa décision d’«action audacieuse» destinée, selon lui, à rétablir l’ordre.
Il a assuré que la Garde nationale serait «autorisée à accomplir correctement son travail» et que des agents fédéraux viendraient en renfort pour sécuriser la capitale.
La Garde nationale, branche spéciale de l’armée américaine, remplit à la fois des missions étatiques et fédérales. Contrairement aux soldats en service actif, ses membres peuvent être mobilisés par les gouverneurs lors d’urgences locales, ou par le président pour des missions fédérales.
À Washington, DC, elle relève directement du gouvernement fédéral, ce qui permet au président de déployer des troupes sans passer par un exécutif local. Une particularité qui a permis à Trump d’envoyer ces renforts au nom des préoccupations de sécurité publique qu’il invoque.
Historiquement, la Garde nationale de Washington n’a été mobilisée que lors de crises majeures, comme les émeutes de 1968 après l’assassinat de Martin Luther King Jr. ou l’attaque du Capitole le 6 janvier 2021.
L’autorité légale invoquée par Trump, l’article 740 du Home Rule Act de 1973, permet au président de prendre temporairement le contrôle du Metropolitan Police Department lorsque «des conditions spéciales de nature urgente existent».
Cette disposition, rarement utilisée, n’autorise le contrôle fédéral que pour un maximum de 30 jours et impose d’en informer le Congrès.
Mais y a-t-il réellement une hausse de la criminalité? C’est là que les récits divergent. Donald Trump a présenté Washington comme étant plongée dans le chaos et a accusé le gouvernement local d’avoir perdu le contrôle de la sécurité publique, affirmant que la capitale affiche un taux de criminalité violente supérieur à celui de certaines des villes les plus dangereuses au monde.
Or, les chiffres officiels racontent une autre histoire: en 2024, la criminalité violente a reculé d’environ 35%, tout comme les vols de voitures. Cette baisse se poursuit en 2025, ramenant la ville à son niveau le plus bas depuis trente ans.
Les troupes de la Garde nationale sont arrivées le 12 août 2025. Environ 800 membres ont été mobilisés, dont 100 à 200 en service simultanément. Leur mission se limite à des rôles de soutien: logistique, sécurisation des périmètres, protection des bâtiments fédéraux. Ils ne sont pas autorisés à procéder à des arrestations, mais peuvent retenir temporairement des suspects.
Les forces fédérales ont mené une opération coup de poing, aboutissant à 23 arrestations et à la saisie de six armes à feu illégales, pour des infractions allant de l’homicide au harcèlement.
Des critiques immédiates
Les responsables locaux ont aussitôt dénoncé cette intervention. Le procureur général de Washington, Brian Schwalb, l’a qualifiée d’«inédite, inutile et illégale», affirmant que le maire et la police municipale doivent conserver l’autorité principale en matière de sécurité. La maire Muriel Bowser a dénoncé une «ingérence fédérale sans précédent», un geste que les détracteurs jugent susceptible de créer un précédent préoccupant.
À l’inverse, les Républicains à la Chambre des représentants ont exprimé leur soutien à la décision de Trump et prévoient d’organiser des auditions à l’approche de la fin de la période de contrôle fédéral de 30 jours, rappelant que toute prolongation nécessiterait l’approbation du Congrès.
Des experts juridiques et des analystes politiques mettent en garde contre un précédent inquiétant. Celui-ci peut, selon eux, marquer un tournant au niveau du rôle de la police. Il soulève aussi des questions sur l’équilibre des pouvoirs entre administrations locales et gouvernement fédéral, notamment dans les villes dirigées par des élus d’opposition.
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