
Pour la première fois, une femme atteinte de diabète de type 1 n’a plus eu besoin d’insuline après une greffe de cellules souches reprogrammées. Un progrès encourageant pour la recherche, mais des inconnues subsistent avant de parler de guérison généralisable.
Le diabète de type 1, maladie chronique auto-immune, impose à des millions de personnes des injections quotidiennes d’insuline. Malgré les progrès du traitement, la perspective d’une guérison réelle restait jusqu’ici hors de portée. Une équipe de chercheurs à Tianjin, en Chine, vient pourtant de franchir une étape importante: une patiente de 25 ans, diabétique depuis l’enfance, a pu se passer d’insuline pendant plus d’un an après une greffe de cellules souches issues de son propre corps.
La patiente a reçu une greffe de cellules souches pluripotentes induites (iPSCs), fabriquées à partir de son tissu adipeux. En laboratoire, ces cellules ont été reprogrammées pour devenir des cellules capables de produire de l’insuline, puis injectées dans les muscles abdominaux de la jeune femme. Deux mois et demi après l’intervention, elle a pu arrêter ses injections quotidiennes d’insuline: son pancréas «artificiel» contrôlait désormais son taux de sucre de façon autonome. Un an après, son équilibre glycémique reste stable, sans complications notables.
Ce cas, publié dans la revue scientifique Cell en septembre 2024, est salué comme une première mondiale. La régénération de la production naturelle d’insuline grâce à des cellules du patient ouvre des perspectives inédites pour la prise en charge du diabète de type 1.
Une avancée majeure, mais des obstacles à franchir
Cependant, les limites sont réelles. D’une part, la patiente bénéficiait déjà d’un traitement immunosuppresseur pour une transplantation hépatique antérieure, ce qui pourrait avoir facilité la tolérance du greffon. La majorité des diabétiques de type 1 n’ont pas ce profil: leur système immunitaire détruit toute nouvelle cellule pancréatique, ce qui rend l’expérience difficilement transposable pour l’instant.
D’autre part, la manipulation génétique des cellules souches n’est pas exempte de risques: un suivi à long terme est indispensable pour écarter tout risque de prolifération incontrôlée ou de transformation cancéreuse.
La méthode développée à Tianjin présente des avantages indéniables: elle permet d’utiliser les propres cellules du patient, évite la recherche de donneur et limite le risque de rejet. Si elle se confirme, elle pourrait transformer la prise en charge du diabète de type 1 et, à terme, d’autres maladies auto-immunes.
Pour autant, il est trop tôt pour parler de «guérison». Les chercheurs eux-mêmes appellent à la prudence: il faudra d’autres essais, sur un plus grand nombre de patients et sur plusieurs années, pour vérifier la sécurité et l’efficacité du procédé. Le cas chinois, spectaculaire, doit d’abord être reproduit et évalué avec la même rigueur scientifique.
De nombreux laboratoires explorent aujourd’hui des approches similaires: utilisation de cellules souches, encapsulation des cellules productrices d’insuline, édition génétique pour les rendre invisibles au système immunitaire. L’objectif commun: restaurer une production autonome d’insuline, sans injection quotidienne ni immunosuppression lourde.
L’exemple de Tianjin constitue un signal positif pour la recherche, mais ne doit pas masquer la complexité des défis encore à relever. La route vers un traitement généralisable et sans risque est encore longue.
En attendant, ce progrès atteste du potentiel des thérapies cellulaires dans la lutte contre le diabète de type 1. Il nourrit l’espoir de solutions nouvelles pour des millions de patients, tout en rappelant la nécessité de prudence et d’évaluation à long terme avant de changer les pratiques médicales.
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