Nucléaire iranien: les Européens lancent le rétablissement des sanctions contre Téhéran
Le compte à rebours est lancé : 30 jours avant le retour possible de sanctions internationales contre l’Iran. ©Organisation de l'énergie atomique de l'Iran / AFP

Face à l'impasse des négociations sur le nucléaire iranien, la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne ont mis jeudi leur menace à exécution en entamant à l'ONU la procédure de rétablissement des sanctions internationales contre Téhéran dans 30 jours.

Les trois pays, surnommés E3, «souhaitent notifier le Conseil de sécurité que, sur la base de preuves factuelles, le E3 estime que l'Iran est en position de non respect important de ses engagements» en vertu de l'accord sur le nucléaire de 2015, le JCPOA, et «invoquent ainsi le mécanisme connu sous le nom du snapback», qui ouvre un processus de 30 jours permettant de réimposer toute une série de sanctions suspendues il y a dix ans, indique la lettre.

Le ministère iranien des Affaires étrangères a réagi en promettant une réponse à la décision «injustifiée et illégale» des Européens.

Signé par le E3, l'Iran, les Etats-Unis, la Chine et la Russie, le JCPOA suspend diverses sanctions économiques internationales prises par l'ONU contre l'Iran.

Le gouvernement iranien, qui avait lancé un programme nucléaire secret, est accusé de vouloir se doter de l'arme atomique, ce qu'il réfute. L'accord avait été dénoncé en 2018 par les Etats-Unis qui ont rétabli leur propre volet de sanctions.

Le E3 menaçait de rétablir les sanctions avant l'expiration du mécanisme du «snapback» le 18 octobre faute de solution négociée.

Ils espèrent pousser l'Iran à des concessions alors que diplomatie est au point mort quelques semaines après la campagne de bombardements israéliens et américains contre des sites du programme iranien : les négociations Etats-Unis-Iran sont ensablées, la coopération de Téhéran avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) est restreinte, et les discussions entre Téhéran et les Européens n'ont pas abouti.

«En juillet 2025, les E3 ont mis sur la table une offre d'extension de la résolution» 2231 de l'ONU régissant le JCPOA «et de son mécanisme de +snapback+. Les exigences fixées par les E3 en contrepartie de cette extension, à savoir notamment la reprise des négociations, le respect par l'Iran de ses obligations à l'égard de l'AIEA, et des mesures pour répondre à nos préoccupations concernant le stock d'uranium hautement enrichi, n'ont pas encore été remplies de manière satisfaisante par l'Iran», écrivent les trois ministres des Affaires étrangères dans une déclaration conjointe séparée.

 «Sortir de l'impasse» 

Le non-respect par l'Iran du JCPOA «est manifeste et délibéré, et des sites présentant un risque majeur de prolifération en Iran sont en dehors de la surveillance de l'AIEA» disent-ils, affirmant que les Européens ont fait «tous les efforts possibles pour sortir de l'impasse» depuis plusieurs années.

«L'escalade nucléaire de l'Iran ne doit pas aller plus loin», a justifié jeudi le chef de la diplomatie française sur X.

Toutefois, «cette mesure ne signe pas la fin de la diplomatie : nous sommes déterminés à mettre à profit la période de 30 jours qui s'ouvre pour dialoguer avec l'Iran», affirme Jean-Noël Barrot.

«Nous avons dit aux Iraniens que leur intérêt n'est pas de jouer l'escalade mais d'utiliser ces 30 jours pour faire des efforts», a expliqué une source diplomatique française. «Je pense qu'ils vont être tentés de jouer l'escalade, du moins en partie», prévient-elle.

«Le risque d'escalade existe, mais si on ne faisait rien, le dossier du nucléaire iranien sortait de l'ONU pour toujours», la résolution 2231 du Conseil de sécurité expirant le 18 octobre, explique-t-elle.

«Nous attendons désormais de l'Iran» : une «coopération totale avec l'AIEA», un «engagement clair en faveur de négociations avec les Etats-Unis», et des certitudes sur le sort du stock d'uranium iranien, a expliqué sur X le ministre allemand Johann Wadephul.

Le sort des stocks de 400 kilos d'uranium à 60%, permettant de fabriquer 9 bombes, demeure inconnu depuis qu'ils ont été visés par les bombardements israéliens et américains de juin.

«Les Iraniens s'arc-boutent à leur position maximaliste qui est de n'autoriser aucune nouvelle coopération avec l'AIEA. Est-ce qu'il peut y avoir des négociations dans les 30 jours ? C'est l'objectif de tout le monde, mais il faut que les Iraniens abandonnent cette position maximaliste», analyse pour l'AFP Héloïse Fayet, chercheuse sur les questions nucléaires à l'Institut français des relations internationales (Ifri).

Par Fabien ZAMORA avec Amélie BOTTOLIER-DEPOIS/AFP

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