
La Philharmonie de Paris innove avec des concerts classiques debout pour rapprocher le public des musiciens. Une expérience immersive qui séduit particulièrement les jeunes mélomanes.
Des spectateurs «immergés» dans le son et des musiciens qui devinent «la respiration du public»: le temps d'un festival, la Philharmonie de Paris propose des concerts de musique classique debout et espère ainsi rajeunir son public.
Exit les sièges du bas du parterre de la grande salle Pierre Boulez. Après un Concerto pour violon de Dvořák, c'est la Symphonie n°2 de Sibelius, interprétée par le Gewandhausorchester de Leipzig, qui a retenti devant plusieurs centaines de spectateurs debout, dont certains sont à moins de deux mètres des violonistes.
La moyenne d'âge y apparaît manifestement moins élevée que dans les étages supérieurs.
«Je suis jeune, je peux rester debout longtemps, ça ne me dérange pas», assure Gabrielle Kruch, 21 ans, étudiante en master de physique, qui savoure le programme qu'elle vient d'entendre.
Elle a certes déjà poussé, par le passé, la porte de l'établissement, mais elle n'a «jamais été aussi proche des musiciens», s'enthousiasme-t-elle. «Immergée», elle a perçu un «son vraiment meilleur».
«J'adore, on sent presque la respiration du public.» «C'est assez jeune par rapport à nos habitudes», raconte pour sa part Nicolas Defranoux, violoncelliste dans l'orchestre, à la fin du concert.
«C'est frustrant car on voit assez mal le plateau des musiciens», regrette pour sa part Guillaume Giraudon, mélomane habitué de la Philharmonie.
La direction espère «faire venir encore plus de jeunes» avec ce type de concert, inspiré d'une expérience londonienne et organisé dans le cadre du festival Les Prem's.
D'autres institutions cherchent en ce début de saison à toucher un public plus large. Le Théâtre national de Strasbourg va surtitrer pour le public non francophone sept de ses spectacles dans différentes langues parlées dans cette métropole, de l'alsacien à l'hébreu, en passant par le turc ou l'arabe. Andromaque de Racine sera proposé en dari, pachto ou grec.
Entre novembre et mai, l'Opéra de Paris proposera aux habitants de petites ou moyennes villes comme Évreux (Eure) ou Maubeuge (Nord) d'assister à des représentations du Junior ballet, une compagnie en pré-professionnalisation.
«Le public de demain»
En 2024, près de la moitié de la population (49 %) déclare avoir assisté à un spectacle vivant (concert, théâtre, cirque ou danse), en progression par rapport à 2023 (35 %), selon une étude du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Credoc) publiée par le ministère de la Culture.
Actions de médiation culturelle avec les scolaires, initiatives dans les «quartiers prioritaires de la ville», projets participatifs d'opéras (avec préparation musicale du public avant les représentations), séances «relax» avec de la lumière pour accueillir les personnes en situation de handicap, «concerts berceau» pour la toute petite enfance, gratuité des spectacles pour les étudiants... les projets se multiplient.
«Depuis toujours, le spectacle vivant cherche à diversifier et rajeunir ses publics», relève Florence Naugrette, professeure d'histoire et théorie du théâtre à Sorbonne Université. «Les jeunes d'aujourd'hui sont le public de demain.»
«Sensibiliser le plus grand nombre, permettre au citoyen de rencontrer le spectacle vivant, ça fait partie des missions de service public», abonde Frédéric Pérouchine, président de la Réunion des opéras de France (ROF), qui rassemble 29 maisons d'opéra.
Selon l'étude du Credoc, «les cadres et professions intellectuelles supérieures sont ceux qui fréquentent le plus les cinémas, les lieux de spectacle vivant, de patrimoine». Elle montre aussi que la sortie au théâtre est «particulièrement l'apanage des hauts revenus».
Une autre étude Médiamétrie pour l'Association pour le soutien du théâtre privé, publiée en juin, montrait que 65 % des spectateurs de théâtre en 2024 avaient plus de 34 ans, une proportion en diminution par rapport à l'année précédente (autour de 70 %).
Par Karine PERRET / AFP
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