
Alors que la rentrée littéraire s’ouvre avec de volumineux romans, Philippe Delerm se démarque avec un court ouvrage célébrant l’œuvre monumentale de Charles Dickens. À 75 ans, l’écrivain poursuit son chemin littéraire avec un style minimaliste et toujours singulier.
En cette rentrée littéraire marquée par la sortie d'épais romans, un livre de Philippe Delerm fait exception : en une centaine de pages, l'écrivain clame son admiration pour Charles Dickens et ses livres fleuves.
Ni biographie ni essai universitaire, Le suicide exalté de Charles Dickens (Seuil) se présente comme une «promenade littéraire intime» avec le romancier britannique.
En 115 pages, Philippe Delerm espère ainsi encourager les lecteurs à se replonger dans Oliver Twist, David Copperfield ou Les Grandes espérances, les plus connus des ouvrages de l'écrivain né en 1812 et mort en 1870.
«Son œuvre est immense - avec neuf volumes dans la Pléiade - et il a le statut de +grand écrivain+ mais il est très peu lu», constate-t-il, en regrettant qu'il soit trop souvent assimilé à la littérature jeunesse.
Philippe Delerm choisit de se focaliser sur les dix dernières années de la vie de Dickens lorsque, écrivain reconnu, il parcourt la Grande-Bretagne et les États-Unis pour lire en public ses romans. Jusqu'à épuisement.
«Pendant dix ans, il va se livrer, se donner en pâture tout entier, se vider consciemment de toutes ses forces, jusqu'à la mort», résume Delerm, en justifiant ainsi l'utilisation du mot «suicide» dans le titre de son ouvrage.
Pratiquant le «stand-up» avant l'heure, Dickens fait salle comble, un succès qui semble un peu le consoler des revers de sa vie privée. «Ses 10 enfants le déçoivent tous et semblent infiniment moins vivants que la moindre de ses créatures romanesques», souligne-t-il.
Minimalisme
À 75 ans, Philippe Delerm continue à «beaucoup lire et écrire» dans la maison normande où il vit avec son épouse Martine, illustratrice, après avoir enseigné dans un collège durant 37 ans.
«Je suis un peu l'envers de Dickens. Je ne me sens pas romancier et j'admire beaucoup la capacité à pouvoir imaginer des personnages», reconnaît-il.
De ce fait, il cultive un style bien à lui, qualifié de «minimalisme positif» par l'écrivain belge Rémi Bertrand qui lui a consacré un essai.
Philippe Delerm a connu un succès relativement tardif – après une douzaine de livres sortis dans l'anonymat – mais spectaculaire avec La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules, un recueil de nouvelles publié en 1997.
À ce jour, «l'ouvrage s'est écoulé à 1,5 million d'exemplaires et continue à se vendre», se félicite l'écrivain, qui peine toujours à expliquer «ce phénomène».
Après ce livre, qui reste son plus vendu, il cultive son sillon dans Il avait plu tout le dimanche, La sieste assassinée ou Les chemins nous inventent. «J'ai pu publier vraiment ce que je voulais. C'est vraiment un luxe extraordinaire», se réjouit-il.
Outre l'écriture, il suit de près la carrière de chanteur de son fils Vincent, 48 ans. Et l'un de ses plaisirs est de lire L'Équipe, le quotidien sportif, dont il apprécie le sens de la formule de ses journalistes. «En ce moment, il y a un truc marrant : c'est la mode de l'adjectif +délicieux+ dans les commentaires des matchs de foot. On parle ainsi d'une passe ou d'un une-deux +délicieux+. Surprenant, non?»
Par Jérôme RIVET / AFP
Commentaires