L’intelligence vient-elle vraiment de la mère? Ce que dit la science
L’intelligence ne vient pas que de la mère. Gènes maternels et paternels comptent autant. ©Shutterstock

La rumeur selon laquelle l’intelligence se transmettrait principalement par la mère fait le tour des réseaux et des repas de famille. Mais que nous apprennent vraiment la génétique et la recherche sur ce fascinant héritage? Éclairage scientifique et démystification.

Dans l’imaginaire collectif, l’intelligence aurait une origine bien définie: il suffirait d’une mère brillante pour assurer à sa descendance un potentiel supérieur. Cette croyance, entretenue par des articles, des influenceurs et des conversations de comptoir, semble séduisante et valorise le rôle maternel. Pourtant, quand on se penche sur la réalité scientifique, le portrait devient beaucoup plus nuancé.

Il est vrai que certains gènes impliqués dans le développement du cerveau résident sur le chromosome X. Et puisque les femmes en possèdent deux, tandis que les hommes n’en ont qu’un, cette configuration a alimenté l’idée d’une transmission privilégiée par la mère. Mais cette simplification ne résiste pas à l’examen. L’intelligence humaine dépend d’une multitude de gènes répartis sur tous les chromosomes. Chacun d’entre nous reçoit la moitié de son patrimoine génétique de sa mère et l’autre moitié de son père. Même si quelques gènes clés sont localisés sur le chromosome X, ils ne suffisent pas à faire pencher la balance du côté maternel.

Les études menées en génétique du comportement, que ce soit sur des familles, des jumeaux ou des enfants adoptés, aboutissent toutes à la même conclusion: les deux parents transmettent à parts égales le potentiel intellectuel de leur enfant. Les différences mesurées d’une génération à l’autre ne se limitent jamais à une seule lignée. Des analyses génétiques de grande ampleur, publiées dans des revues de référence comme Nature ou Science, montrent que la ressemblance intellectuelle est partagée entre toutes les branches de la famille.

Un autre facteur, souvent sous-estimé, contribue fortement à la construction de l’intelligence: l’environnement. L’ADN ne détermine pas tout. L’éducation reçue, la stimulation intellectuelle, la qualité des échanges, l’accès à la culture et même l’alimentation jouent un rôle central. Ce que les chercheurs appellent «héritabilité» désigne la part de variation due aux gènes dans une population donnée, et non la destinée individuelle. Cette héritabilité varie beaucoup: dans l’enfance, l’environnement familial est décisif, alors qu’à l’adolescence et à l’âge adulte, l’influence génétique s’exprime davantage, mais toujours en interaction avec la vie et les expériences de chacun.

L’environnement change la donne

La persistance du mythe d’une intelligence essentiellement maternelle trouve aussi son origine dans l’organisation sociale. La mère, souvent première éducatrice, détient historiquement un rôle clé dans les apprentissages précoces et le développement du langage. Cela peut donner l’illusion d’un héritage intellectuel direct. Mais cette proximité relève surtout de l’éducation, du lien affectif, et non d’une transmission génétique exclusive. Les pères, eux aussi, transmettent leurs gènes et influencent la trajectoire cognitive de leurs enfants, même si la société met parfois davantage en avant le rôle maternel.

Si l’on veut remettre les pendules à l’heure, il faut accepter que l’intelligence n’est le monopole d’aucun parent. Elle résulte d’une alchimie unique entre l’héritage génétique de la mère et du père, enrichie et modifiée par l’environnement dans lequel l’enfant grandit. La science rappelle que la diversité des influences, la qualité de la stimulation, la curiosité et l’accompagnement sont essentiels pour que chaque enfant développe au mieux ses capacités.

Ainsi, croire que l’intelligence se transmet principalement par la mère, c’est passer à côté de la complexité humaine. L’intelligence est le fruit d’une rencontre entre la biologie, l’histoire familiale et la vie quotidienne. Pour la faire grandir, rien ne remplace un environnement ouvert, bienveillant et stimulant, où chaque parent, à sa façon, laisse son empreinte. L’héritage intellectuel, finalement, se partage et se construit ensemble.

 

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