
La hausse constante du prix de l’or depuis le début de 2025, avec un gain de près de 40% sur la période, rend les marchés nerveux. Le Liban n’est pas en reste.
Le marché de l’or au Liban connaît une phase de grande fébrilité. Dans un contexte de crise prolongée, les transactions s’accélèrent dans les deux sens: certains vendent des bijoux et des lingots pour réaliser des gains immédiats, tandis que d’autres se précipitent sur le métal jaune, considéré comme la valeur refuge par excellence.
Cette dynamique contradictoire reflète l’incertitude qui domine les esprits. La tentation de profits rapides pousse de nombreux Libanais, de condition modeste, à céder leurs avoirs dès que les prix montent. Parallèlement, une clientèle aisée continue d’alimenter la demande, convaincue que l’or reste un rempart contre l’effondrement de la monnaie nationale et l’instabilité politique et sécuritaire.
Cependant, en bourse comme sur le marché physique, l’excès d’avidité se paie souvent cher: ceux qui espèrent trop peuvent perdre autant que ceux qui vendent trop tôt. Comme le rappelle un adage français repris par les experts en gestion de patrimoine, «les arbres ne montent pas jusqu’au ciel».
Joailliers et bijoutiers mécontents
«Le secteur tourne au ralenti», confie, sous couvert d’anonymat, un joaillier à Ici Beyrouth. Selon lui, les consommateurs se détournent désormais des pièces de petite et moyenne taille, alors que le prix du gramme d’or travaillé avoisine les 150 dollars. «Un simple pendentif à l’effigie de la Vierge, sans chaîne, d’un gramme et demi, se vend autour de 250 dollars. Un tarif difficilement acceptable pour la clientèle», explique-t-il.
Plus surprenant encore, la clientèle aisée libanaise, traditionnellement grande consommatrice de haute joaillerie, a, elle aussi, modifié ses habitudes. Désormais, elle délaisse les pièces luxueuses – qu’elles soient achetées pour paraître, pour le plaisir ou comme cadeau de mariage – alors même que les prix du diamant sont en baisse. La raison est simple: à la revente, seule la valeur de l’or compte, le reste s’évaporant.
Le rush vers les lingots et les «livres» d’or
Dans ce contexte, la demande s’oriente massivement vers les lingots et les «livres» d’or, en particulier ceux de fabrication suisse. Mais les bijoutiers restent peu intéressés par ce marché: «La marge de profit ne dépasse pas cinq dollars par pièce, sans compter les charges et la TVA», relève une source du secteur.
Faute de mines locales, le Liban dépend entièrement des importations pour son approvisionnement en or. Selon le bureau de recherches Information International, qui cite les chiffres des douanes libanaises, le pays a importé au premier semestre 2025 (jusqu’à fin juin) 11 tonnes d’or, pour une valeur de 1.045 milliards de dollars. En 2024, les importations avaient atteint 25 tonnes, pour un montant de 1.867 milliards de dollars.
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