Gaza : Trump proche d’une grande victoire mais face à un défi colossal
Le président américain Donald Trump pointe du doigt en montant à bord d’Air Force One à la base aérienne de Joint Base Andrews, dans le Maryland, le 11 septembre 2025. ©Mandel Ngan / AFP

Avec l’accord sur Gaza, Donald Trump a obtenu une victoire diplomatique majeure, incontestable, même si les écueils sont nombreux sur le chemin de la paix «éternelle» au Moyen-Orient qu’il dit entrevoir.

Il reste à savoir si le président américain, qui n’aime guère s’attarder sur les détails, déploiera le même niveau d’énergie dans la durée, une fois passée ce qui se présente comme une tournée de la victoire la semaine prochaine au Moyen-Orient.

L’armée israélienne a annoncé l’entrée en vigueur vendredi à 09h00 GMT du cessez-le-feu dans la bande de Gaza, qui doit être suivi dans les 72 heures d’une libération des otages, en application d’un accord conclu avec le mouvement islamiste Hamas.

Le président américain a fait part de son souhait de se rendre dès dimanche en Égypte et en Israël.

Lorsqu’on songe au fait que tous les présidents américains depuis vingt ans ont tenté, sans succès, de conclure la paix au Proche-Orient, l’accomplissement de Donald Trump est déjà remarquable.

Mais le milliardaire républicain caresse aussi l’espoir de relancer les accords d’Abraham, conclus entre Israël et des pays arabes sous son premier mandat, faisant resurgir l’un des artisans de ces accords, son gendre Jared Kushner, impliqué avec Steve Witkoff dans les négociations sur Gaza en Égypte.

Fortes pressions 

Responsables et observateurs s’accordent pour dire que Donald Trump a habilement manœuvré, usant d’un savant mélange de coups de gueule, menaces et pressions en public et en privé, y compris et surtout sur le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.

Il a aussi joué de ses relations privilégiées avec des dirigeants arabes et musulmans.

Pour Aaron David Miller, ancien conseiller sous plusieurs secrétaires d’État américains, il ne fait aucun doute que le président américain a joué un rôle «décisif».

«Tout accord entre Israéliens et Palestiniens, mais surtout un accord négocié indirectement entre Israël et le Hamas, est une réussite extraordinaire», dit-il à l’AFP.

L’expert, qui a participé autrefois à des négociations sur le Moyen-Orient et travaille au Carnegie Endowment for International Peace, relève que «Trump a décidé de faire quelque chose qu’aucun autre président américain (…) n’avait jamais fait, mettre la pression sur un Premier ministre israélien sur un sujet considéré par ce dernier comme vital pour sa politique».

Mais c’est à peu près la seule chose tangible, tant l’incertitude pèse sur la mise en œuvre de la phase deux du «plan de paix» de Donald Trump, qui prévoit notamment le désarmement du Hamas, après deux ans de guerre dans le territoire palestinien provoquée par l’attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

«Un cessez-le-feu, ce n’est pas encore une paix durable», a relevé jeudi le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot, après avoir réuni à Paris des homologues européens et arabes sur l’après-guerre à Gaza.

Défis énormes 

«La question de savoir si cela mettra fin à la guerre reste ouverte», résume Steven Cook du cercle de réflexion Council on Foreign Relations (CFR).

Il insiste sur le «défi» que représente désormais la mise en œuvre du plan en vingt points de Donald Trump, qui exige, outre le désarmement du Hamas, la mise en place d’une force de sécurité internationale et de nouvelles structures de gouvernance à Gaza n’incluant pas le Hamas.

Le président américain a certes assuré jeudi qu’il y aurait bien «un désarmement» et un «retrait» de troupes israéliennes.

Mais l’administration Trump devra déployer beaucoup d’efforts pour finaliser l’accord et s’assurer de l’implication des pays arabes face au chantier gigantesque de la reconstruction d’une bande de Gaza dévastée.

Déjà, quelque 200 militaires américains seront mobilisés pour «superviser» et «observer» la mise en œuvre de l’accord, dit un haut responsable américain sous le couvert de l’anonymat.

Aaron David Miller parle à cet égard d’un «univers de complexités» pour chaque point du plan, qui manque d’éléments «opérationnels».

Il n’y a «pas de planification détaillée sur la manière de démanteler et/ou de démilitariser Gaza, même si vous aviez l’accord du Hamas, ce qui n’est pas le cas», selon lui.

Le plan de paix américain prévoit aussi la création d’un «organe international de transition» baptisé «Comité de la paix», présidé par le président américain lui-même mais aux contours encore flous.

«Bien qu’il soit arrivé au pouvoir avec la volonté de se débarrasser des engagements américains au Moyen-Orient, Trump vient d’en prendre un énorme: la responsabilité d’un plan de paix qui portera à jamais son nom», écrit Robert Satloff, directeur exécutif du Washington Institute for Near East Policy.

 

Par Léon BRUNEAU, AFP

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