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- Comprendre les vitraux de Chartres, grâce à une appli innovante
À Chartres, les vitraux millénaires de la cathédrale prennent la parole grâce à une application dopée à l’intelligence artificielle. Ce nouvel outil gratuit, présenté comme une première mondiale, permet aux visiteurs de décrypter les scènes et symboles de ces chefs-d’œuvre gothiques directement sur leur smartphone.
Une application dopée à l'intelligence artificielle, présentée comme «une première mondiale» par ses créateurs, donne vie aux célèbres vitraux de la cathédrale de Chartres, dans le centre de la France, en permettant au grand public de découvrir leurs secrets à l'aide d'un smartphone.
«Beaucoup de visiteurs avaient déjà le réflexe de prendre en photo les vitraux, sans parvenir à comprendre le sens de ceux-ci», pointe Jean Touchard, chargé de mission projets numériques et mécénat pour le Centre international du vitrail, à la tête du projet.
Selon lui, c'est un échange entre une mère et sa fille, perdues devant l'un des vitraux, qui a permis de confirmer ce constat. «La petite a dit à sa mère, ils sont beaux tes vitraux maman... mais j'y comprends rien», se souvient-il.
À présent, il suffit de pointer l'application vers un vitrail pour afficher la pièce en très haute définition sur l'écran du smartphone, mais aussi pour tout connaître de ce qui est représenté.
Nous sommes parvenus à «faire parler ces pièces millénaires», parmi les plus anciennes au monde, se réjouit Jean-François Lagier, directeur du Centre international du vitrail.
Chaque année, plus d'un million de visiteurs viennent admirer les 172 verrières et 2.600 m2 de vitraux, essentiellement du XIIIe s., de la cathédrale de Chartres, chef d'œuvre de l'art gothique inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco.
«Encyclopédie de poche»
Cette première version de l'application, fruit de plusieurs années de travail, doit permettre de découvrir l'histoire de 50 premières pièces, en détournant des algorithmes issus de la reconnaissance faciale.
«Les voitures autonomes reconnaissent les panneaux. Nous avons transposé cette logique aux vitraux» et «à leur luminosité changeante au fil de la journée, de la météo et des saisons», décrit Jean Touchard.
Un long travail d'archivage et de photographies a aussi été réalisé pour nourrir la base de données, conformément aux contraintes patrimoniales qui rendent impossible l'accrochage de tout dispositif informatif aux murs, comme des QR codes par exemple.
«Pendant sept ans, 3.000 photos ont été prises pour nourrir la technologie de 10.000 médaillons et 20.000 détails iconographiques» à étudier pour créer cette «encyclopédie de poche», assure M. Lagier.
Il a fallu écrire les descriptions, nombreuses et variées, des figures représentées, mais aussi des significations souvent diverses des couleurs choisies.
Les descriptions écrites mises ensemble représentent 1,4 million de signes, rien que pour cette première version de l'application.
Pédagogique
«Les vitraux ne sont pas la Bible des pauvres. Même au Moyen-âge, il fallait des clés de lecture pour les vitraux», explique Félicité Schuler-Lagier, guide depuis vingt ans à Chartres, et à l'origine de cet immense travail de rédaction.
«Les couleurs, les gestes, la longueur des vêtements, tout a un sens. L'application et la technologie aident à décoder un langage oublié», poursuit-elle.
Le projet, disponible gratuitement sur les boutiques d'applications d'ici la fin du mois d'octobre, a été financé quasi intégralement par le mécénat, à hauteur de 270.000 euros.
Cette innovation veut aller au-delà de la simple visite augmentée. Elle offre un outil pédagogique, y compris pour les guides eux-mêmes, surtout à destination des plus jeunes.
«Quand on leur explique, ils sont fascinés par exemple par les scènes mettant en scène le diable ou les animaux. Il suffit de leur donner les clefs», insiste Félicité Schuler-Lagier, évoquant «une application qui parle leur langage, l'écran».
À terme, cette innovation vise à être étendue à d'autres édifices en France et à travers le monde. «Ce n'est pas de la sauvegarde du patrimoine, c'est de la médiation et de la mise en valeur», conclut Jean Touchard. «Si cela fonctionne à Chartres, pourquoi pas ailleurs?»
Par Tom MASSON / AFP
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