Donald Trump veut libérer l’économie mondiale de la dépendance à la Chine. Au cœur de cette nouvelle offensive diplomatique: les terres rares, ces métaux invisibles mais indispensables à toutes les technologies modernes, des smartphones aux missiles.
Que sont les terres rares?
Sous ce nom trompeur se cache un groupe de 17 métaux comme le manganèse, le lanthane ou le cobalt, indispensables à la fabrication d’aimants, de batteries, d'éoliennes, de moteurs électriques ou de systèmes d’armement.
Contrairement à ce que leur appellation suggère, ces métaux ne sont pas particulièrement rares dans la croûte terrestre. Mais leur extraction et leur traitement sont complexes, polluants et coûteux. D’où la domination chinoise, bâtie sur des décennies d’investissements dans la chaîne de raffinage.
Pékin suspend ses restrictions
Jeudi, la Chine a annoncé la suspension pour un an de ses restrictions sur l’exportation de technologies liées aux terres rares. Cette décision, obtenue après un entretien direct entre Donald Trump et Xi Jinping en Corée du Sud, apaise temporairement une crise commerciale majeure.
«Il n’y a désormais aucun blocage concernant les terres rares», a déclaré le président américain, saluant un «accord valable pour le monde entier».
Ces restrictions avaient suscité l’inquiétude des grandes puissances industrielles. Pékin assure plus de 60% de l’extraction mondiale de terres rares et près de 90% de leur raffinage, un quasi-monopole lui donnant un levier géopolitique considérable.
«La Chine utilise son contrôle du marché comme un outil géopolitique», estime Darryl Cuzzubbo, PDG de la société minière australienne Arafura Rare Earths. «Mais d’ici trois à cinq ans, elle commencera à perdre ce pouvoir», en raison des accords conclus entre les États-Unis et leurs alliés pour développer de nouvelles capacités d’extraction et de raffinage en dehors de son influence.
Une diplomatie minérale
Profitant du climat d’ouverture avec Pékin, Donald Trump a multiplié ces derniers jours les accords bilatéraux pour sécuriser l’approvisionnement américain.
Le président a signé à Tokyo un partenariat stratégique avec le Japon, à Kuala Lumpur un accord garantissant l’accès américain aux réserves malaisiennes, et à Washington un pacte majeur avec l’Australie, riche en minéraux critiques.
Ces textes prévoient une coopération industrielle, des financements conjoints et la création de chaînes d’approvisionnement hors de Chine. Pour Donald Trump, la sécurisation de ces ressources est un enjeu de puissance. Ses accords successifs dessinent une nouvelle carte minérale du monde, où les États-Unis veulent redevenir un acteur central.
Le Brésil, deuxième détenteur mondial de réserves après la Chine, espère lui aussi tirer parti de cette reconfiguration.
Le G7 en quête d’autonomie
Ces initiatives ont précédé la réunion des ministres de l’Énergie du G7, qui se tient jeudi au Canada, où les pays industrialisés cherchent à diversifier leurs sources d’approvisionnement.
«La forte concentration du raffinage dans un seul pays crée un risque de sécurité nationale», prévient Tae-Yoon Kim, expert à l’Agence internationale de l’énergie.
Un Plan d’action sur les minéraux critiques a déjà été lancé pour encourager la production dans les pays alliés – un effort comparable à celui des années 1970, ayant visé l’affranchissement de la dépendance pétrolière.
Mais la route sera longue. Comme le rappelle un diplomate du G7: «La Chine a mis trente ans à bâtir son empire des métaux rares. L’Occident espère en sortir en cinq.»



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