Des images satellites suggèrent que des massacres se poursuivent probablement à El-Fasher et autour de cette ville du Soudan, ont indiqué des chercheurs de l’université Yale, tandis que la cheffe de la diplomatie allemande a qualifié samedi la situation d’«apocalyptique».
En guerre contre l’armée régulière depuis avril 2023, les Forces de soutien rapide (FSR) ont pris El-Fasher dimanche, chassant les militaires de leur dernier bastion dans le Darfour occidental après un siège de 18 mois.
Depuis la chute de la ville, des témoignages ont fait état d’exécutions sommaires, de violences sexuelles, d’attaques contre des travailleurs humanitaires, de pillages et d’enlèvements, alors que les communications restent en grande partie coupées.
Des survivants ayant atteint Tawila, localité voisine, ont raconté à l’AFP des massacres, des enfants abattus sous les yeux de leurs parents, ainsi que des civils battus et dépouillés pendant leur fuite.
Hayat, mère de cinq enfants ayant fui la ville, a expliqué que “des jeunes hommes qui voyageaient avec nous ont été arrêtés” par des paramilitaires, ajoutant : “nous ne savons pas ce qu’il leur est arrivé”.
Le Humanitarian Research Lab de l’université Yale a indiqué que de nouvelles images satellites prises vendredi ne montraient “aucun mouvement de grande ampleur”, ce qui leur laisse penser qu’une grande partie de la population pourrait être “morte, capturée ou cachée”.
Le laboratoire a identifié au moins 31 regroupements d’objets correspondant à des corps humains entre lundi et vendredi, dans des quartiers, sur des terrains universitaires et sur des sites militaires.
“Les indicateurs montrant la poursuite des massacres sont clairement visibles”, a-t-il affirmé.
Selon l’ONU, plus de 65 000 personnes ont fui El-Fasher, mais des dizaines de milliers d’autres restent piégées. Environ 260 000 personnes vivaient dans la ville avant l’assaut final des FSR.
Lors d’une conférence à Bahreïn samedi, le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul a déclaré que le Soudan représentait “une situation absolument apocalyptique, la plus grave crise humanitaire au monde”.
Il a ajouté que les FSR avaient «promis de protéger les civils » et qu’elles seraient tenues pour responsables de leurs actes.
“Véritablement horrifiant.”
S’exprimant lors du même événement, la ministre britannique des Affaires étrangères, Yvette Cooper, a également qualifié les exactions rapportées de “véritablement horrifiantes”.
“Atrocités, exécutions de masse, famine et utilisation dévastatrice du viol comme arme de guerre, alors que les femmes et les enfants paient le plus lourd tribut de la plus grande crise humanitaire du XXIᵉ siècle”, a-t-elle déclaré.
Les FSR ont annoncé jeudi avoir arrêté plusieurs combattants accusés d’exactions lors de la prise d’El-Fasher, tandis que leur chef, Mohamed Hamdan Daglo, a promis de sanctionner «quiconque aurait commis une faute.
Cependant, le responsable humanitaire de l’ONU, Tom Fletcher, a mis en doute la volonté des FSR d’enquêter sur ces atrocités.
Les FSR, issues des milices Janjawids accusées de génocide au Darfour il y a vingt ans, comme l’armée ont été visées par des accusations de crimes de guerre depuis le début du conflit.
Les États-Unis ont précédemment conclu que les FSR avaient commis un génocide au Darfour.
Selon des rapports de l’ONU, les FSR ont reçu des armes et des drones des Émirats arabes unis, bien qu’Abu Dhabi nie tout soutien au groupe paramilitaire.
De leur côté, l’armée a bénéficié de l’appui de l’Égypte, de l’Arabie saoudite, de l’Iran et de la Turquie.
La prise d’El-Fasher donne aux FSR le contrôle des cinq capitales régionales du Darfour, divisant de fait le Soudan selon un axe est-ouest, l’armée contrôlant le nord, l’est et le centre.
Des responsables de l’ONU ont mis en garde contre la propagation des violences vers la région voisine du Kordofan, faisant état “d’atrocités à grande échelle” commises par les FSR.
AFP



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