Sous un ciel clair, face à près de 150 000 fidèles rassemblés sur l’esplanade du front de mer de Beyrouth, le Pape Léon XIV a célébré, ce mardi 2 décembre, la messe publique clôturant sa visite apostolique au Liban. Dès le matin, des fidèles venus de tout le pays avaient convergé vers la mer, tandis que les plus hautes autorités de l’État prenaient place parmi l’assemblée, témoignant de l’importance de cette célébration dans le cadre d’un voyage de trois jours profondément spirituel et chargé d’émotion.
La messe s’est ouverte par une brève intervention du patriarche melkite-catholique Youssef Absi, qui a salué le Saint-Père au nom des Églises orientales. Il a rappelé que «les fils et les filles des Églises d’Orient sont un trésor pour l’Église universelle» et que la présence du pape constitue «un message d’espérance dans une période critique», insistant sur le rôle de ces communautés comme «phares du vivre-ensemble».
«Liban, relève-toi ! Sois une prophétie de paix pour tout le Levant !»
Au centre de son homélie, Léon XIV a lancé l’appel le plus puissant de cette visite.
«Tel est le rêve qui vous est confié», a-t-il proclamé. «Liban, relève-toi ! Sois une maison de justice et de fraternité ! Sois une prophétie de paix pour tout le Levant !»
Le Royaume de Dieu, a-t-il rappelé, est décrit par le prophète Isaïe comme «un petit rejeton jaillissant d’un tronc», une modeste lueur d’espérance qui annonce une renaissance au milieu de la mort.
Le Pape a également exprimé sa gratitude pour l’accueil reçu : «Je rends grâce au Seigneur pour m’avoir permis de partager ces journées avec vous, tout en portant dans mon cœur vos souffrances et vos espérances.»
Il a prié pour que «cette terre du Levant soit toujours éclairée par la foi en Jésus-Christ, soleil de justice», afin qu’elle conserve «l’espérance qui ne passe pas».
Un appel fort à la gratitude, malgré la nuit du pays
Le pape a d’abord invité les Libanais à préserver un cœur reconnaissant, même au milieu des épreuves.
«Au terme de ces journées intenses, nous rendons grâce au Seigneur pour les nombreux dons de sa bonté», a-t-il affirmé, tout en reconnaissant la tension intérieure d’un peuple «dont la gratitude peut facilement céder la place au désenchantement».
Pour Léon XIV, la gratitude n’est pas une fuite mais un acte courageux:
Elle «doit conduire à la transformation du cœur», a-t-il expliqué, et ouvrir un chemin de vie nouvelle malgré la lassitude, la peur ou les blessures accumulées.
Une homélie profondément ancrée dans la réalité libanaise
Léon XIV n’a pas esquivé les fragilités du pays. Dans son homélie détaillée, il a rappelé que la beauté du Liban, abondamment décrite dans les Écritures, se trouve aujourd’hui «assombrie par la pauvreté, les souffrances, les blessures de l’histoire, un contexte politique instable, une crise économique dramatique, la violence et des conflits qui ravivent d’anciennes peurs».
Reconnaissant la lassitude d’un peuple éprouvé, il a mis en garde : «La gratitude peut facilement céder la place au désenchantement ; la louange peut disparaître dans la désolation du cœur.»
Mais il a aussitôt souligné l’existence de «petites lumières qui brillent au cœur de la nuit», ces signes d’espérance qui survivent malgré tout : la foi des familles, la présence active des écoles chrétiennes, l’engagement des paroisses, des mouvements, des prêtres et des religieux qui « portent la charité dans le tissu de la société libanaise».
Un appel à désarmer les cœurs pour retrouver la splendeur du pays
Le message central de l’homélie résidait dans un appel à rompre avec les divisions qui minent le pays :
«Nous n’avons qu’un seul moyen : désarmons nos cœurs, faisons tomber les armures de nos fermetures ethniques et politiques, ouvrons nos confessions religieuses à la rencontre réciproque, et réveillons le rêve d’un Liban uni.»
Il a insisté : «Chacun doit faire sa part et nous devons tous unir nos efforts pour que cette terre retrouve sa splendeur.»
«N’ayez pas peur. Levez-vous. Gardez l’espérance.»
Dans la dernière partie de son homélie, le Saint-Père a appelé le pays à refuser le découragement.
Il a invité les Libanais à garder vive la joie de la foi, malgré les incertitudes qui assèchent l’espérance, et à rester des «artisans de paix» dans un monde troublé.
Enfin, Léon XIV a rendu grâce pour «avoir pu porter les souffrances et les espérances du peuple libanais» durant ces trois jours.
Il a assuré prier pour que «cette terre du Levant reste éclairée par la foi» et qu’elle retrouve l’espérance qui ne déçoit jamais.
Éduquer les cœurs à la paix
Dans son discours final, le Pape Léon XIV a lancé un appel vibrant aux «chrétiens du Levant», les invitant à tourner leur regard vers le Seigneur avec espérance et courage. Il a exhorté les peuples du Moyen-Orient à choisir résolument la coexistence, à rejeter la violence et à ouvrir de nouveaux chapitres de réconciliation et de paix. Soulignant l’urgence d’un changement de cap profond, il a insisté sur la nécessité «d’éduquer les cœurs à la paix».
Le Saint Père a prié pour l’ensemble du Moyen-Orient et pour toutes les victimes des conflits, en évoquant tout particulièrement le «cher Liban».
Il a également appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour soutenir le dialogue et les processus de paix, et a invité les responsables politiques à entendre «le cri de leur peuple», qui aspire avant tout à la paix. S’adressant de nouveau aux chrétiens du Levant, il leur a adressé un message bref mais fort : «Courage !» Enfin, le Pape a conclu en plaçant le Liban sous la protection de Notre-Dame de Harissa.
La visite touche à sa fin
Cette messe solennelle marquait la dernière grande étape du séjour du pape Léon XIV au Liban, au terme de trois jours d’une visite dense, profondément spirituelle et chargée d’émotion. Plus tôt dans la journée, le souverain pontife s’était rendu à l’hôpital de la Croix à Jal el-Dib, où il a rencontré des malades et le personnel soignant, saluant «le courage silencieux de ceux qui guérissent les blessures visibles et invisibles du pays». Il a ensuite présidé un moment de recueillement avec les familles des victimes de l’explosion du port de Beyrouth de 2020, un échange empreint de douleur, mais aussi d’une grande dignité.
Une journée marquée par l’écoute, la compassion et la proximité, qui vient clore une visite apostolique historique. Léon XIV terminera sa visite par une cérémonie d’adieu à l’aéroport international de Beyrouth, où il adressera un dernier message au peuple libanais avant de regagner Rome.



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