Ugo Bienvenu signe son premier long-métrage animé avec Arco, un conte écologique financé par Natalie Portman et déjà primé à Annecy. Entre poésie, utopie et engagement environnemental, le film raconte l’amitié entre deux enfants issus de futurs radicalement opposés et questionne notre rapport à la planète. Refusant Hollywood pour rester fidèle à sa vision, le réalisateur français espère inspirer une nouvelle génération tout en insufflant un souffle de lumière dans l’animation française. Fortement pressenti pour la course aux Oscars, Arco pourrait propulser Bienvenu sur la scène internationale.
Financé par Natalie Portman, adulé par la critique et désormais pressenti pour la course aux Oscars, le dessin animé Arco semble avoir tous les atouts pour propulser son réalisateur, Ugo Bienvenu, sur un petit nuage.
Pourtant, le dessinateur français avoue se sentir «bizarre» et ne sait pas s'il désire vraiment la statuette du meilleur film d'animation.
«Les prix, c'est à la fois des bénédictions, mais c'est aussi une malédiction. Ils te mettent une pression pour la suite», confie-t-il à l'AFP lors d'un entretien à Los Angeles, en pleine promotion de son conte utopique. «Moi mon métier, c'est de fabriquer des choses et pour fabriquer, il faut être assez léger pour imaginer.»
C'est cette sincérité absolue qui a permis à l'auteur de bande-dessinée d'accoucher de son premier long-métrage. Refusant les avances d'Hollywood pour adapter un de ses albums sur grand écran, il a préféré créer «quelque chose de nouveau».
Primé au festival du film d'animation d'Annecy, référence mondiale du genre, Arco est une histoire d'amitié poétique entre deux enfants, où s'esquissent des futurs radicalement opposés pour notre humanité qui martyrise sa planète.
Le héros éponyme est un garçon issu d'un futur lointain, où les humains vivent en harmonie avec la nature sur des plateformes perchées dans les nuages, afin de laisser la terre se régénérer.
Vêtu d'une cape arc-en-ciel chipée à sa famille, le garnement veut remonter le temps pour rendre visite aux dinosaures. Mais il perd le contrôle de son vol et atterrit en 2075.
«Ne pas mentir aux enfants»
Il rencontre Iris, une petite fille de son âge forcée de composer avec des catastrophes climatiques à répétition et des parents qui l'éduquent par hologramme, en déléguant le quotidien à un robot baby-sitter.
Malgré un gigantesque incendie à l'horizon, la gamine va tout faire pour aider son nouvel ami à rentrer chez lui. Un élan du cœur qui lui enseigne comment secourir le genre humain.
Avec cette fable écologique, Ugo Bienvenu revendique le fait de «ne pas mentir aux enfants», car «on vit dans un monde où chaque été il y a des canicules, il y a des feux et ça va se précipiter».
Il souhaite leur dire: «c'est ça le monde dans lequel vous débarquez, c'est ça le moment que vous vivez, mais ça ne veut pas dire que c'est fichu.»
Entièrement en 2D, ce conte utopique porté par une musique enchanteresse suscite des comparaisons flatteuses avec l'univers d'Hayao Miyazaki, grand maître de l'animation japonaise.
Pourtant, le Français de 38 ans, également réalisateur de clips et d'une minisérie Marvel, a lutté pour convaincre. Le script ne parlait pas aux producteurs, notamment à cause de l'absence de grand méchant.
«On nous l'a beaucoup reproché au moment du financement, alors qu'il y a un énorme antagoniste, qui est le système dans lequel on vit», observe-t-il.
«Générer de la lumière»
Il lui a fallu prendre des risques, en mettant toutes ses économies dans la réalisation d'une «animatique», la version animée du storyboard en noir et blanc. Cette première ébauche de film a finalement séduit Mountain A, la société de production codirigée par Natalie Portman.
En octobre, l'actrice américaine expliquait à l'AFP avoir soutenu Arco pour «faire des films qui créent un monde meilleur pour nos enfants».
Habitué à un ton plus sombre, Ugo Bienvenu avoue que sa paternité l'a poussé à se défaire du cynisme de ses œuvres précédentes. «J'avais envie de faire un câlin, j'avais envie de faire un film doux» et «de générer de la lumière plutôt que de l'ombre», résume ce père de deux enfants en bas âge.
L'artiste espère désormais que le succès de ce film artisanal, réalisé entièrement à Paris pour seulement neuf millions d'euros, stimulera l'animation française.
«En France, on se bride dès le scénario parce qu'on dit: ça, on n'aura jamais les moyens de le faire», regrette-t-il. «Ce qui me rassure, c'est de me dire que si on fait des choses de manière sincère, les gens sont touchés.»
Par Romain FONSEGRIVES / AFP



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