Donald Trump envoie depuis des semaines des signaux contradictoires sur le Venezuela. La saisie mercredi d'un pétrolier au large de ce pays fait encore monter la pression sur Caracas.
Mais nombre d'observateurs s'interrogent sur la stratégie des États-Unis, entre lutte contre le trafic de drogue et volonté de changement de régime à Caracas, sur fond d'un déploiement militaire massif dans la région et de frappes contre des embarcations suspectées de narcotrafic.
Vers une offensive terrestre ?
«Ses jours sont comptés»: dans une interview avec le site Politico mardi, le président américain n'a pas mâché ses mots.
Mais il s'est gardé de dire comment il comptait faire.
Interrogé pour savoir s'il excluait l'envoi de troupes américaines au sol, M. Trump a évité de répondre dans un sens ou l'autre, conscient qu'une opération d'envergure, type invasion, à laquelle personne ne croit vraiment, n'a aucun soutien politique aux États-Unis.
Le dirigeant républicain a pourtant, publiquement, dit avoir autorisé des opérations secrètes au Venezuela, et indiqué il y a quelques semaines qu'il pourrait y avoir «très bientôt» des opérations au sol.
Pour Will Freeman, du Council on Foreign Relations, le renforcement militaire américain dans les Caraïbes pourrait être plus «une opération de type psychologique, destinée à intimider et susciter la peur».
Quelles cibles ?
L'administration Trump pourrait décider que «nous aurons l'air vraiment ridicules et que nous perdrons beaucoup de crédibilité si nous nous contentons d'ordonner à la flotte de lever l'ancre» sans rien faire, relève Phil Gunson, expert basé au Venezuela pour l'International Crisis Group.
Les États-Unis ont déployé dans les Caraïbes une véritable armada. Onze navires, dont le porte-avions Gerald Ford, le plus gros au monde, y sont actuellement stationnés.
«Nous allons probablement assister à une sorte d'intervention militaire terrestre, probablement au Venezuela, peut-être en Colombie. Mais je ne pense pas que cela suffira à renverser Maduro», dit Will Freeman.
Les experts citent comme potentielles cibles des «installations militaires» où ils pourront dire que celles-ci sont impliquées dans le trafic de drogue. Ou encore «un camp de l'ELN (la guérilla colombienne) près de la frontière avec la Colombie ou quelque chose comme ça», poursuit M. Freeman.
Les États-Unis pourraient aussi frapper des laboratoires produisant des drogues, bien que peu de sites de ce type se trouvent au Venezuela, ajoute M. Gunson.
D'aucuns s'accordent pour dire que le fentanyl, principal responsable des morts aux États-Unis, provient plutôt du Mexique.
Mais les États-Unis ont désigné plusieurs cartels de la drogue dans la région comme étant des «organisations terroristes étrangères», dont le «Cartel des Soleils» au Venezuela, possible justification d'une attaque.
Quel objectif final?
Lorsque Politico lui a demandé quel était son objectif final, Donald Trump a répondu: «Que le peuple du Venezuela soit bien traité».
Au cours de son premier mandat (2017-2021), il avait conduit sans succès une politique de sanctions maximales contre le Venezuela.
Le président américain n'est pas un adepte du changement de régime, préférant une approche transactionnelle de la diplomatie, qu'il a initialement mise en œuvre avec M. Maduro en y dépêchant son émissaire Richard Grenell.
Mais le secrétaire d'État Marco Rubio, lui-même d'origine cubaine et farouche opposant de Caracas et La Havane, a conduit en quelques mois à un changement vers une politique plus belliciste.
Mais les experts doutent de la stratégie.
«Je prédis que Maduro restera au pouvoir», dit M. Freeman, sans écarter un accord éventuel entre les États-Unis et le Venezuela dont Donald Trump pourrait se prévaloir. «Un accord sur les migrants, la drogue ou autre chose», énumère-t-il.
Pour M. Gunson, si les États-Unis renversaient Maduro, il y aura «beaucoup de communiqués indignés dénonçant le recours à la force» mais «en coulisses, beaucoup de gens pousseraient un soupir de soulagement».
Toute la question reste alors, conclut l'expert, de «savoir si cela fonctionnerait vraiment».
AFP



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