Maroc, roi d’Arabie : un lob de l’espace, une VAR, et un héros surgi de nulle part
Abderrazzak Hamdallah a inscrit un doublé qui permet au Maroc de remporter la Coupe arabe. ©Karim JAAFAR / AFP

À Lusail, sous une pluie qui fouettait Doha en jour de fête nationale, les Lions de l’Atlas ont décroché la Coupe arabe au bout d’une finale renversante contre la Jordanie (3-2 a.p.). Un bijou de plus de 50 mètres, un adversaire qui ne lâche jamais, et Hamdallah en costume de sauveur : à trois jours de l’ouverture de “sa” CAN à domicile, le Maroc a déjà allumé la mèche.

Il y a des soirs où un stade ressemble à une machine à fabriquer des scénarios. Lusail, 84 517 spectateurs et des ponchos improvisés pour tenir tête aux averses, a offert exactement ça : un match qui galope, bascule, se tord et finit par couronner celui qui refuse de tomber. Jeudi, le Maroc de Tarik Sektioui a soulevé sa deuxième Coupe arabe, treize ans après 2012, au terme d’un bras de fer irrespirable face à une Jordanie venue jouer les trouble-fête jusqu’au dernier souffle.

Un lob venu d’ailleurs, et Lusail se fige

Le match n’a pas eu le temps de se présenter : il a explosé. À la 4e minute, Oussama Tannane a vu le gardien jordanien Yazeed Abulaila légèrement avancé… et a tenté l’impensable. Un ballon frappé au culot, un lob XXL de plus de 50 mètres (certains jureraient plus), et Lusail est passé en mode sidération. Les Jordaniens ont pris l’eau une première fois, puis une deuxième : sur le terrain, le Maroc a posé sa patte, propre techniquement, supérieur dans la maîtrise, avec cette sensation de pouvoir faire le break avant la pause sans parvenir à le verrouiller. Le tableau était magnifique, mais incomplet : le réalisme, lui, faisait encore grève.

La Jordanie mord

Et dans une finale, un manque d’efficacité se paye toujours cash. Au retour des vestiaires, la Jordanie de Jamal Sellami a changé de visage : plus incisive, plus verticale, portée par une ferveur qui montait à chaque incursion. Ali Olwan a remis les compteurs à zéro de la tête (47e/48e), et le match a basculé dans un autre registre : celui des duels nerveux, des sifflets, des courses au courage.
Puis est venu le moment où la Jordanie a cru toucher le ciel. Olwan, encore lui, a transformé un penalty (65e/68e) pour signer son doublé et retourner la finale comme un gant. Lusail est devenu une cocotte-minute : la tension, le bruit, l’irrationnel, tout y était. Les Nashama avaient l’avantage, la dynamique, et même une balle de match plus tard dans le temps additionnel — une occasion repoussée miraculeusement par le dernier rempart marocain, comme si le destin avait décidé de garder une page blanche pour la suite.

La VAR, la prolongation, et l’homme qui surgit

Dos au mur, le Maroc a trouvé ce que les grands trouvent dans les soirées folles : une dernière cartouche. Abderrazak Hamdallah, entré en cours de jeu, a égalisé à la 88e minute, un but validé après intervention de la VAR. Et soudain, la finale a changé de propriétaire : place à la prolongation, place au mano a mano, place à ce football où les jambes brûlent mais où la tête refuse de capituler.
La Jordanie a cru frapper d’entrée : un but a même été inscrit au tout début de la prolongation, avant d’être annulé pour une main. Une seconde qui vous fait passer de l’extase au vide. Et dans ce genre de nuit, le vide avale tout.
Hamdallah a alors enfilé le costume complet : opportuniste, clinique, décisif. À la 100e minute, il a signé son doublé et offert au Maroc le but qui pèse une coupe. Le virage marocain est entré en transe, la Jordanie a poussé encore, mais le fil s’était rompu.

Un sacre, un signal, et la CAN qui arrive déjà

Ce Maroc-là n’avait même pas sorti toutes ses têtes d’affiche : une équipe remaniée, un groupe “bis”, mais une trajectoire nette, portée par une solidité défensive qui avait laissé très peu de miettes avant la finale. En face, la meilleure attaque du tournoi, un Olwan incandescent, et un scénario qui aurait pu basculer cent fois. Pourtant, c’est bien le Maroc qui repart avec le trophée, succédant à l’Algérie au palmarès d’une compétition FIFA réunissant 16 sélections du monde arabe.
Et c’est peut-être ça, le message le plus bruyant : à trois jours de l’ouverture de la Coupe d’Afrique des nations au Maroc (21 décembre–18 janvier), avec un premier rendez-vous à la maison face aux Comores, les Lions de l’Atlas n’ont pas seulement gagné une coupe. Ils ont gagné un test de nerfs, un match de tempête, une finale qui forge une équipe.
La CAN n’a même pas commencé que le Maroc a déjà trouvé son premier cri de victoire — celui qui dit : “On sait souffrir. Et on sait finir.”
 

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