Rien ne va plus entre l'Arabie saoudite et les États-Unis. Washington accuse Ryad de réduire la production de pétrole afin de faire monter les cours, ce qui de facto aiderait la Russie à remplir ses caisses pour sa guerre en Ukraine. Ce que réfutent en bloc les Saoudiens.
En incitant à une réduction de la production de pétrole, l'Arabie saoudite a mis à rude épreuve sa relation déjà difficile avec les États-Unis. Cependant, une rupture entre ces deux partenaires est à exclure dans l'immédiat, estiment des analystes.
Le 5 octobre, l'Opep+ -- les 13 membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) menés par l'Arabie saoudite et leurs 10 partenaires conduits par la Russie -- a décidé de sabrer ses quotas de production, afin de soutenir les prix du brut qui étaient en train de baisser.
Une augmentation des cours aiderait aussi à garnir les caisses de la Russie, qui compte sur ses ventes d'hydrocarbures pour financer sa guerre en Ukraine, pays qu'elle a envahi en février.
Dans un contexte d'inflation mondiale et de flambée des prix de l'énergie accélérée par cette guerre et alors que les Américains s'apprêtent à voter pour les élections de mi-mandat en novembre, la décision de l'Opep+ a provoqué l'ire de la Maison-Blanche.
Avant de devenir président, Joe Biden promettait de traiter Mohammed Ben Salmane en "paria", position qui a bien changé depuis (AFP)
"Il y aura des conséquences pour ce qu'ils ont fait avec la Russie", a averti mardi le président américain, Joe Biden, sans autre précision.
Les responsables en Arabie saoudite, premier exportateur de pétrole au monde, ont eux rejeté les accusations de connivence avec la Russie contre les Occidentaux, excluant tout "diktat".
Jeudi, le ministère saoudien des Affaires étrangères a assuré que la décision de l'Opep+ était motivée par des "considérations économiques" consistant à "protéger l'économie mondiale de la volatilité des marchés du pétrole".
Pour la Maison Blanche, Ryad "peut tourner autour du pot, mais les faits sont simples".
"La relation américano-saoudienne a déjà traversé des périodes de tension intense par le passé", fait remarquer Anna Jacobs, analyste de l'ONG International Crisis Group.
Mais la crise actuelle représente "une fracture, mais pas une rupture", souligne-t-elle: "La réalité est que l'Arabie saoudite et les États-Unis ont besoin l'un de l'autre."
En juillet, Joe Biden s'est rendu en Arabie saoudite où il a salué le prince héritier Mohammed ben Salmane, provoquant l'indignation des ONG internationales qui accusent cette monarchie conservatrice du Golfe de graves violations des droits humains.
Avant d'être élu président, M. Biden lui-même avait promis de faire de l'Arabie saoudite un "paria", surtout en raison de l'assassinat du journaliste et critique saoudien Jamal Khashoggi dans le consulat de son pays à Istanbul en 2018.
L'objectif de la visite de M. Biden en Arabie saoudite était d'obtenir une hausse de la production de pétrole. En vain.
Pour les Américains, une augmentation des prix du pétrole permettrait à Poutine de renflouer les caisses de la Russie pour sa guerre contre l'Ukraine (AFP)
Des membres de son parti démocrate ont ensuite accusé les Saoudiens d'être les "rois des traîtres" et d'avoir "trompé" le président américain.
Certains législateurs américains ont en outre tenté de relancer le soutien à un projet de loi visant à exposer l'Opep+ à des poursuites judiciaires antitrust. D'autres ont demandé au gouvernement de revoir la présence militaire américaine en Arabie saoudite.
Mais de telles mesures "menaceraient de rompre des relations déjà tendues, ce qui augmenterait la pression en vue d'une hausse des prix du pétrole et des carburants", prévient Torbjorn Soltvedt, de la société de renseignement sur les risques Verisk Maplecroft.
"La réaction la plus probable est ce que nous avons déjà vu: des déclarations fermes de la part des responsables politiques (américains)", estime de son côté Ellen Wald, auteur de Saudi Inc, une histoire du géant énergétique Saudi Aramco.
Le partenariat américano-saoudien, datant de l'après-Seconde Guerre mondiale et souvent décrit comme un accord "pétrole contre sécurité", a été marqué de divers désaccords, comme sur le conflit israélo-palestinien ou l'accord nucléaire avec l'Iran, grand rival régional de l'Arabie saoudite.
Les Saoudiens ont également été échaudés par la réponse tiède des États-Unis après les attaques contre des installations pétrolières en 2019 revendiquées par les Houthis au Yémen voisin, des rebelles soutenus par Téhéran.
Dans ce contexte, Ali Shihabi, analyste saoudien proche du gouvernement, met en garde contre une "réponse excessive" des Américains à la décision de l'Opep+.
Selon lui, elle ne fera qu'accélérer la quête de "diversification des relations militaires de l'Arabie saoudite, non seulement avec la Chine et la Russie, mais aussi avec la France, le Royaume-Uni, l'Inde et le Pakistan, et même le Brésil et l'Afrique du Sud".
Mais les responsables saoudiens se veulent rassurants. Dans une interview à la chaîne américaine CNN mercredi, Adel al-Jubeir, ministre d'État aux Affaires étrangères, a estimé que la relation entre les deux pays n'était pas "brisée".
"Loin de là, elle est très solide", a-t-il dit.
Avec AFP
En incitant à une réduction de la production de pétrole, l'Arabie saoudite a mis à rude épreuve sa relation déjà difficile avec les États-Unis. Cependant, une rupture entre ces deux partenaires est à exclure dans l'immédiat, estiment des analystes.
Le 5 octobre, l'Opep+ -- les 13 membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) menés par l'Arabie saoudite et leurs 10 partenaires conduits par la Russie -- a décidé de sabrer ses quotas de production, afin de soutenir les prix du brut qui étaient en train de baisser.
Connivence avec la Russie
Une augmentation des cours aiderait aussi à garnir les caisses de la Russie, qui compte sur ses ventes d'hydrocarbures pour financer sa guerre en Ukraine, pays qu'elle a envahi en février.
Dans un contexte d'inflation mondiale et de flambée des prix de l'énergie accélérée par cette guerre et alors que les Américains s'apprêtent à voter pour les élections de mi-mandat en novembre, la décision de l'Opep+ a provoqué l'ire de la Maison-Blanche.
Avant de devenir président, Joe Biden promettait de traiter Mohammed Ben Salmane en "paria", position qui a bien changé depuis (AFP)
"Il y aura des conséquences pour ce qu'ils ont fait avec la Russie", a averti mardi le président américain, Joe Biden, sans autre précision.
Les responsables en Arabie saoudite, premier exportateur de pétrole au monde, ont eux rejeté les accusations de connivence avec la Russie contre les Occidentaux, excluant tout "diktat".
Jeudi, le ministère saoudien des Affaires étrangères a assuré que la décision de l'Opep+ était motivée par des "considérations économiques" consistant à "protéger l'économie mondiale de la volatilité des marchés du pétrole".
Fracture, mais non rupture
Pour la Maison Blanche, Ryad "peut tourner autour du pot, mais les faits sont simples".
"La relation américano-saoudienne a déjà traversé des périodes de tension intense par le passé", fait remarquer Anna Jacobs, analyste de l'ONG International Crisis Group.
Mais la crise actuelle représente "une fracture, mais pas une rupture", souligne-t-elle: "La réalité est que l'Arabie saoudite et les États-Unis ont besoin l'un de l'autre."
En juillet, Joe Biden s'est rendu en Arabie saoudite où il a salué le prince héritier Mohammed ben Salmane, provoquant l'indignation des ONG internationales qui accusent cette monarchie conservatrice du Golfe de graves violations des droits humains.
Avant d'être élu président, M. Biden lui-même avait promis de faire de l'Arabie saoudite un "paria", surtout en raison de l'assassinat du journaliste et critique saoudien Jamal Khashoggi dans le consulat de son pays à Istanbul en 2018.
Rois des traîtres
L'objectif de la visite de M. Biden en Arabie saoudite était d'obtenir une hausse de la production de pétrole. En vain.
Pour les Américains, une augmentation des prix du pétrole permettrait à Poutine de renflouer les caisses de la Russie pour sa guerre contre l'Ukraine (AFP)
Des membres de son parti démocrate ont ensuite accusé les Saoudiens d'être les "rois des traîtres" et d'avoir "trompé" le président américain.
Certains législateurs américains ont en outre tenté de relancer le soutien à un projet de loi visant à exposer l'Opep+ à des poursuites judiciaires antitrust. D'autres ont demandé au gouvernement de revoir la présence militaire américaine en Arabie saoudite.
Mais de telles mesures "menaceraient de rompre des relations déjà tendues, ce qui augmenterait la pression en vue d'une hausse des prix du pétrole et des carburants", prévient Torbjorn Soltvedt, de la société de renseignement sur les risques Verisk Maplecroft.
"La réaction la plus probable est ce que nous avons déjà vu: des déclarations fermes de la part des responsables politiques (américains)", estime de son côté Ellen Wald, auteur de Saudi Inc, une histoire du géant énergétique Saudi Aramco.
Le partenariat américano-saoudien, datant de l'après-Seconde Guerre mondiale et souvent décrit comme un accord "pétrole contre sécurité", a été marqué de divers désaccords, comme sur le conflit israélo-palestinien ou l'accord nucléaire avec l'Iran, grand rival régional de l'Arabie saoudite.
Attention à une "réponse excessive"
Les Saoudiens ont également été échaudés par la réponse tiède des États-Unis après les attaques contre des installations pétrolières en 2019 revendiquées par les Houthis au Yémen voisin, des rebelles soutenus par Téhéran.
Dans ce contexte, Ali Shihabi, analyste saoudien proche du gouvernement, met en garde contre une "réponse excessive" des Américains à la décision de l'Opep+.
Selon lui, elle ne fera qu'accélérer la quête de "diversification des relations militaires de l'Arabie saoudite, non seulement avec la Chine et la Russie, mais aussi avec la France, le Royaume-Uni, l'Inde et le Pakistan, et même le Brésil et l'Afrique du Sud".
Mais les responsables saoudiens se veulent rassurants. Dans une interview à la chaîne américaine CNN mercredi, Adel al-Jubeir, ministre d'État aux Affaires étrangères, a estimé que la relation entre les deux pays n'était pas "brisée".
"Loin de là, elle est très solide", a-t-il dit.
Avec AFP
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