Le président Michel Aoun, en partance, voulait absolument terminer son bilan présidentiel étincelant par une annonce qui fera date, et l’ouverture d’une nouvelle ère. D’où le sprint vers la délimitation des frontières maritimes. Maintenant que c’est fait, c’est tout le clan impliqué qui pavane, laissant miroiter un enrichissement sûr et accéléré.
Une vantardise qui a connu un précédent récent. En 2013, lorsque la première adjudication internationale a été lancée, on se souvient que Gebran Bassil avait tapissé les panneaux de la ville, prévoyant des lendemains radieux: TGV, autoroutes… et des eldorados à perte de vue.
Le processus fut cependant interrompu suite à des tiraillements sur la répartition, mais aussi pour pouvoir inscrire cette réalisation au crédit du mandat de Michel Aoun.
Aujourd’hui, loin de nous l’idée de doucher les espoirs, voyons quand même de façon réaliste quelles infortunes peuvent subvenir avant que nous, peuple damné, puissions profiter de cette manne.
1. Première haie de la course d’obstacles: déjà trouver du gaz dans nos fonds maritimes, dans le bloc 9 ou ailleurs. Il est vrai que les perspectives sont bonnes, mais on ne peut être sûr qu’après avoir foré, alors que beaucoup lancent déjà des chiffres en dizaines de milliards de dollars ou de mètres cubes.
2. Que faire de ce gaz une fois trouvé en quantités exploitables? La première utilisation est naturellement de servir à la consommation interne: les centrales électriques côtières, puis éventuellement les grosses industries du littoral, et enfin l’utilisation domestique par le remplissage de nos bonbonnes folkloriques.
Mais tout cela exige des infrastructures et des investissements en centaines de millions de dollars, dont on n’a pas le premier centime. Et qu’il sera difficile d’obtenir via des investisseurs étrangers, vu notre réputation calamiteuse mondialement reconnue en tant que pays ne respectant aucun engagement ni aucune loi. D’ailleurs, aucun organisme étranger de garantie des investissements n’osera intervenir.
3. Pour l’exportation, le marché le plus grand et le plus demandeur est bien sûr l’Europe. Pour l’y acheminer, on a deux choix: soit par gazoduc, soit par tankers.
Dans le premier cas, un projet de gazoduc, appelé EastMed, a été envisagé pour servir, à partir des champs gaziers de la Méditerranée orientale, le marché européen, via la Grèce puis l’Italie. Une étude technique a même été réalisée et des accords préliminaires signés. Le problème est qu’il englobe Israël, et il est hors de question de faire partie de cette sinistre assemblée, même si c’est notre intérêt le plus évident.
Dans le cas où le transport devait se faire par tankers (bateaux-citernes), il va falloir d’abord le liquéfier. Or une centrale de liquéfaction est trop chère à construire. Même Israël (ainsi que Chypre) y a renoncé pour le moment, et préfère envoyer son gaz par gazoduc en Égypte où une station de liquéfaction existe déjà.
Là-bas, une fois liquéfié, on l’envoie par tankers, en plus du gaz égyptien, sur le marché européen. Le Liban peut très bien faire de même en concluant un accord bilatéral avec la seule Égypte. Mais le problème est que notre gaz risque ainsi d’être mélangé dans une même usine avec – et contaminé par – le gaz israélien.
4. Enfin, reste le hic le plus important. Si la gouvernance locale reste telle quelle, on se fera un point d’honneur de gaspiller toute cette richesse. Et toutes les lois anti-corruption votées ou à venir n’y pourront rien. On est très créatifs pour trouver toujours un moyen de détourner la manne. Le Hezbollah, qui détient le pouvoir de facto, y verra aussi un bon moyen de financer ses agissements au Liban et ailleurs.
L’Irak, un des pays les plus riches en hydrocarbures, en est un exemple vivant. La mauvaise gouvernance puis l’instabilité exacerbées par la mainmise politique des milices pro-iraniennes ont eu un effet néfaste sur la performance de l’industrie pétrolière.
Bref, on n’est pas encore sorti de l’auberge. Les milliards attendront une meilleure gouvernance et la réalisation de ces fameuses réformes ressassées depuis toujours par les pays donateurs et le FMI. La condition sine qua non qu’on tente depuis toujours aussi d’éviter.
[email protected]
Une vantardise qui a connu un précédent récent. En 2013, lorsque la première adjudication internationale a été lancée, on se souvient que Gebran Bassil avait tapissé les panneaux de la ville, prévoyant des lendemains radieux: TGV, autoroutes… et des eldorados à perte de vue.
Le processus fut cependant interrompu suite à des tiraillements sur la répartition, mais aussi pour pouvoir inscrire cette réalisation au crédit du mandat de Michel Aoun.
Aujourd’hui, loin de nous l’idée de doucher les espoirs, voyons quand même de façon réaliste quelles infortunes peuvent subvenir avant que nous, peuple damné, puissions profiter de cette manne.
1. Première haie de la course d’obstacles: déjà trouver du gaz dans nos fonds maritimes, dans le bloc 9 ou ailleurs. Il est vrai que les perspectives sont bonnes, mais on ne peut être sûr qu’après avoir foré, alors que beaucoup lancent déjà des chiffres en dizaines de milliards de dollars ou de mètres cubes.
2. Que faire de ce gaz une fois trouvé en quantités exploitables? La première utilisation est naturellement de servir à la consommation interne: les centrales électriques côtières, puis éventuellement les grosses industries du littoral, et enfin l’utilisation domestique par le remplissage de nos bonbonnes folkloriques.
Mais tout cela exige des infrastructures et des investissements en centaines de millions de dollars, dont on n’a pas le premier centime. Et qu’il sera difficile d’obtenir via des investisseurs étrangers, vu notre réputation calamiteuse mondialement reconnue en tant que pays ne respectant aucun engagement ni aucune loi. D’ailleurs, aucun organisme étranger de garantie des investissements n’osera intervenir.
3. Pour l’exportation, le marché le plus grand et le plus demandeur est bien sûr l’Europe. Pour l’y acheminer, on a deux choix: soit par gazoduc, soit par tankers.
Dans le premier cas, un projet de gazoduc, appelé EastMed, a été envisagé pour servir, à partir des champs gaziers de la Méditerranée orientale, le marché européen, via la Grèce puis l’Italie. Une étude technique a même été réalisée et des accords préliminaires signés. Le problème est qu’il englobe Israël, et il est hors de question de faire partie de cette sinistre assemblée, même si c’est notre intérêt le plus évident.
Dans le cas où le transport devait se faire par tankers (bateaux-citernes), il va falloir d’abord le liquéfier. Or une centrale de liquéfaction est trop chère à construire. Même Israël (ainsi que Chypre) y a renoncé pour le moment, et préfère envoyer son gaz par gazoduc en Égypte où une station de liquéfaction existe déjà.
Là-bas, une fois liquéfié, on l’envoie par tankers, en plus du gaz égyptien, sur le marché européen. Le Liban peut très bien faire de même en concluant un accord bilatéral avec la seule Égypte. Mais le problème est que notre gaz risque ainsi d’être mélangé dans une même usine avec – et contaminé par – le gaz israélien.
4. Enfin, reste le hic le plus important. Si la gouvernance locale reste telle quelle, on se fera un point d’honneur de gaspiller toute cette richesse. Et toutes les lois anti-corruption votées ou à venir n’y pourront rien. On est très créatifs pour trouver toujours un moyen de détourner la manne. Le Hezbollah, qui détient le pouvoir de facto, y verra aussi un bon moyen de financer ses agissements au Liban et ailleurs.
L’Irak, un des pays les plus riches en hydrocarbures, en est un exemple vivant. La mauvaise gouvernance puis l’instabilité exacerbées par la mainmise politique des milices pro-iraniennes ont eu un effet néfaste sur la performance de l’industrie pétrolière.
Bref, on n’est pas encore sorti de l’auberge. Les milliards attendront une meilleure gouvernance et la réalisation de ces fameuses réformes ressassées depuis toujours par les pays donateurs et le FMI. La condition sine qua non qu’on tente depuis toujours aussi d’éviter.
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