Alors que Pékin est le principal partenaire commercial de l'Allemagne, et que près de 5 000 entreprises allemandes sont actives en Chine, Berlin est appelé à devenir moins dépendante de Pékin. Avant de s'envoler pour Pékin, le chancelier Olaf Scholz a esquissé les contours d'une nouvelle stratégie, sans découplage vis-à-vis de la Chine, mais en réduisant "les dépendances unilatérales"
Avant de s'envoler pour Pékin, Olaf Scholz a esquissé les contours d'une nouvelle stratégie, sans découplage vis-à-vis de la Chine, mais en réduisant "les dépendances unilatérales". (AFP)
Se détourner du plus grand marché au monde ? Délicat. Se passer des terres rares ? Encore plus complexe. Appelée à devenir moins dépendante de la Chine, l'Allemagne, dont le chancelier Olaf Scholz se rend à Pékin vendredi, a du chemin à faire.
La crise avec la Russie a mis en lumière la vulnérabilité de la première économie européenne à une autre autocratie, la Chine, où les groupes allemands réalisent une part importante de leurs profits.
Depuis six ans, la Chine est le principal partenaire commercial de l'Allemagne avec un volume d'échanges de 246 milliards d'euros l'an dernier, dont 104 milliards de voitures, machines, et autres produits chimiques vendus au géant asiatique.
Au premier semestre 2022, les investissements directs allemands en République populaire ont atteint un record, environ dix milliards d'euros, selon une étude de l'institut économique IW.
Plus de 5.000 entreprises allemandes sont actives en Chine, dont les champions de l'industrie nationale, de Volkswagen à Siemens, mais aussi d'innombrables PME, du fabricant de tronçonneuses Stihl au confiseur Haribo.
La dépendance à limiter "de façon urgente" concerne les terres rares et matières premières comme le cobalt, lithium ou magnésium, dont l'Allemagne, et l'Europe, ont besoin, notamment pour les batteries des voitures électriques, et qu'elles achètent massivement à la Chine, note Jürgen Matthes, économiste à l'Institut IW de Cologne.
"La naïveté envers la Chine est terminée", a promis le ministre écologiste allemand de l'Économie Robert Habeck avant l'été.
Avant de s'envoler pour Pékin, Olaf Scholz a esquissé les contours d'une nouvelle stratégie, sans découplage vis-à-vis de la Chine mais en réduisant "les dépendances unilatérales" avec "sens des proportions et pragmatisme".
"Il y a désormais toute une série d'entreprises allemandes qui perçoivent la Chine avant tout comme un concurrent et non plus comme une opportunité de marché", affirme Tim Rühlig, spécialiste de la Chine à l'institut allemand de politique étrangère (DGAP).
Dès 2019, avant l'Union européenne, la puissante Fédération de l'industrie allemande (BDI) avait pour la première fois défini la Chine comme un "concurrent systémique" et non plus seulement comme un partenaire.
Mais les poids lourds de l'économie allemande sont les plus réticents à changer de cap.
"Quelques grandes entreprises continuent d'étendre leur présence de manière significative", estime Jürgen Matthes.
Les trois grands constructeurs automobiles allemands - Volkswagen, BMW et Mercedes- ainsi que le groupe chimique BASF, ont représenté un tiers de tous les investissements européens en République populaire de 2018 à 2021, selon une récente étude du groupe Rhodium.
En 2021, Volkswagen a réalisé environ 40% de son chiffre d'affaires en Chine. La part était de 21% pour Adidas, de 13% pour Siemens.
Pas étonnant que l'ancien PDG de Volkswagen, Herbert Diess, quelques mois avant de céder les rênes du groupe, se soit dit "préoccupé" de voir Berlin hausser le ton avec Pékin.
La semaine dernière, le PDG du leader de la chimie BASF a appelé à cesser "le China bashing", martelant qu'il s'agissait d'un marché prioritaire pour son groupe qui va réduire la voilure dans une Europe au bord de la récession.
"Risquer de perdre notre position d'un jour à l'autre sans alternative serait insensé", a mis en garde le fédération des PME avant le voyage du chancelier, appelant à ne pas "briser la porcelaine chinoise".
Les poids lourds de l'économie allemande sont les plus réticents à changer de cap. (AFP)
Un changement de cap de l'économie allemande "est possible", car il s'agit de "combattre les dépendances de manière très ciblée", et non d'un détachement complet, estime Tim Rühlig.
"Mais la mise en œuvre est extrêmement exigeante", reconnaît-il.
Pour influencer les milieux d'affaires, Berlin peut notamment être plus restrictif sur les garanties publiques d'investissement et d'exportation vers la Chine. Les entreprises ne pourraient plus investir qu'à leurs risques et périls, notamment en cas de transfert de technologie.
La banque publique KfW pourrait cibler ses prêts dans des pays d'Asie représentant une alternative, comme l'Indonésie ou la Thaïlande.
"La diversification est essentielle, il faut commercer davantage avec d'autres pays à la croissance dynamique", exhorte Jürgen Matthes.
D'autant, assure-t-il, que l'économie allemande, avec "seulement 3% des emplois" directement et indirectement liés au commerce avec le géant asiatique, peut supporter une baisse des échanges bilatéraux.
Avec AFP
Avant de s'envoler pour Pékin, Olaf Scholz a esquissé les contours d'une nouvelle stratégie, sans découplage vis-à-vis de la Chine, mais en réduisant "les dépendances unilatérales". (AFP)
Se détourner du plus grand marché au monde ? Délicat. Se passer des terres rares ? Encore plus complexe. Appelée à devenir moins dépendante de la Chine, l'Allemagne, dont le chancelier Olaf Scholz se rend à Pékin vendredi, a du chemin à faire.
Une vulnérabilité importante
La crise avec la Russie a mis en lumière la vulnérabilité de la première économie européenne à une autre autocratie, la Chine, où les groupes allemands réalisent une part importante de leurs profits.
Depuis six ans, la Chine est le principal partenaire commercial de l'Allemagne avec un volume d'échanges de 246 milliards d'euros l'an dernier, dont 104 milliards de voitures, machines, et autres produits chimiques vendus au géant asiatique.
Au premier semestre 2022, les investissements directs allemands en République populaire ont atteint un record, environ dix milliards d'euros, selon une étude de l'institut économique IW.
Plus de 5.000 entreprises allemandes sont actives en Chine, dont les champions de l'industrie nationale, de Volkswagen à Siemens, mais aussi d'innombrables PME, du fabricant de tronçonneuses Stihl au confiseur Haribo.
La dépendance à limiter "de façon urgente" concerne les terres rares et matières premières comme le cobalt, lithium ou magnésium, dont l'Allemagne, et l'Europe, ont besoin, notamment pour les batteries des voitures électriques, et qu'elles achètent massivement à la Chine, note Jürgen Matthes, économiste à l'Institut IW de Cologne.
Prise de conscience
"La naïveté envers la Chine est terminée", a promis le ministre écologiste allemand de l'Économie Robert Habeck avant l'été.
Avant de s'envoler pour Pékin, Olaf Scholz a esquissé les contours d'une nouvelle stratégie, sans découplage vis-à-vis de la Chine mais en réduisant "les dépendances unilatérales" avec "sens des proportions et pragmatisme".
"Il y a désormais toute une série d'entreprises allemandes qui perçoivent la Chine avant tout comme un concurrent et non plus comme une opportunité de marché", affirme Tim Rühlig, spécialiste de la Chine à l'institut allemand de politique étrangère (DGAP).
Dès 2019, avant l'Union européenne, la puissante Fédération de l'industrie allemande (BDI) avait pour la première fois défini la Chine comme un "concurrent systémique" et non plus seulement comme un partenaire.
Les grands patrons traînent des pieds
Mais les poids lourds de l'économie allemande sont les plus réticents à changer de cap.
"Quelques grandes entreprises continuent d'étendre leur présence de manière significative", estime Jürgen Matthes.
Les trois grands constructeurs automobiles allemands - Volkswagen, BMW et Mercedes- ainsi que le groupe chimique BASF, ont représenté un tiers de tous les investissements européens en République populaire de 2018 à 2021, selon une récente étude du groupe Rhodium.
En 2021, Volkswagen a réalisé environ 40% de son chiffre d'affaires en Chine. La part était de 21% pour Adidas, de 13% pour Siemens.
Pas étonnant que l'ancien PDG de Volkswagen, Herbert Diess, quelques mois avant de céder les rênes du groupe, se soit dit "préoccupé" de voir Berlin hausser le ton avec Pékin.
La semaine dernière, le PDG du leader de la chimie BASF a appelé à cesser "le China bashing", martelant qu'il s'agissait d'un marché prioritaire pour son groupe qui va réduire la voilure dans une Europe au bord de la récession.
"Risquer de perdre notre position d'un jour à l'autre sans alternative serait insensé", a mis en garde le fédération des PME avant le voyage du chancelier, appelant à ne pas "briser la porcelaine chinoise".
Un changement de cap "possible"
Les poids lourds de l'économie allemande sont les plus réticents à changer de cap. (AFP)
Un changement de cap de l'économie allemande "est possible", car il s'agit de "combattre les dépendances de manière très ciblée", et non d'un détachement complet, estime Tim Rühlig.
"Mais la mise en œuvre est extrêmement exigeante", reconnaît-il.
Pour influencer les milieux d'affaires, Berlin peut notamment être plus restrictif sur les garanties publiques d'investissement et d'exportation vers la Chine. Les entreprises ne pourraient plus investir qu'à leurs risques et périls, notamment en cas de transfert de technologie.
La banque publique KfW pourrait cibler ses prêts dans des pays d'Asie représentant une alternative, comme l'Indonésie ou la Thaïlande.
"La diversification est essentielle, il faut commercer davantage avec d'autres pays à la croissance dynamique", exhorte Jürgen Matthes.
D'autant, assure-t-il, que l'économie allemande, avec "seulement 3% des emplois" directement et indirectement liés au commerce avec le géant asiatique, peut supporter une baisse des échanges bilatéraux.
Avec AFP
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