«Les petites histoires» des bookmakers et spéculateurs du dollar
Les «petites» histoires au sujet des batailles livrées par des clans de «changeurs opaques» concentrés dans certains secteurs de la banlieue-sud de Beyrouth enflamment la toile depuis quelques jours. Surtout que ces «petites» histoires qui tournent autour de paris et de spéculations auraient connu des fins malheureuses mais pas imprévues. Et pour cause: accepter un pari signifie, par définition, assumer le risque d’une éventuelle perte. Mais dans ce cas de figure, les bookmakers se seraient enfuis en emportant d’importants butins de billets verts.

«Des changeurs opaques, non agréés par les autorités compétentes», puisque le syndicat des changeurs au Liban les a désavoués, auraient procédé à l’émission de "contrats forward" (à terme) sur la parité de la livre libanaise face au dollar. Ce genre de contrat donne lieu, par définition, à «une obligation» et non pas à un droit d’acheter ou de vendre un actif à une date future bien déterminée pour un prix convenu entre deux entités. Il s’agit d’un contrat négocié de gré à gré, qui n’est pas standardisé, et surtout qui n’est soumis à aucune réglementation concernant la variation de l’actif. Ainsi le risque de défaut existe. Comme le prix du contrat forward évolue, sa valeur augmente pour une partie et devient une dette pour l’autre partie. Cela signifie qu’il existe un certain risque de contrepartie, dans lequel le contrat peut ne pas être honoré malgré l’obligation.

Paris sur une baisse du taux $/LL  

Les changeurs en question, en jouant les bookmakers, auraient accumulé un volume de paris sur une baisse de la valeur du dollar face à la livre nettement supérieur à celui des paris sur une hausse du dollar. Les parieurs ont misé davantage sur un dollar équivalent à une valeur variant entre 35.000 LL et 37.000 LL. Or, le taux de change du dollar face à la livre n’a cessé, depuis le début du mois en cours, d’enregistrer des pics, accusant une hausse de plus de 3.500 LL depuis le 1er décembre. Cette situation a mené au défaut de paiement des bookmakers. Sachant qu’un bookmaker averti se doit d’effectuer une analyse pointue de la conjoncture et de prendre son temps avant de se lancer dans un duel à armes égales. En d’autres termes, il faut qu’il tente d’obtenir un montant égal de paris de chaque côté des parieurs.


Une onde de choc

Les nouvelles qui ont circulé sur d’éventuels suicides, des fuites avec des sommes énormes et même des meurtres parmi ces changeurs ont créé une onde de choc parmi la population. De tels actes ne se produisent pas pour de légères baisses ou hausses de la parité, mais lorsque d’énormes pertes sont en jeu.

Une source bancaire interrogée par Ici Beyrouth n’a pas paru surprise, estimant que ce phénomène n’est pas improbable, sans pouvoir toutefois le confirmer. Elle a rappelé que des incidents similaires avaient eu lieu pendant la guerre au Liban lorsqu’il y avait eu de fortes fluctuations de la parité du dollar face à la livre. Des actes frauduleux avaient été perpétrés à l’époque par deux personnes, l’une à Fun el-Cheback et l’autre du côté de Hamra, rappelle-t-on de même source. Selon elle, c’est normalement au procureur général financier d’agir aujourd’hui.

Mais il est peu probable que la justice s’en mêle, surtout dans une région où l’État n’est pas présent et où la loi du plus fort prévaut.
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