©Ronnie Chatah en souvenir de son père Mohammad Combien d’autres doivent-ils encore tomber_.
Huit ans sont passés depuis l’assassinat de Mohamad Chatah, et à chaque commémoration de ceux qui ont péri comme lui dans un attentat politique, c’est la même question qui revient. Où en est-on arrivé dans les enquêtes ? Et, comme à chaque commémoration, toujours aucun semblant de réponse. Seule certitude: l’impunité est reine dans un État qui n’en est plus un.
Mohammad Chatah, économiste, ex-ministre des Finances, ancien ambassadeur à Washington et conseiller de l’ancien Premier ministre Saad Hariri, a été tué le 27 décembre 2013 dans un attentat à la voiture piégée dans le centre-ville de Beyrouth. Il s’agit de la 12e personnalité politique proche du camp du 14 Mars à rejoindre la liste noire des “martyrs” de la révolution du Cèdre depuis l’assassinat de Rafic Hariri, le 14 février 2005. Pour marquer l’occasion, Ici Beyrouth a été à la rencontre de son fils aîné Ronnie, l’activiste de la famille connu pour son franc-parler.
Pour Ronnie Chatah, il n’existe aucune zone d’ombre quant aux raisons qui ont conduit à l’assassinat de son père ni en ce qui concerne les auteurs de ce crime ou l’absence de toute enquête. Fidèle à cette franchise qui le caractérise, M. Chatah s’exprime sans détours: "Cet assassinat n’est pas une histoire de fiction où il y aurait un certain raisonnement à suivre et plusieurs options à débattre." Pour lui, le motif des assassins est clair comme de l’eau de roche: Mohammad Chatah était connu pour être un excellent diplomate et négociateur, et un homme qui nomme un chat un chat. Et ce sont ces attributs-là qui ont été insupportables pour les tueurs.
Quelques jours avant sa mort, Chatah avait rédigé une lettre ouverte au président iranien de l’époque, Hassan Rouhani, qu’il envisageait de faire signer par les députés du 14 Mars d’envoyer au dirigeant iranien pour lui demander d’aider le Liban. Cette lettre, que la famille a filtrée à la presse le jour des funérailles, se trouve toujours sur le site du Wall Street Journal. Dans sa missive, le diplomate critique le rôle du Hezbollah et les répercussions négatives de sa politique sur la souveraineté et la sécurité du pays.
Ronnie Chatah précise que l’assassinat de son père est dû au cumul de ses propos au fil des années contre l’hégémonie croissante de l’Iran sur les affaires internes du pays. Depuis son retour au Liban, Mohammad Chatah s’en prenait à l’emprise écrasante du Hezbollah sur le fonctionnement de l’Etat, qu’il accusait d’entraîner le pays - rien n’a changé depuis - dans la spirale de guerres régionales aux dépens des Libanais. "Le Hezbollah ne tolère pas que quelqu’un, mon père compris, s’approche des questions de sécurité qui le concernent. Or mon père s’est en pris directement à leur appareil sécuritaire", confie le jeune activiste.
Pour Ronnie Chatah, l’assassinat du diplomate n’est pas un cas unique. Chatah n’est qu’une victime parmi des dizaines d’autres, qui ont été éliminées pour avoir osé remettre en question le dispositif sécuritaire du Hezbollah ou à avoir critiqué ses positions pro-iranienne. Le jeune homme rappelle que dans son dernier tweet, Mohammad Chatah pointait directement du doigt le Hezbollah, l’accusant d’avoir poursuivi l’oeuvre commencée par le régime Assad quinze ans plus tôt: défigurer le Liban en prenant le contrôle direct de son pouvoir de décision en matière de politique étrangère et de sécurité.
Ronnie Chatah pense que son père n’est pas le dernier nom à rejoindre liste noire: il évoque la mémoire de Lokman Slim, assassiné dans la nuit du 3 février 2021, en rajoutant que le courageux activiste chiite anti-Hezbollah ne sera probablement pas le dernier à tomber sous les coups du parti.
L’enquête inexistante d’un État failli
En réponse au sort réservé à l’enquête sur l’assassinat de son père, Ronnie Chatah s’excuse à l’avance pour la dureté de ses propos: "Le simple fait que cette question nous soit posée depuis des années à nous, membres de la famille, démontre à quel point l’Etat libanais est inexistant. Cette question serait évidente dans un pays dont le système judiciaire est indépendant, et non dans un État failli comme le nôtre.”
“De notre côté, nous n’avons aucune information sur l’ouverture d’une enquête relative à l’assassinat de mon père. Nous vivons dans un pays où la violence politique fait partie de notre vie. La réponse à cette question est évidente, lorsqu’un certain groupe bénéficie d’une protection, que ce soit à travers ses armes, ses appuis ou son système de sécurité. Prenez la double explosion du port. L’enquête ne va aboutir à rien”, poursuit-il.
Et de conclure sur un ton aussi concis et lapidaire que celui de Mohammad Chatah: "Il n’y aura aucune éclaircie tant que l’Iran nous perçoit exclusivement comme l’une de ses zones stratégiques.”
Mohammad Chatah, économiste, ex-ministre des Finances, ancien ambassadeur à Washington et conseiller de l’ancien Premier ministre Saad Hariri, a été tué le 27 décembre 2013 dans un attentat à la voiture piégée dans le centre-ville de Beyrouth. Il s’agit de la 12e personnalité politique proche du camp du 14 Mars à rejoindre la liste noire des “martyrs” de la révolution du Cèdre depuis l’assassinat de Rafic Hariri, le 14 février 2005. Pour marquer l’occasion, Ici Beyrouth a été à la rencontre de son fils aîné Ronnie, l’activiste de la famille connu pour son franc-parler.
Pour Ronnie Chatah, il n’existe aucune zone d’ombre quant aux raisons qui ont conduit à l’assassinat de son père ni en ce qui concerne les auteurs de ce crime ou l’absence de toute enquête. Fidèle à cette franchise qui le caractérise, M. Chatah s’exprime sans détours: "Cet assassinat n’est pas une histoire de fiction où il y aurait un certain raisonnement à suivre et plusieurs options à débattre." Pour lui, le motif des assassins est clair comme de l’eau de roche: Mohammad Chatah était connu pour être un excellent diplomate et négociateur, et un homme qui nomme un chat un chat. Et ce sont ces attributs-là qui ont été insupportables pour les tueurs.
Quelques jours avant sa mort, Chatah avait rédigé une lettre ouverte au président iranien de l’époque, Hassan Rouhani, qu’il envisageait de faire signer par les députés du 14 Mars d’envoyer au dirigeant iranien pour lui demander d’aider le Liban. Cette lettre, que la famille a filtrée à la presse le jour des funérailles, se trouve toujours sur le site du Wall Street Journal. Dans sa missive, le diplomate critique le rôle du Hezbollah et les répercussions négatives de sa politique sur la souveraineté et la sécurité du pays.
Ronnie Chatah précise que l’assassinat de son père est dû au cumul de ses propos au fil des années contre l’hégémonie croissante de l’Iran sur les affaires internes du pays. Depuis son retour au Liban, Mohammad Chatah s’en prenait à l’emprise écrasante du Hezbollah sur le fonctionnement de l’Etat, qu’il accusait d’entraîner le pays - rien n’a changé depuis - dans la spirale de guerres régionales aux dépens des Libanais. "Le Hezbollah ne tolère pas que quelqu’un, mon père compris, s’approche des questions de sécurité qui le concernent. Or mon père s’est en pris directement à leur appareil sécuritaire", confie le jeune activiste.
Pour Ronnie Chatah, l’assassinat du diplomate n’est pas un cas unique. Chatah n’est qu’une victime parmi des dizaines d’autres, qui ont été éliminées pour avoir osé remettre en question le dispositif sécuritaire du Hezbollah ou à avoir critiqué ses positions pro-iranienne. Le jeune homme rappelle que dans son dernier tweet, Mohammad Chatah pointait directement du doigt le Hezbollah, l’accusant d’avoir poursuivi l’oeuvre commencée par le régime Assad quinze ans plus tôt: défigurer le Liban en prenant le contrôle direct de son pouvoir de décision en matière de politique étrangère et de sécurité.
Ronnie Chatah pense que son père n’est pas le dernier nom à rejoindre liste noire: il évoque la mémoire de Lokman Slim, assassiné dans la nuit du 3 février 2021, en rajoutant que le courageux activiste chiite anti-Hezbollah ne sera probablement pas le dernier à tomber sous les coups du parti.
L’enquête inexistante d’un État failli
En réponse au sort réservé à l’enquête sur l’assassinat de son père, Ronnie Chatah s’excuse à l’avance pour la dureté de ses propos: "Le simple fait que cette question nous soit posée depuis des années à nous, membres de la famille, démontre à quel point l’Etat libanais est inexistant. Cette question serait évidente dans un pays dont le système judiciaire est indépendant, et non dans un État failli comme le nôtre.”
“De notre côté, nous n’avons aucune information sur l’ouverture d’une enquête relative à l’assassinat de mon père. Nous vivons dans un pays où la violence politique fait partie de notre vie. La réponse à cette question est évidente, lorsqu’un certain groupe bénéficie d’une protection, que ce soit à travers ses armes, ses appuis ou son système de sécurité. Prenez la double explosion du port. L’enquête ne va aboutir à rien”, poursuit-il.
Et de conclure sur un ton aussi concis et lapidaire que celui de Mohammad Chatah: "Il n’y aura aucune éclaircie tant que l’Iran nous perçoit exclusivement comme l’une de ses zones stratégiques.”
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