La perception du public est fortement façonnée par le flux énorme d’informations et/ou de désinformations, venant des médias et des réseaux sociaux toutes tendances confondues, et éloigne souvent de la réalité. Réalité et perception ne s'alignent donc pas toujours, la perception étant souvent la plus importante. Pour l’opinion publique, la perception est la réalité. En effet, elle est l’une des bases fondamentales du discours quand il s’agit d’élections et de mobilisation, et oriente les politiques. Par contre, quand il s’agit de l’intérêt national suprême, les choix stratégiques devraient être basés sur des données objectives, et non sur les perceptions populistes nuisibles et dangereuses.
Perception de suprématie iranienne
L’expansionnisme iranien est perçu comme gagnant. Cependant Téhéran est loin de remporter une victoire écrasante, encore moins de réaliser une paix avantageuse. L’Iran a réussi à créer de nouvelles règles du jeu face auxquelles Washington n’a pas adopté de stratégie réussie; en effet, les mollahs de Qom sont en train d’avancer leurs pions sans induire un conflit armé avec les États-Unis. Ils utilisent habilement leurs DIME, ou instruments stratégiques, notamment Diplomatie, Information, force Militaire et Economie. Leur diplomatie comporte un volet idéologique et émotionnel, et un autre rationnel basé sur la dissémination du modèle iranien dans tous les pays environnants.
Dans ce modèle, le vrai pouvoir est entre les mains de milices (Basij, Corps des Gardiens de la Révolution…), gérées elles-mêmes par l’establishment religieux, alors que l’État s’occupe des affaires courantes. Ce modèle est déjà en place en Irak (milices du hachd el-chaabi), en Syrie (Hezbollah-Syrie), au Liban (Hezbollah), et au Yémen (Houthis). Le pouvoir informationnel iranien a réussi à créer une perception de suprématie, à travers la multiplication des menaces d’annihilation d’Israël et de destruction de la flotte américaine. Ajoutés à cela, les assassinats ou tentatives d’assassinat de personnalités anti-iraniennes restent sans empreintes, mais sont significativement suggestifs. La force militaire iranienne est également médiatisée au décuple à travers des manœuvres militaires exagérant les capacités réelles; par contre elle dispose de moyens asymétriques: missiles, drones, et capacités spatiales, cybériennes et nucléaires.
Ces moyens ne peuvent assurer des victoires au sens classique du terme, mais elles ont prouvé leur rôle déstabilisateur et protecteur des intérêts iraniens au Moyen-Orient. Économiquement, l’Iran est en crise grave, mais pas en collapsus, néanmoins ses budgets militaires continuent à augmenter significativement. Tout ceci induit une perception de puissance régionale dominante, par contre la réalité est ailleurs. À titre d’exemple, la marine américaine intercepte des dizaines de navires transportant des armes iraniennes aux Houthis depuis cinq ans sans être inquiétée, elle en a même coulé le dernier il y a quelques jours. Israël est loin d’être annihilé, bien au contraire. Les milices iraniennes en Syrie n’arrivent pas à riposter contre les raids hebdomadaires de l’aviation israélienne qui les prend pour cible depuis plus de quatre ans. Enfin les capacités iraniennes de projection de forces propres en dehors de l’Iran restent très limitées.
Perception de régression américaine
Mondialement, les États-Unis, sont perçus en régression de puissance. Les raisons de cette perception résident dans l’inefficacité du DIME américain. Les diplomaties de Trump et de Biden, l’une musclée et l’autre complaisante, n’ont pas donné de résultats face à Téhéran, surtout dernièrement à Vienne. Le pouvoir informationnel du gouvernement américain, complexe et diversifié, comprenant Maison Blanche, diplomatie publique (réseaux sociaux, relations avec la société civile, ONGs …), porte-paroles des forces armées américaines, et médias, n’a pas réussi à rassurer les alliés de Washington dans la région, ni à attirer suffisamment de sympathisants. En effet, l’opinion publique régionale reste, soit hostile, soit suspicieuse, soit non confiante, soit froide vis-à-vis des Américains, elle est craint surtout que sa propre culture ne soit phagocytée par la «mondialisation».
Les États-Unis sont confrontés à plusieurs rivaux (Chine, Russie, Iran, Corée du Nord, Daëch et al-Qaëda), dont plusieurs sont présents au Liban et au Moyen-Orient, mais ils ne peuvent plus les affronter par la seule force militaire, écrasante et décisive certes, car ces acteurs étatiques et non étatiques évitent habilement depuis un certain temps, de susciter les réactions musclées de Washington, en agissant toujours à un niveau inférieur au seuil d'une réponse militaire coercitive des États-Unis. Les forces militaires américaines sont en guerre permanente depuis la disparition de l’URSS. Elles n’ont perdu aucune bataille depuis, sauf un engagement limité à Mogadiscio en 1993. Cependant, ces dizaines batailles gagnées ne leur ont pas assuré un succès stratégique, bien qu’en réalité les États-Unis restent la seule superpuissance et pour longtemps, économiquement, industriellement, technologiquement et militairement.
Au Liban, un gouffre entre réalité et perception
À l’échelle libanaise, il y a un gouffre entre perception et réalité. Ceux qui œuvrent sciemment ou inconsciemment à détruire le Liban de 1920, profitent de la perception démesurée de la puissance iranienne, jouent sur la perception du public et ses émotions, cultivent des idées salvatrices mensongères messianiques alignées avec Téhéran, ou jouent la comédie de la discorde avec le duo armé Hezbollah-Amal. D’autres prêchent des idées partitionnistes suicidaires, alors que le potentiel de résistance est réel à tous les niveaux : légal, légitime, institutionnel, populaire et militaire. Par contre, les souverainistes se font la concurrence à outrance, ne voyant pas que le Liban est en péril, aveuglés par la lutte pour le pouvoir comme si nous avions le même luxe que les démocraties scandinaves. Ceci est non seulement une irresponsabilité, mais une honte.
En ces moments difficiles, les véritables hommes d’État essayent d’œuvrer avec diligence pour limiter l’écart entre la vérité et la perception, non pas pour accéder aux miettes du pouvoir, mais pour sauvegarder la patrie. Que vaut un parlement ou un ministère face à la menace d’une milice à allégeance iranienne? Que vaut un siège de député face à la mainmise manu militari sur le pays? Que valent les dissertations verbales face aux régiments de miliciens prêts à mourir pour leur idéologie? Le discernement entre perception et réalité est donc une nécessité, car elles ne sont jamais égales. Le silence aujourd’hui n’est pas d’or, mais complice à non-assistance à pays en danger, et les faits ne parlent pas d’eux-mêmes. On n’insiste jamais trop sur les principes de base des fondements du Liban, notamment la souveraineté, le vivre-ensemble et la suprématie du droit. Il ne suffit pas de les signaler discrètement par égard populiste, mais il faut les mettre en relief, car l’opinion publique désinformée a une mémoire fugace. L’étape actuelle nécessite de véritables hommes d’État, et non de candidats qui se bousculent pour frotter leur siège sur les fauteuils parlementaires.
Perception de suprématie iranienne
L’expansionnisme iranien est perçu comme gagnant. Cependant Téhéran est loin de remporter une victoire écrasante, encore moins de réaliser une paix avantageuse. L’Iran a réussi à créer de nouvelles règles du jeu face auxquelles Washington n’a pas adopté de stratégie réussie; en effet, les mollahs de Qom sont en train d’avancer leurs pions sans induire un conflit armé avec les États-Unis. Ils utilisent habilement leurs DIME, ou instruments stratégiques, notamment Diplomatie, Information, force Militaire et Economie. Leur diplomatie comporte un volet idéologique et émotionnel, et un autre rationnel basé sur la dissémination du modèle iranien dans tous les pays environnants.
Dans ce modèle, le vrai pouvoir est entre les mains de milices (Basij, Corps des Gardiens de la Révolution…), gérées elles-mêmes par l’establishment religieux, alors que l’État s’occupe des affaires courantes. Ce modèle est déjà en place en Irak (milices du hachd el-chaabi), en Syrie (Hezbollah-Syrie), au Liban (Hezbollah), et au Yémen (Houthis). Le pouvoir informationnel iranien a réussi à créer une perception de suprématie, à travers la multiplication des menaces d’annihilation d’Israël et de destruction de la flotte américaine. Ajoutés à cela, les assassinats ou tentatives d’assassinat de personnalités anti-iraniennes restent sans empreintes, mais sont significativement suggestifs. La force militaire iranienne est également médiatisée au décuple à travers des manœuvres militaires exagérant les capacités réelles; par contre elle dispose de moyens asymétriques: missiles, drones, et capacités spatiales, cybériennes et nucléaires.
Ces moyens ne peuvent assurer des victoires au sens classique du terme, mais elles ont prouvé leur rôle déstabilisateur et protecteur des intérêts iraniens au Moyen-Orient. Économiquement, l’Iran est en crise grave, mais pas en collapsus, néanmoins ses budgets militaires continuent à augmenter significativement. Tout ceci induit une perception de puissance régionale dominante, par contre la réalité est ailleurs. À titre d’exemple, la marine américaine intercepte des dizaines de navires transportant des armes iraniennes aux Houthis depuis cinq ans sans être inquiétée, elle en a même coulé le dernier il y a quelques jours. Israël est loin d’être annihilé, bien au contraire. Les milices iraniennes en Syrie n’arrivent pas à riposter contre les raids hebdomadaires de l’aviation israélienne qui les prend pour cible depuis plus de quatre ans. Enfin les capacités iraniennes de projection de forces propres en dehors de l’Iran restent très limitées.
Perception de régression américaine
Mondialement, les États-Unis, sont perçus en régression de puissance. Les raisons de cette perception résident dans l’inefficacité du DIME américain. Les diplomaties de Trump et de Biden, l’une musclée et l’autre complaisante, n’ont pas donné de résultats face à Téhéran, surtout dernièrement à Vienne. Le pouvoir informationnel du gouvernement américain, complexe et diversifié, comprenant Maison Blanche, diplomatie publique (réseaux sociaux, relations avec la société civile, ONGs …), porte-paroles des forces armées américaines, et médias, n’a pas réussi à rassurer les alliés de Washington dans la région, ni à attirer suffisamment de sympathisants. En effet, l’opinion publique régionale reste, soit hostile, soit suspicieuse, soit non confiante, soit froide vis-à-vis des Américains, elle est craint surtout que sa propre culture ne soit phagocytée par la «mondialisation».
Les États-Unis sont confrontés à plusieurs rivaux (Chine, Russie, Iran, Corée du Nord, Daëch et al-Qaëda), dont plusieurs sont présents au Liban et au Moyen-Orient, mais ils ne peuvent plus les affronter par la seule force militaire, écrasante et décisive certes, car ces acteurs étatiques et non étatiques évitent habilement depuis un certain temps, de susciter les réactions musclées de Washington, en agissant toujours à un niveau inférieur au seuil d'une réponse militaire coercitive des États-Unis. Les forces militaires américaines sont en guerre permanente depuis la disparition de l’URSS. Elles n’ont perdu aucune bataille depuis, sauf un engagement limité à Mogadiscio en 1993. Cependant, ces dizaines batailles gagnées ne leur ont pas assuré un succès stratégique, bien qu’en réalité les États-Unis restent la seule superpuissance et pour longtemps, économiquement, industriellement, technologiquement et militairement.
Au Liban, un gouffre entre réalité et perception
À l’échelle libanaise, il y a un gouffre entre perception et réalité. Ceux qui œuvrent sciemment ou inconsciemment à détruire le Liban de 1920, profitent de la perception démesurée de la puissance iranienne, jouent sur la perception du public et ses émotions, cultivent des idées salvatrices mensongères messianiques alignées avec Téhéran, ou jouent la comédie de la discorde avec le duo armé Hezbollah-Amal. D’autres prêchent des idées partitionnistes suicidaires, alors que le potentiel de résistance est réel à tous les niveaux : légal, légitime, institutionnel, populaire et militaire. Par contre, les souverainistes se font la concurrence à outrance, ne voyant pas que le Liban est en péril, aveuglés par la lutte pour le pouvoir comme si nous avions le même luxe que les démocraties scandinaves. Ceci est non seulement une irresponsabilité, mais une honte.
En ces moments difficiles, les véritables hommes d’État essayent d’œuvrer avec diligence pour limiter l’écart entre la vérité et la perception, non pas pour accéder aux miettes du pouvoir, mais pour sauvegarder la patrie. Que vaut un parlement ou un ministère face à la menace d’une milice à allégeance iranienne? Que vaut un siège de député face à la mainmise manu militari sur le pays? Que valent les dissertations verbales face aux régiments de miliciens prêts à mourir pour leur idéologie? Le discernement entre perception et réalité est donc une nécessité, car elles ne sont jamais égales. Le silence aujourd’hui n’est pas d’or, mais complice à non-assistance à pays en danger, et les faits ne parlent pas d’eux-mêmes. On n’insiste jamais trop sur les principes de base des fondements du Liban, notamment la souveraineté, le vivre-ensemble et la suprématie du droit. Il ne suffit pas de les signaler discrètement par égard populiste, mais il faut les mettre en relief, car l’opinion publique désinformée a une mémoire fugace. L’étape actuelle nécessite de véritables hommes d’État, et non de candidats qui se bousculent pour frotter leur siège sur les fauteuils parlementaires.
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