L’historien de Broadway Patrick Niedo définit ainsi la comédie musicale: «Pièce de théâtre en musique dont les chansons font avancer l’action, décrivent un agissement, ou dévoilent la psychologie, la pensée, la quête d’un personnage lors de soliloques ou 'monologues intérieurs'. Forme de théâtre combinant librement musique, chant, dialogue parlé et danse, la comédie musicale est un art total qui se caractérise par le fait que tous ses aspects (paroles, mouvements, musiques etc.) s’allient pour communiquer au spectateur aussi bien l’histoire elle-même que le contenu émotionnel.»
On ne peut parler de comédie musicale ou musical sans parler de Broadway. Si cet art se retrouve actuellement dans toutes les scènes mondiales, son histoire est très liée à celle de l’histoire scénique des États-Unis. Apparue au tout début du XXe siècle, la comédie musicale se situe dans la lignée de l'opéra, la comédie-ballet ou l'opéra-bouffe et l'opérette, avec une forte influence de genres américains. En effet, des genres se popularisent comme la variety (combinaisons de différents numéros indépendants) qui se développe dans les saloons, ou le vaudeville, avec un succès qui atteint son paroxysme dans les années 1920: au sortir de la Première Guerre mondiale, les productions de Broadway sont marquées par un optimisme lié à la période de croissance économique, sous les notes du jazz et plus tard des productions cinématographiques.
De la même façon que le chant transcende le prosaïsme des dialogues, la danse sublime les mouvements du corps en donnant plus d’impact à l’affect et à l’histoire. Citons par exemple La La Land (2016): la rencontre et le début de l’histoire d’amour entre les personnages principaux fait abstraction de dialogue pour être représenté par un sympathique duo de claquettes. Il faut cependant faire la différence entre la présence de la danse dans la comédie musicale du fait de l’histoire (par exemple: si les protagonistes sont dans un bal, ils dansent) et la danse en tant que mode d’expression à part entière, comme c’est le cas dans nombreuses comédies musicales telles que A Chorus Line (1975), 42nd Street (1980), Hamilton (2004) pour n’en citer que quelques-unes.
La danse dans les comédies musicales n’a de cesse d’évoluer, s’adaptant aux différentes époques, offrant à chaque fois une nouvelle possibilité de donner plus d’ampleur au spectacle. Ses différentes influences remontent déjà aux minstrels shows et black face, et plus tard aux claquettes. Puis, pendant longtemps, l'essentiel de la danse dans les comédies musicales américaines est laissé à des dames de l'ensemble, comme dans The Black Crook (1866), dans lequel Thomas Wheatley, directeur de théâtre à Broadway, a engagé une troupe de ballet parisienne. Les danses étaient surtout insérées à des fins plus esthétiques qu’autre chose. C’est avec John D’Auban, ancien danseur britannique, que les danses vont au-delà de ce rôle pour s’adapter aux personnages et aux intrigues au début du XIXe siècle. La place de la danse dans les comédies musicales continue de se préciser et d’être sculptée au gré des chorégraphes et des différents styles de danses.
George Balanchine, par exemple, grand nom du ballet (néo)classique, continue dans la lancée de Wheatley et porte la danse classique à un autre niveau: les séquences de danse servent à développer l’intrigue et sont véritablement tissées dans l’étoffe générale du musical, comme les tableaux «Ballet de la princesse Zenobia» et le «Ballet du massacre de la 10e Avenue» dans On Your Toes de Richard Rodger (1936).
Un autre grand nom de la danse en comédie musicale est la chorégraphe Agnes de Mille, notamment dans Oklahoma! de Rodgers et Hammerstein (1943). Si ce spectacle a ouvert une nouvelle ère pour le théâtre musical à bien des égards, l'une de ses innovations les plus influentes a été l'utilisation de la danse comme outil de narration, se joignant aux chansons et au livret, donnant au spectacle une nouvelle puissance.
D’autres chorégraphes témoignent également des tournants esthétiques du genre. C’est le cas de Jerome Robbins, convaincu du pouvoir de la danse à raconter des histoires. Metteur en scène et chorégraphe, son génie de la scène, sa capacité à faire vibrer les corps et l’histoire s’incarnent notamment dans Fiddler on the Roof (1964) et le fameux West Side Story (1957) d’Arthur Laurents avec la musique de Leonard Bernstein. Dans ce dernier par exemple, au cours de la scène de la soirée de danse dans la salle de sport, la haine entre les deux clans est illustrée dans une sorte de «dance off» où la rivalité entre les deux clans se traduit par d’impressionnants affrontements chorégraphiques et compétitions dansantes. Jerome Robbins approfondit le travail d’Agnes de Mille et fait de West Side Story un véritable spectacle chorégraphique où la danse a tout autant sa place que la musique ou le livret. Il inspire un autre grand nom de la comédie musicale: Bob Fosse. Issu de la danse classique, de l’acrobatie et des performances en boites de nuit, Fosse révolutionne les comédies musicales avec son style de danse particulier (notamment son utilisation fréquente d'accessoires, de mouvements caractéristiques et de pas provocants), préfère les intrigues plus sombres et plus introspectives, et les comédies musicales qu’il chorégraphie à Hollywood font désormais partie des chefs-d’œuvre du genre. Il crée les danses dans The Pajama Game (1956) et Damn Yankees (1957) pour George Abbott; en tant que réalisateur et chorégraphe, il a dirigé des films mémorables comme Sweet Charity (1968) et Chicago (1975).
La comédie musicale a également trouvé son succès hors des planches des théâtres, dans les films. Comment ne pas citer de grands noms comme Cyd Charisse, Ginger Rogers, Fred Astaire et Gene Kelly qui ont porté à l’écran l’énergie des musicals. C’est ici qu’un nouvel élément fait son apparition: la caméra. Jouant de gros plans, de plans éloignés et de rythme pour mettre en avant les expressions ou les ensembles, la caméra devient un nouvel outil de mise en valeur de la narration, des sentiments et de l’action. Dans le film Singing in the Rain (1952), au cours de la scène de la chanson éponyme interprétée par Gene Kelly, la caméra – encore tout de même timide – accompagne les déplacements du danseur et fait des gros plans sur le sourire du personnage de Don Lockwood. Et la danse, chorégraphie enjouée de claquettes, traduit bien la gaieté de Don, avec les gestes d’ouverture du buste et d’étirements des bras, les claquettes et l’interprétation joyeuse et joueuse du personnage.
La comédie musicale est une forme d’art en constante évolution. Disney adapte en musicals ses plus célèbres dessins animés (Beauty and the Beast, The Lion King…), des adaptations cinématographiques de comédies musicales continuent de fleurir (Chicago, The Phantom of the Opera, Nine), et des musicals basés sur des chansons issues d’albums d’artistes populaires sont créés (Jersey Boys, Mamma Mia!; We Will Rock You). Et la danse suit cette constante métamorphose, jouant de styles différents, d’énergies hétérogènes, d’imaginaires hétéroclites pour toujours marquer son public, le toucher, le faire rêver.
On ne peut parler de comédie musicale ou musical sans parler de Broadway. Si cet art se retrouve actuellement dans toutes les scènes mondiales, son histoire est très liée à celle de l’histoire scénique des États-Unis. Apparue au tout début du XXe siècle, la comédie musicale se situe dans la lignée de l'opéra, la comédie-ballet ou l'opéra-bouffe et l'opérette, avec une forte influence de genres américains. En effet, des genres se popularisent comme la variety (combinaisons de différents numéros indépendants) qui se développe dans les saloons, ou le vaudeville, avec un succès qui atteint son paroxysme dans les années 1920: au sortir de la Première Guerre mondiale, les productions de Broadway sont marquées par un optimisme lié à la période de croissance économique, sous les notes du jazz et plus tard des productions cinématographiques.
De la même façon que le chant transcende le prosaïsme des dialogues, la danse sublime les mouvements du corps en donnant plus d’impact à l’affect et à l’histoire. Citons par exemple La La Land (2016): la rencontre et le début de l’histoire d’amour entre les personnages principaux fait abstraction de dialogue pour être représenté par un sympathique duo de claquettes. Il faut cependant faire la différence entre la présence de la danse dans la comédie musicale du fait de l’histoire (par exemple: si les protagonistes sont dans un bal, ils dansent) et la danse en tant que mode d’expression à part entière, comme c’est le cas dans nombreuses comédies musicales telles que A Chorus Line (1975), 42nd Street (1980), Hamilton (2004) pour n’en citer que quelques-unes.
La danse dans les comédies musicales n’a de cesse d’évoluer, s’adaptant aux différentes époques, offrant à chaque fois une nouvelle possibilité de donner plus d’ampleur au spectacle. Ses différentes influences remontent déjà aux minstrels shows et black face, et plus tard aux claquettes. Puis, pendant longtemps, l'essentiel de la danse dans les comédies musicales américaines est laissé à des dames de l'ensemble, comme dans The Black Crook (1866), dans lequel Thomas Wheatley, directeur de théâtre à Broadway, a engagé une troupe de ballet parisienne. Les danses étaient surtout insérées à des fins plus esthétiques qu’autre chose. C’est avec John D’Auban, ancien danseur britannique, que les danses vont au-delà de ce rôle pour s’adapter aux personnages et aux intrigues au début du XIXe siècle. La place de la danse dans les comédies musicales continue de se préciser et d’être sculptée au gré des chorégraphes et des différents styles de danses.
George Balanchine, par exemple, grand nom du ballet (néo)classique, continue dans la lancée de Wheatley et porte la danse classique à un autre niveau: les séquences de danse servent à développer l’intrigue et sont véritablement tissées dans l’étoffe générale du musical, comme les tableaux «Ballet de la princesse Zenobia» et le «Ballet du massacre de la 10e Avenue» dans On Your Toes de Richard Rodger (1936).
Un autre grand nom de la danse en comédie musicale est la chorégraphe Agnes de Mille, notamment dans Oklahoma! de Rodgers et Hammerstein (1943). Si ce spectacle a ouvert une nouvelle ère pour le théâtre musical à bien des égards, l'une de ses innovations les plus influentes a été l'utilisation de la danse comme outil de narration, se joignant aux chansons et au livret, donnant au spectacle une nouvelle puissance.
D’autres chorégraphes témoignent également des tournants esthétiques du genre. C’est le cas de Jerome Robbins, convaincu du pouvoir de la danse à raconter des histoires. Metteur en scène et chorégraphe, son génie de la scène, sa capacité à faire vibrer les corps et l’histoire s’incarnent notamment dans Fiddler on the Roof (1964) et le fameux West Side Story (1957) d’Arthur Laurents avec la musique de Leonard Bernstein. Dans ce dernier par exemple, au cours de la scène de la soirée de danse dans la salle de sport, la haine entre les deux clans est illustrée dans une sorte de «dance off» où la rivalité entre les deux clans se traduit par d’impressionnants affrontements chorégraphiques et compétitions dansantes. Jerome Robbins approfondit le travail d’Agnes de Mille et fait de West Side Story un véritable spectacle chorégraphique où la danse a tout autant sa place que la musique ou le livret. Il inspire un autre grand nom de la comédie musicale: Bob Fosse. Issu de la danse classique, de l’acrobatie et des performances en boites de nuit, Fosse révolutionne les comédies musicales avec son style de danse particulier (notamment son utilisation fréquente d'accessoires, de mouvements caractéristiques et de pas provocants), préfère les intrigues plus sombres et plus introspectives, et les comédies musicales qu’il chorégraphie à Hollywood font désormais partie des chefs-d’œuvre du genre. Il crée les danses dans The Pajama Game (1956) et Damn Yankees (1957) pour George Abbott; en tant que réalisateur et chorégraphe, il a dirigé des films mémorables comme Sweet Charity (1968) et Chicago (1975).
La comédie musicale a également trouvé son succès hors des planches des théâtres, dans les films. Comment ne pas citer de grands noms comme Cyd Charisse, Ginger Rogers, Fred Astaire et Gene Kelly qui ont porté à l’écran l’énergie des musicals. C’est ici qu’un nouvel élément fait son apparition: la caméra. Jouant de gros plans, de plans éloignés et de rythme pour mettre en avant les expressions ou les ensembles, la caméra devient un nouvel outil de mise en valeur de la narration, des sentiments et de l’action. Dans le film Singing in the Rain (1952), au cours de la scène de la chanson éponyme interprétée par Gene Kelly, la caméra – encore tout de même timide – accompagne les déplacements du danseur et fait des gros plans sur le sourire du personnage de Don Lockwood. Et la danse, chorégraphie enjouée de claquettes, traduit bien la gaieté de Don, avec les gestes d’ouverture du buste et d’étirements des bras, les claquettes et l’interprétation joyeuse et joueuse du personnage.
La comédie musicale est une forme d’art en constante évolution. Disney adapte en musicals ses plus célèbres dessins animés (Beauty and the Beast, The Lion King…), des adaptations cinématographiques de comédies musicales continuent de fleurir (Chicago, The Phantom of the Opera, Nine), et des musicals basés sur des chansons issues d’albums d’artistes populaires sont créés (Jersey Boys, Mamma Mia!; We Will Rock You). Et la danse suit cette constante métamorphose, jouant de styles différents, d’énergies hétérogènes, d’imaginaires hétéroclites pour toujours marquer son public, le toucher, le faire rêver.
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