Le portrait du poète André Breton (1896-1966), signé Max Ernst (1891-1976) et Marie-Berthe Aurenche (1906-1960), sera mis aux enchères le 29 mars 2023 par la maison Bonhams Cornette de Saint-Cyr à Paris dans le cadre de la vente «La révolution surréaliste».
Le peintre et sculpteur Max Ernst, dont l'œuvre se rattache aux mouvements dadaïste et surréaliste, avait épousé Marie-Berthe Aurenche en deuxièmes noces, elle-même peintre. Ils s’étaient rencontrés fin 1927 et mariés peu de temps après. Ils seront photographiés par Man Ray, se mêlant au groupe des surréalistes. On sait aussi, par exemple, que tous deux participent en 1930 au casting du film surréaliste L’âge d'or de Luis Buñuel. Ernst et Aurenche divorceront en 1936. Marie-Berthe deviendra l'amante du peintre Chaïm Soutine en 1940. Russe émigré en France, Chaïm Soutine (1893-1943) est l'un des peintres rattachés habituellement, avec Chagall ou Modigliani, à ce qu'il est convenu d'appeler l'École de Paris. On ne sait plus grand-chose de Marie-Berthe si ce n’est qu’elle aurait souffert de délires. Décédée en 1960 à l'âge de 54 ans, Marie-Berthe Aurenche aurait demandé à être inhumée dans la même tombe que Soutine.
Mais revenons au tableau, une huile sur toile de 1930 estimée entre 400.000 et 600.000 €, représentant celui qu’on appelait le «pape du surréalisme» assis derrière son bureau, dans une atmosphère onirique.
Auteur de Nadja, de L'Amour fou et des deux Manifestes du surréalisme, André Breton fut effectivement le chef de file de ce mouvement né à Paris en 1924, date à laquelle il publie le premier Manifeste. L’écrivain y consignera les résultats de son exploration des rêves, de l'irrationnel, de l’inconscient. Le courant attire un grand nombre de poètes et d’artistes, parmi lesquels Paul Éluard, Robert Desnos, Tristan Tzara, Louis Aragon, Max Ernst et Salvador Dalí, rejoints par des photographes comme Man Ray et Dora Maar.
Lorsqu’il fut exposé une première fois en 1933 à la galerie Pierre Colle, le tableau figurait dans le catalogue sous le nom de Marie-Berthe Ernst, bien qu’il apparût sous la signature du couple. Breton lui-même qui, dit-on, n’aimait pas beaucoup celle qui était, à cette époque, l’épouse de son ami Max Ernst, lui a étonnamment attribué l'œuvre dans le numéro de mai 1933 de son périodique Le surréalisme au service de la révolution. À peine cinq ans plus tard, Marie-Berthe devait être complètement rayée de l'histoire de l'œuvre qui fut alors attribuée à Ernst seul. Aussi «Portrait d’André Breton» apparait-il dans des publications des années 1950 sous la seule signature de ce dernier. En 1960 enfin, Breton désigne le tableau comme une œuvre exécutée à deux.
Emilie Millon, responsable du département d'art impressionniste et moderne de Bonhams à Paris, voit donc également dans la vente de ce tableau qui a tant fait la controverse, l’occasion de revenir sur le rôle des femmes au sein du mouvement surréaliste où elles furent longtemps bien plus reconnues comme des égéries que des artistes à part entière. Max Ernst lui-même avait développé un certain nombre de relations passionnées avec des femmes talentueuses, dont Leonora Carrington et Dorothea Tanning, mais la plus négligée par l’histoire aura sans doute été Marie-Berthe Aurenche.
Après les résultats exceptionnels des ventes de 2021 et 2022 consacrées, à Londres, au surréalisme, la maison Bonhams Cornette de Saint-Cyr présentera «La révolution surréaliste» dans la ville qui fut le berceau du mouvement, à Paris, reprenant le titre de la célèbre revue de ce dernier. Fondée en 1924 à Paris par André Breton lui-même, avec Louis Aragon, Pierre Naville et Benjamin Péret, La Révolution surréaliste est pendant cinq années le creuset dans lequel vont se développer les grands thèmes de ce mouvement. 12 numéros contenant notamment des récits de rêves de Breton, Raymond Queneau et Michel Leiris seront publiés entre le 1er décembre 1924 et le 15 décembre 1929.
La vente réunira des peintures, des œuvres sur papier, des sculptures, du design, de la photographie et des ouvrages des principaux protagonistes du surréalisme. On y verra ainsi des œuvres de Salvador Dali, Valentine Hugo, René Magritte, Frida Kahlo et Dora Maar. Elle sera effectuée par la maison internationale Bonhams fondée à Londres en 1793 et qui, en 2022, acquiert Cornette de Saint Cyr, une maison familiale française installée à Paris et Bruxelles, notamment axée sur l'art contemporain et le design. La nouvelle entité, présidée par Arnaud Cornette de Saint Cyr, et qui se nomme désormais Bonhams Cornette de Saint Cyr, fait de l'hôtel particulier de l'avenue Hoche son principal lieu parisien. Les deux maisons, certes, n’ont pas le même poids: Bonhams possède désormais 14 salles de vente dans le monde contre Cornette de Saint Cyr qui en a 2, à Paris et Bruxelles. Bonhams a vendu pour 800 M$ en 2021, tandis que Cornette de Saint Cyr affiche un produit vendu de 35 M€. Ce qu’elles ont en commun? Leur ancrage dans une tradition familiale, un très bon réseau de collectionneurs et… l’intérêt pour le numérique. Les deux équipes seront réunies avenue Hoche, dans l’immense hôtel particulier auparavant occupé par Cornette de Saint Cyr.
Cette acquisition s’inscrit dans une large stratégie d’expansion de Bonhams, qui se veut une «world local auction house», autrement dit une maison de vente locale implantée dans le monde entier. Devenir plus global était, par ailleurs, le souhait de la maison fondée en 1973 par Pierre Cornette de Saint-Cyr, marchand d'art et commissaire-priseur français, que rejoindront ses deux fils, Bertrand et Arnaud.
Parmi les grands moments de cette vente, citons notamment:
Un Masque jaune de 1930 de Léon Arthur Tutundjian (1906-1968) estimé à 120.000-180.000 €. L'artiste arménien émigre en 1923 à Paris où il se lie d'amitié avec son compatriote Ervand Kochar qui lui présente Miró, Picasso et Mondrian. L'œuvre proposée date de la période surréaliste de Tutundjian lorsque, inspiré par les œuvres de René Magritte et de Salvador Dalí, l'artiste a développé ses propres métaphores visuelles imprégnées d’influences indiennes et persanes. Bien qu'il ne soit jamais devenu membre officiel du groupe surréaliste, l'artiste a été étroitement associé à André Breton et a exposé avec les surréalistes tout au long des années 1940 et 1950.
Le Trait de Lumière, de Jane Graverol (1905-1984), une peinture de 1959 estimée à 35.000-55.000 €.
Rosa e morte floriscens, une gravure de Salvador Dalí (1904-1989), exécutée en 1967 et estimée à 40.000-60.000 €.
Une Étude pour le centurion marsupial, exécutée en 1941 par Salvator Dali (1904-1989) et estimée à 15.000-20.000 €.
La bonne route, une huile sur toile marouflée sur masonite peinte par Man Ray (1890-1976) en 1953, faisant partie de la collection de son célèbre modèle, Jacqueline Barsotti-Goddard, estimée à 8.000-12.000 €.
Le peintre et sculpteur Max Ernst, dont l'œuvre se rattache aux mouvements dadaïste et surréaliste, avait épousé Marie-Berthe Aurenche en deuxièmes noces, elle-même peintre. Ils s’étaient rencontrés fin 1927 et mariés peu de temps après. Ils seront photographiés par Man Ray, se mêlant au groupe des surréalistes. On sait aussi, par exemple, que tous deux participent en 1930 au casting du film surréaliste L’âge d'or de Luis Buñuel. Ernst et Aurenche divorceront en 1936. Marie-Berthe deviendra l'amante du peintre Chaïm Soutine en 1940. Russe émigré en France, Chaïm Soutine (1893-1943) est l'un des peintres rattachés habituellement, avec Chagall ou Modigliani, à ce qu'il est convenu d'appeler l'École de Paris. On ne sait plus grand-chose de Marie-Berthe si ce n’est qu’elle aurait souffert de délires. Décédée en 1960 à l'âge de 54 ans, Marie-Berthe Aurenche aurait demandé à être inhumée dans la même tombe que Soutine.
Mais revenons au tableau, une huile sur toile de 1930 estimée entre 400.000 et 600.000 €, représentant celui qu’on appelait le «pape du surréalisme» assis derrière son bureau, dans une atmosphère onirique.
Auteur de Nadja, de L'Amour fou et des deux Manifestes du surréalisme, André Breton fut effectivement le chef de file de ce mouvement né à Paris en 1924, date à laquelle il publie le premier Manifeste. L’écrivain y consignera les résultats de son exploration des rêves, de l'irrationnel, de l’inconscient. Le courant attire un grand nombre de poètes et d’artistes, parmi lesquels Paul Éluard, Robert Desnos, Tristan Tzara, Louis Aragon, Max Ernst et Salvador Dalí, rejoints par des photographes comme Man Ray et Dora Maar.
Lorsqu’il fut exposé une première fois en 1933 à la galerie Pierre Colle, le tableau figurait dans le catalogue sous le nom de Marie-Berthe Ernst, bien qu’il apparût sous la signature du couple. Breton lui-même qui, dit-on, n’aimait pas beaucoup celle qui était, à cette époque, l’épouse de son ami Max Ernst, lui a étonnamment attribué l'œuvre dans le numéro de mai 1933 de son périodique Le surréalisme au service de la révolution. À peine cinq ans plus tard, Marie-Berthe devait être complètement rayée de l'histoire de l'œuvre qui fut alors attribuée à Ernst seul. Aussi «Portrait d’André Breton» apparait-il dans des publications des années 1950 sous la seule signature de ce dernier. En 1960 enfin, Breton désigne le tableau comme une œuvre exécutée à deux.
Emilie Millon, responsable du département d'art impressionniste et moderne de Bonhams à Paris, voit donc également dans la vente de ce tableau qui a tant fait la controverse, l’occasion de revenir sur le rôle des femmes au sein du mouvement surréaliste où elles furent longtemps bien plus reconnues comme des égéries que des artistes à part entière. Max Ernst lui-même avait développé un certain nombre de relations passionnées avec des femmes talentueuses, dont Leonora Carrington et Dorothea Tanning, mais la plus négligée par l’histoire aura sans doute été Marie-Berthe Aurenche.
Après les résultats exceptionnels des ventes de 2021 et 2022 consacrées, à Londres, au surréalisme, la maison Bonhams Cornette de Saint-Cyr présentera «La révolution surréaliste» dans la ville qui fut le berceau du mouvement, à Paris, reprenant le titre de la célèbre revue de ce dernier. Fondée en 1924 à Paris par André Breton lui-même, avec Louis Aragon, Pierre Naville et Benjamin Péret, La Révolution surréaliste est pendant cinq années le creuset dans lequel vont se développer les grands thèmes de ce mouvement. 12 numéros contenant notamment des récits de rêves de Breton, Raymond Queneau et Michel Leiris seront publiés entre le 1er décembre 1924 et le 15 décembre 1929.
La vente réunira des peintures, des œuvres sur papier, des sculptures, du design, de la photographie et des ouvrages des principaux protagonistes du surréalisme. On y verra ainsi des œuvres de Salvador Dali, Valentine Hugo, René Magritte, Frida Kahlo et Dora Maar. Elle sera effectuée par la maison internationale Bonhams fondée à Londres en 1793 et qui, en 2022, acquiert Cornette de Saint Cyr, une maison familiale française installée à Paris et Bruxelles, notamment axée sur l'art contemporain et le design. La nouvelle entité, présidée par Arnaud Cornette de Saint Cyr, et qui se nomme désormais Bonhams Cornette de Saint Cyr, fait de l'hôtel particulier de l'avenue Hoche son principal lieu parisien. Les deux maisons, certes, n’ont pas le même poids: Bonhams possède désormais 14 salles de vente dans le monde contre Cornette de Saint Cyr qui en a 2, à Paris et Bruxelles. Bonhams a vendu pour 800 M$ en 2021, tandis que Cornette de Saint Cyr affiche un produit vendu de 35 M€. Ce qu’elles ont en commun? Leur ancrage dans une tradition familiale, un très bon réseau de collectionneurs et… l’intérêt pour le numérique. Les deux équipes seront réunies avenue Hoche, dans l’immense hôtel particulier auparavant occupé par Cornette de Saint Cyr.
Cette acquisition s’inscrit dans une large stratégie d’expansion de Bonhams, qui se veut une «world local auction house», autrement dit une maison de vente locale implantée dans le monde entier. Devenir plus global était, par ailleurs, le souhait de la maison fondée en 1973 par Pierre Cornette de Saint-Cyr, marchand d'art et commissaire-priseur français, que rejoindront ses deux fils, Bertrand et Arnaud.
Parmi les grands moments de cette vente, citons notamment:
Un Masque jaune de 1930 de Léon Arthur Tutundjian (1906-1968) estimé à 120.000-180.000 €. L'artiste arménien émigre en 1923 à Paris où il se lie d'amitié avec son compatriote Ervand Kochar qui lui présente Miró, Picasso et Mondrian. L'œuvre proposée date de la période surréaliste de Tutundjian lorsque, inspiré par les œuvres de René Magritte et de Salvador Dalí, l'artiste a développé ses propres métaphores visuelles imprégnées d’influences indiennes et persanes. Bien qu'il ne soit jamais devenu membre officiel du groupe surréaliste, l'artiste a été étroitement associé à André Breton et a exposé avec les surréalistes tout au long des années 1940 et 1950.
Le Trait de Lumière, de Jane Graverol (1905-1984), une peinture de 1959 estimée à 35.000-55.000 €.
Rosa e morte floriscens, une gravure de Salvador Dalí (1904-1989), exécutée en 1967 et estimée à 40.000-60.000 €.
Une Étude pour le centurion marsupial, exécutée en 1941 par Salvator Dali (1904-1989) et estimée à 15.000-20.000 €.
La bonne route, une huile sur toile marouflée sur masonite peinte par Man Ray (1890-1976) en 1953, faisant partie de la collection de son célèbre modèle, Jacqueline Barsotti-Goddard, estimée à 8.000-12.000 €.
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