Lettres à Beyrouth, juste après - (36) Les endroits...
Les mêmes. Les nôtres.
Ceux que l’on ne s’approprie pas.
Ceux qui sont pour tout le monde. Ou à personne !
Les endroits qui se remplissent à vue d’œil. En un clin d’œil. (vue de la petite place -ou autres perspectives muettes-).
Ceux qui connaissent le souffle du vent et de nos pensées les plus intimes.
Ceux qui nous enlèvent loin d’ici, dans un bleu nuit masqué, libre, illimité.
Ceux qui nous redonnent tous nos trésors perdus, tous nos autres endroits désertés, en grains de poussière éparpillés.
Ceux qui nous immergent dans leur tout, si fort, qu’à plein poumons, nous suffoquons de respirer.
Ceux qui nous renvoient notre image dans un mirage.
Ceux qui habitent tout ce qui coule dans nos veines.
Ceux qui savent le fin fond de nos mécanismes de défense ou de rire.
Ceux qui nous déchiffrent dans un tourbillon.
Ceux qui sont infinis dans nos finitudes.
Ceux qui nous effleurent du bout de leur écume.
Ceux qui lisent en nous comme une mer.
Ceux qui nous connaissent comme une feuille de brouillon.
Ceux qui croient en nos feuilles blanches, malgré tous nos malgrés.
Ceux qui nous sourient tous les soirs, avec le tout dernier coucher de soleil.
Ceux qui ne manquent jamais au rendez-vous.

Ceux qui, ponctuels, à la même heure, nous reviennent de loin.
Ceux qui nous regardent parfois partir sans nous retenir.
Ceux qui calment nos petits cœurs gros à taille d’océan.
Ceux qui nous répondent toujours du même timbre, du même écho, du même roulis, de la même voix.
Ceux dont le silence nous fascine.
Ceux dont les mots nous façonnent.
Ceux qui connaissent nos demi-pointes et nos grands pas (pas aussi grands que ça).
Ceux qui ne se vident jamais.
Ceux qui nous renouvellent.
Ceux que nous retrouvons toujours, toujours, toujours là.
Ceux qui sont refuge et escapade à la fois... notre seule foi.
Ceux qui écoutent.
Ceux qui restent. Les fidèles. Les généreux.
Ceux qui persistent à voir du bout du cœur, par tous les temps, malgré le temps vorace, malgré les rapaces.
Ceux qui, sans trop serrer, étreignent dans un balancé, nos seuls espaces.
Ceux qui tiennent tête aux courants, et perçoivent encore nos traces...
Ceux qui nous la gardent précieusement, obstinément, comme un serment... indélébile, la petite place.
Et puis le port.
Beyrouth.
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