Une psychanalyse est une rencontre d’amour
Conduire un sujet à ne plus souffrir, à éviter de faire souffrir et à chérir son unicité: c’est ainsi que la psychanalyse guérit. Dépression, angoisse, anxiétés et peurs, désespoir, sentiment de non-sens, perte de confiance, insécurité, culpabilité, deuil, mal d’amour, troubles affectant directement le corps (anorexie, impuissance ou disparition du désir sexuel, manifestations physiques de l’angoisse…), tous ces symptômes mutent dans une psychanalyse, qui permet au sujet de vivre soulagé des souffrances dont aucun autre moyen n’a pu, durablement, le débarrasser.

Le parcours d’une psychanalyse est, je l’ai dit, une route orientée, essentiellement par le désir, mais aussi une route guidée par la conduite de la cure. Le savoir du psychanalyste qui assure cette conduite est un savoir-entendre l’inconscient, de sorte à ne pas manquer, dans le discours du patient, l’apparition toujours fugitive de la parole essentielle, nouvelle ou insolite, dont se saisira, en une prise décisive, son interprétation. «Le lion ne bondit qu’une fois», a dit Freud.

Dès lors, la psychanalyse se distingue d’être, pour le patient comme pour le psychanalyste, une expérience de l’événementiel, un art de la surprise. Si elle s’intéresse au passé, c’est pour en faire émerger le «jamais-dit» ou le «jamais-entendu-ainsi». De bond de sens en bond de sens, une psychanalyse amène chacun à «devenir ce qu’il est», ou, plus fondamentalement encore, à devenir tout court. Quand cela s’est produit et que le patient l’éprouve pleinement dans sa vie, c'est que la magie de la parole analytique a opéré.

Activer la magie de cette parole, inédite en ce qu’elle touche à la vérité et au réel de chaque existence humaine, c’est oser faire le pari de «scilicet  tu peux savoir». La psychanalyse est une décision d’en passer par le sens, pour mettre fin à ses souffrances et transformer une destinée subie en vie éclairée. «Mieux vaut allumer une bougie que maudire les ténèbres», écrit Lao Tseu.

J’ai eu, à 21 ans, la chance de rencontrer la psychanalyse. Un jour de souffrance parmi d’autres, le sourire de Sylvie H. m’a ouvert la porte – celle de son cabinet, d’une psychanalyse, puis de ma vie. «C’est le devoir de chaque homme de rendre au monde au moins autant qu’il a reçu», disait Albert Einstein. La décision de devenir moi-même psychanalyste après plus d’une décennie de cure, les années d’études et de recherche qui ont suivi, le choix de mes référents*, le travail quotidien avec les patients, sont autant de formes qu’a prises ensuite ma rencontre, toujours renouvelée, avec la psychanalyse. Pour autant, c’est dans l’apparition – inespérée – de l’amour du psychanalyste que la force de l’événement s’est produite et a changé le cours des choses.

Une psychanalyse est une rencontre d’amour. Être accueilli, entendu et relié, c’est d’abord cela qui sauve: pouvoir donner sa confiance à au moins un être humain, s’en remettre à une voix, faite à la fois de celle du psychanalyste et de la sienne propre, présence réelle et vivante à laquelle s’accrochera, comme à une étoile, toute la trajectoire de la cure.


Ce qui, entre toutes les pratiques thérapeutiques, singularise la psychanalyse, c'est l’union d’une efficacité sans pareille et d’un lumineux accomplissement pour l’être humain. Non seulement le sujet peut guérir, mais il peut découvrir ce qu’il vient vraiment demander pour sa vie.

En cela, la psychanalyse a la beauté d’une prière libre.

Sabine Callegari
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*Je tiens à citer Pierre Bruno, psychanalyste, et son dernier livre, Une psychanalyse: du rébus au rébut, Erès, 2013. Ce livre qui élabore, point essentiel par point essentiel, ce qu’est une cure. Il s’inscrit dans une œuvre qui apporte sa pierre, selon moi inestimable, à l’orientation éthique et à la recherche vitalisant la psychanalyse contemporaine. Je tiens aussi à rendre un hommage appuyé à Guy Trobas, psychanalyste, dont la transmission et la présence m’ont été précieuses.
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