Les sculptures de Rodin sont une extension de son vécu tumultueux. Enfin reconnu comme un des sculpteurs les plus influents, il est invité par un groupe d’artistes tchèques, en 1902, à Prague et en Moravie où il est reçu en grande pompe. Il est alors âgé de 61 ans. Retour sur ce voyage à travers une exposition à Brno.
Auguste Rodin, né le 12 novembre 1840 à Paris et décédé le 17 novembre 1917 à Meudon, est considéré comme l’un des pères de la sculpture moderne. Imprégné d'humanisme, son art réaliste est également un mélange de romantisme et d’impressionnisme.
À Brno, en hommage au sculpteur, des photographies d'époque et des archives de presse exposées jusqu'en septembre 2023 dans la deuxième ville tchèque permettent de redécouvrir ce séjour d'une semaine à Prague et dans l'est du pays, riche en folklore local. En mal avec la majorité allemande de l'Autriche-Hongrie de l'époque, un groupe d'artistes tchèques avait décidé d'organiser à Prague la plus grande exposition de l'un des plus grands artistes vivants. Faire venir cet artiste célèbre dans le monde entier est aussi pour ces jeunes patriotes une manière de révéler la culture locale et la scène artistique pragoise hors des frontières de l'Autriche-Hongrie.
«La France était toujours sous les feux de la rampe en tant que société la plus avancée du point de vue culturel et social», explique Hana Dvorakova, coautrice de l'exposition de Brno. La Bohême, la Moravie et la Slovaquie font partie de l'Autriche-Hongrie jusqu'en 1918, année où la Tchécoslovaquie devient un État indépendant. Le pays se divise en République tchèque et en Slovaquie en 1993.
Compagnon de Rose Beuret et passionné de Camille Claudel, sculpteuse, élève et muse, Auguste Rodin était connu pour ses relations fulgurantes. Il entretient à l'époque une liaison avec une jeune aristocrate polonaise, Sophie Postolska (1868-1942), l'une de ses élèves. Il arrive donc à Prague en train le 28 mai 1902. Le lendemain, il est accueilli par une foule enthousiaste et des conseillers municipaux à l'ancien Hôtel de ville de Prague, il déjeune avec un magnat local, se rend dans un nouveau musée et effectue une visite touristique de Prague.
Sur les pas de Rodin
«Il était incroyablement suivi par les journalistes, les paparazzi de l'époque», comme une star de cinéma pourrait l'être aujourd'hui, explique Mme Dvorakova. «Rodin lui-même fut surpris, car les faits montrent qu'il était timide et que, soudainement, il fut traité comme un homme politique de premier plan», déclare-t-elle à l'AFP. «Quand la foule devant son hôtel s'est mise à scander 'vive la France', 'vive Rodin', il s'est senti déstabilisé», ajoute-t-elle.
Rodin se rend à l'Académie des Beaux-Arts et dans plusieurs ateliers privés, visite sa propre exposition, assiste à un banquet, va à l'opéra et enfin à une fête, après laquelle il doit annuler le programme du lendemain. Après cinq jours à Prague, il se rend en Moravie où il est à nouveau accueilli par une foule nombreuse à la gare. Un orchestre d'usine locale joue la Marseillaise pour lui. «La femme d'un député lui a tendu la main et il l'a serrée, ce qui fut une erreur car il aurait dû alors serrer la main à tout le groupe de 100 à 200 personnes», raconte Mme Dvorakova.
Il y danse aussi
Rodin est ensuite emmené au fond d'une doline profonde de 138,5 mètres, où il pique-nique avec les peintres Alphons Mucha et Zdenka Braunerova, tous deux liés à Paris. Il termine son voyage dans un village isolé en compagnie du peintre folklorique morave Joza Uprka, en se régalant du vin de sa cave. Il y danse avec Mme Braunerova et est photographié en train de danser seul sur un air folklorique, le visage joyeux.
«Prague s'est fait remarquer sur la carte culturelle mondiale, et c'était l'objectif» de l'invitation adressée à Rodin, indique Mme Dvorakova pour résumer la visite, très coûteuse en raison de l'ampleur de la logistique. L'association Manes, qui a organisé le voyage, a mis des dizaines d'années pour en payer la facture.
Marie-Christine Tayah avec AFP
Instagram:
Auguste Rodin, né le 12 novembre 1840 à Paris et décédé le 17 novembre 1917 à Meudon, est considéré comme l’un des pères de la sculpture moderne. Imprégné d'humanisme, son art réaliste est également un mélange de romantisme et d’impressionnisme.
À Brno, en hommage au sculpteur, des photographies d'époque et des archives de presse exposées jusqu'en septembre 2023 dans la deuxième ville tchèque permettent de redécouvrir ce séjour d'une semaine à Prague et dans l'est du pays, riche en folklore local. En mal avec la majorité allemande de l'Autriche-Hongrie de l'époque, un groupe d'artistes tchèques avait décidé d'organiser à Prague la plus grande exposition de l'un des plus grands artistes vivants. Faire venir cet artiste célèbre dans le monde entier est aussi pour ces jeunes patriotes une manière de révéler la culture locale et la scène artistique pragoise hors des frontières de l'Autriche-Hongrie.
«La France était toujours sous les feux de la rampe en tant que société la plus avancée du point de vue culturel et social», explique Hana Dvorakova, coautrice de l'exposition de Brno. La Bohême, la Moravie et la Slovaquie font partie de l'Autriche-Hongrie jusqu'en 1918, année où la Tchécoslovaquie devient un État indépendant. Le pays se divise en République tchèque et en Slovaquie en 1993.
Compagnon de Rose Beuret et passionné de Camille Claudel, sculpteuse, élève et muse, Auguste Rodin était connu pour ses relations fulgurantes. Il entretient à l'époque une liaison avec une jeune aristocrate polonaise, Sophie Postolska (1868-1942), l'une de ses élèves. Il arrive donc à Prague en train le 28 mai 1902. Le lendemain, il est accueilli par une foule enthousiaste et des conseillers municipaux à l'ancien Hôtel de ville de Prague, il déjeune avec un magnat local, se rend dans un nouveau musée et effectue une visite touristique de Prague.
Sur les pas de Rodin
«Il était incroyablement suivi par les journalistes, les paparazzi de l'époque», comme une star de cinéma pourrait l'être aujourd'hui, explique Mme Dvorakova. «Rodin lui-même fut surpris, car les faits montrent qu'il était timide et que, soudainement, il fut traité comme un homme politique de premier plan», déclare-t-elle à l'AFP. «Quand la foule devant son hôtel s'est mise à scander 'vive la France', 'vive Rodin', il s'est senti déstabilisé», ajoute-t-elle.
Rodin se rend à l'Académie des Beaux-Arts et dans plusieurs ateliers privés, visite sa propre exposition, assiste à un banquet, va à l'opéra et enfin à une fête, après laquelle il doit annuler le programme du lendemain. Après cinq jours à Prague, il se rend en Moravie où il est à nouveau accueilli par une foule nombreuse à la gare. Un orchestre d'usine locale joue la Marseillaise pour lui. «La femme d'un député lui a tendu la main et il l'a serrée, ce qui fut une erreur car il aurait dû alors serrer la main à tout le groupe de 100 à 200 personnes», raconte Mme Dvorakova.
Il y danse aussi
Rodin est ensuite emmené au fond d'une doline profonde de 138,5 mètres, où il pique-nique avec les peintres Alphons Mucha et Zdenka Braunerova, tous deux liés à Paris. Il termine son voyage dans un village isolé en compagnie du peintre folklorique morave Joza Uprka, en se régalant du vin de sa cave. Il y danse avec Mme Braunerova et est photographié en train de danser seul sur un air folklorique, le visage joyeux.
«Prague s'est fait remarquer sur la carte culturelle mondiale, et c'était l'objectif» de l'invitation adressée à Rodin, indique Mme Dvorakova pour résumer la visite, très coûteuse en raison de l'ampleur de la logistique. L'association Manes, qui a organisé le voyage, a mis des dizaines d'années pour en payer la facture.
Marie-Christine Tayah avec AFP
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