Portrait : Igor Bogdanoff, jumeau parfait de Grichka, jusque dans la mort
©Igor Bogdanoff en 2018, à Paris, lors du défilé "Freak Show" de Jean-Paul Gaultier. (Photo by LUCAS BARIOULET / AFP)
Igor Bogdanoff, jumeau parfait de Grichka, est mort six jours après lui, mettant fin à la saga de ces stars "intergalactiques", révélées par leur émission télé d'anticipation dans les années 1980 avant d'être mises en cause notamment sur la crédibilité de leurs travaux scientifiques.

Tous deux étaient hospitalisés depuis décembre. Si des proches de Grichka se sont refusés jusqu'ici à révéler les causes de son décès, d'autres avaient assuré qu'il n'était pas vacciné et qu'il était mort du Covid-19. La famille d'Igor a indiqué pour sa part qu'il était "parti vers la lumière".

Moqués par les humoristes, les frères surprenaient ces dernières années par la transformation de leur aspect physique, notamment au niveau du menton. "Nous revendiquons d'avoir une gueule d'extraterrestres", affirmaient-ils en 2010, sans autres détails.

Peu de choses distinguaient, en apparence, Igor de son jumeau Grichka, si ce n'est des joues plus rebondies pour le premier et une silhouette plus longiligne pour le second.

Dans leur vie privée, là où Grichka était resté célibataire et sans enfants, Igor en avait eu six, de plusieurs unions.

Ils partageaient en tout cas la conviction affichée d'une supériorité intellectuelle. "A 11 ans, nous avons passé des tests qui nous ont appris que nous faisons partie des 0,01% de la population ayant un quotient intellectuel supérieur à 190", avait affirmé Grichka.

"Le cas est rare mais nous sommes investis de tous les avantages des jumeaux - une résonance physique, intellectuelle et morale - sans l'inconvénient majeur que l'un installe son gouvernement sur l'autre", ajoutait-il.

Leur origine a longtemps été nimbée d'un mystère soigneusement cultivé. Nés dans le village de Saint-Lary (Gers) le 29 août 1949, leur père serait un artiste peintre russe d'origine tatare, leur mère la fille naturelle d'une aristocrate autrichienne.

Ils sont élevés par des précepteurs au milieu des 15.000 ouvrages en français, russe, anglais ou allemand de la bibliothèque familiale.

Les extraterrestres et deux thèses


Les jumeaux doivent leur notoriété à "Temps X", une émission d'anticipation qui courra sur TF1 de 1979 jusqu'en 1987. Evoluant dans un décor de vaisseau spatial avec leurs combinaisons futuristes, leur léger accent russe et leur regard au laser, ils parlent du train du futur, d'intelligence artificielle, d'astronomie ou d'OVNIS. Et conquièrent de nombreux spectateurs, enfants et adolescents pour beaucoup - ce qui explique leur notoriété actuelle auprès des quadra et des quinquagénaires.

Tout le monde n'est pas fan, loin s'en faut. Le magazine L'Express ironise en 1985 sur "ces clones de cirque qui ont inventé le look sanisette, asexué".

Quant ils abandonnent leur émission, c'est pour écrire des ouvrages de vulgarisation (sous le nom de Bogdanov depuis le début des années 1990) comme "Dieu et la science", entretien avec le philosophe Jean Guitton (1991). Ce qui leur vaut une accusation de plagiat par l'astrophysicien américain Trinh Xuan Thuan.

Ils reviennent à la télé après l'an 2000 avec plusieurs émissions, notamment sur les extraterrestres. En 2008, ils présentent sur France 2 "Science X" mais le programme est vite arrêté.

Entretemps, ils se sont lancés dans des études débouchant sur une thèse de mathématiques pour Grichka en 1999 et de physique pour Igor en 2002.

S'ensuit une polémique sur la valeur de ces travaux, d'autant qu'ils se prévalaient du titre de "docteur" avant même d'avoir passé leurs thèses.

En 2010, l'hebdomadaire Marianne publie des extraits d'un rapport du CNRS selon lequel ces thèses - et d'autres articles - n'ont "pas de valeur scientifique". Marianne sera condamné pour diffamation en 2014 mais, peu après, les frères seront en revanche déboutés d'une action engagée auprès du tribunal administratif de Paris contre le CNRS.

D'une manière générale, il ressort que leurs travaux n'étaient pas des canulars mais juste de faible valeur. Les intéressés s'estimaient traités injustement par une communauté scientifique qui aurait eu du mal à supporter leur statut de personnalités médiatiques et de vulgarisateurs à succès.
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