Ukraine: face à Poutine, Biden mise avant tout sur la dissuasion

Réponse "énergique" et "résolue", sanctions "comme il n'en a jamais vu": Joe Biden, qui multiplie les mises en garde pour dissuader la Russie de Vladimir Poutine d'envahir l'Ukraine, dispose de plusieurs options qui pourraient s'avérer douloureuses pour Moscou.



Des pourparlers pour quoi faire?


Les Occidentaux accusent les Russes d'avoir amassé des dizaines de milliers de soldats à la frontière ukrainienne et d'envisager une nouvelle "agression" après l'annexion de la Crimée en 2014.

Dans ce contexte explosif, Etats-Unis et Européens ont accepté une série de pourparlers la semaine prochaine avec la Russie, qui a, elle, proposé des accords pour limiter l'élargissement de l'Otan à ses portes.

Les responsables américains se disent prêts à discuter des préoccupations des deux camps - mais ils ont aussi fait savoir que la plupart des exigences russes étaient irrecevables.

Le 46e président de l'histoire américaine semble donc peu intéressé par un grand accord avec la puissance rivale: entretenir le dialogue vise davantage, pour lui, à éviter que la crise ne dégénère tout en faisant passer ses avertissements.

"Il s'agit avant tout de remettre les relations sur les rails d'un dialogue plus approfondi, d'une diplomatie et d'une communication plus efficaces, qui ne déboucheront pas sur une résolution définitive de tous les problèmes, mais sur une meilleure gestion de ces problèmes pour éviter qu'ils n'engendrent des métastases", résume Matthew Rojansky, directeur du Kennan Institute au sein du cercle de réflexion Wilson Center.

Quelles sanctions possibles?


Joe Biden a dit avoir menacé directement son homologue russe de "conséquences économiques comme il n'en a jamais vu" s'il décidait d'envahir l'Ukraine.

Les sanctions qui sont sur la table, même si Washington ne les a pas détaillées, pourraient s'avérer très dures pour l'économie russe.

D'abord, les Occidentaux peuvent inscrire davantage de proches de Vladimir Poutine sur leurs listes noires, les privant de tout accès à leurs avoirs en Amérique ou en Europe.

Ils peuvent aussi "assécher" les investissements en Russie et les exportations vers ce pays de technologies occidentales, prévient l'ex-ambassadeur américain à Kiev William Taylor, vice-président du centre de recherches United States Institute of Peace.

Enfin, ils laissent planer la menace d'un recours à celle qui est souvent qualifiée d'"option nucléaire": couper la Russie de Swift, rouage essentiel de la finance mondiale qui permet aux banques de faire circuler l'argent.

Cette démarche ne peut être utilisée qu'en dernier ressort, en raison de ses répercussions négatives pour les économies européennes et américaine. "Mais les grands perdants seraient bien les Russes", prévient William Taylor.


La carte énergétique est aussi brandie, puisque la diplomatie allemande menace de ne pas autoriser l'entrée en service du gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l'Allemagne, cher à Moscou, en cas de nouvelle escalade russe.

Quelles options militaires?


Joe Biden a fait savoir qu'il n'a aucune intention d'entraîner la première puissance mondiale dans un nouveau conflit à l'étranger.

Mais sans aller jusqu'à une implication directe, les Américains ont prévenu qu'ils enverraient davantage d'armes à l'Ukraine en cas d'attaque russe, et pourraient aussi équiper des milices locales.

Les Etats-Unis peuvent également fournir à leurs alliés ukrainiens du renseignement, en multipliant les survols par des avions de reconnaissance.

Surtout, l'administration Biden a dit qu'en cas d'invasion russe de l'Ukraine, elle répondrait favorablement aux demandes de renforts - donc de déploiement de troupes américaines -- de la part des pays de l'Otan frontaliers de la Russie (Estonie, Lettonie, Lituanie et Pologne).

"C'est exactement ce dont Poutine ne veut pas. Donc s'il décide d'envahir, il va avoir exactement ce dont il ne veut pas", martèle William Taylor.

Cela suffira-t-il?


Par le passé, les sanctions, même sévères, n'ont pas convaincu le président Poutine de revenir en arrière, notamment après l'annexion de la Crimée.

C'est pourquoi, cette fois, Washington tente de communiquer clairement au Kremlin quelle serait la réaction occidentale avant qu'il passe à l'acte.

Selon Matthew Rojansky, "personne ne doute que les Etats-Unis peuvent faire du mal à la Russie sur le plan économique". "La question est: cela suffit-il à changer le comportement de la Russie? Et l'histoire nous a enseigné que la seule chance que cela a de marcher, c'est de formuler les menaces à l'avance", estime-t-il.

William Taylor abonde: Vladimir Poutine "devrait être dissuadé" d'agir par toutes ces menaces. "Mais le sera-t-il vraiment? Un seul homme peut répondre à cette question".

AFP

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