Ici Beyrouth est allé à la rencontre de Nasri Badaoui, un Franco-Libanais originaire de Tripoli. Il travaille pour un cabinet de conseils en management et en intelligence artificielle, et gère avec d’autres personnes un groupe de réflexion sur cette discipline. Portrait.
Nasri Badaoui, 33 ans, est ce que l’on appelle un passionné. Son temps professionnel, comme son temps libre, il le consacre à l’intelligence artificielle. Plus communément appelée "IA", cette discipline connaît un boom mondial spectaculaire ces derniers mois, et nourrit fantasmes comme inquiétudes.
Né d’un père tripolitain et d’une mère bretonne, Nasri Badaoui voit le jour à Tripoli, dans le nord du Liban. Il y passe la majorité de son enfance et y effectue presque toute sa scolarité, basée sur le programme libanais.
Il est âgé de seize ans lorsqu’il s’envole pour l’Arabie saoudite, et plus exactement pour Djeddah, sur les bords de la mer Rouge.
Là-bas, son cursus bascule. Il suit ses cours de première et de terminale au lycée français afin de préparer son baccalauréat, cette fois avec le programme français. Il se rend ensuite en France où il suit des études scientifiques, et intègre en 2011/2012, la prestigieuse école d’ingénieurs Centrale Paris, pour se spécialiser en ingénierie pétrolière. Il en sort diplômé en 2015.
Trilingue, puisqu’il maîtrise le français, l’anglais et l’arabe – marque de fabrique de la diaspora libanaise – Nasri Badaoui confie avoir travaillé en alternance "dans le domaine de l’ingénierie pétrolière à Londres, avant de partir au Moyen-Orient" en 2016.
Il précise alors avoir travaillé dans le Golfe: à Dubaï, à Doha ainsi qu’à Riyad jusqu’en 2019 pour le cabinet de conseil en management français, Sia Partners. "Lors de ma couverture de ce périmètre géographique et au travers de mes projets, j’ai été très influencé par l’évolution du monde de la «data science». Je commençais de plus en plus à instruire des projets de «data science» appliqués à l’énergie", poursuit Nasri Badaoui.
Il commence alors progressivement à travailler en tant que «data analyst» et «data scientist», toujours dans le domaine énergétique. Mais, dit-il, «le passage du secteur pétrolier à celui de la «data science» a été relativement acté, lorsqu’il y a eu une crise pétrolière dans les pays producteurs, avec des prix du baril au plus bas, et une sorte de gel du secteur, en 2014/2015. Cela m’a permis de me dédier à ma passion pour l’intelligence artificielle».
Il ajoute que l’autre élément qui entre en ligne de compte, c’est la "prolifération des cas d’usage à haut potentiel", c’est-à-dire des applications tournant avec des moteurs d’intelligence artificielle. Par exemple, dans le domaine de la santé, l’analyse des scanners pour les IRM.
Dès février 2019, Nasri Badaoui retourne à Paris, tout en continuant à travailler pour Sia Partners, cette fois, avec un plein focus sur l’intelligence artificielle.
Création d’un groupe de réflexion
Aujourd’hui, Nasri Badaoui dispose d’une double casquette. La première est celle de consultant en intelligence artificielle pour Sia Partners dans la capitale française. La seconde, c’est celle de président d’un "think tank" (groupe de réflexion) dont l’axe repose sur l’IA et ses enjeux: le Mouvement pour l’intelligence artificielle (ou MIA). Il s’agit d’une association (loi 1901), dont l’existence juridique remonte à un peu moins d’un an, et dont Nasri Badaoui est l’un des membres fondateurs, avec plusieurs autres personnes. Ce dernier explique que la "genèse du MIA a eu lieu au moment des débats autour de l’élection présidentielle française" en 2022.
Celle-ci a été l’occasion, selon lui, d’essayer de mettre en avant le thème et les enjeux de l’intelligence artificielle, abordés dans beaucoup d’autres pays avec des programmes ambitieux, mais peu en France. "Je me suis dit: il faut absolument qu’on se positionne et qu’on crée un think tank en capacité de faire des propositions en matière de politiques publiques dans le domaine de l’intelligence artificielle", indique-t-il. Il ajoute qu’en France, "on a une excellente formation en mathématiques et en programmation dans les grandes écoles et les universités. Et pourtant on assiste à une fuite de ces cerveaux-là à l’étranger parce qu’on manque d’ambition".
Parmi les préconisations du MIA: l’émergence d’un GAFA (géant du numérique) européen, la création d’un ministère de l’Intelligence artificielle et du Numérique, d’agences régionales de l’IA, l’élévation de l’informatique au rang des mathématiques dans l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, ou encore la conception d’un plan national d’accompagnement de la mutation de l’emploi vers les métiers de l’IA et du numérique en France.
Il relève que le MIA "adopte une position neutre, et a vocation à donner des éléments de réflexion sur le fond en termes de réglementation, d’encadrement et autres (…) Il s’agit d’accompagner cette évolution, qui est certaine et qui arrive, pour mieux en extraire tout le potentiel, pour la France, l’écologie et la justice sociale". Une ambition que l’on retrouve dans le slogan visible sur la page d’accueil du site du think tank: "L’intelligence artificielle au service de la France, de l’Homme et de l’Environnement".
Le MIA compte aujourd’hui un noyau dur composé d’une dizaine de membres actifs et dispose d’un "réseau de sympathisants qui est assez large", selon Nasri Badaoui.
L'expert souligne par ailleurs que le MIA est "dans une phase de croissance" et qu’il "commence à avoir des adhésions et de la visibilité". Le président du MIA tient par ailleurs à préciser que le think tank est un groupe de réflexion neutre et apolitique.
Quid du Liban ?
Interrogé sur la présence et le développement de l’intelligence artificielle au Liban, son pays natal, Nasri Badaoui répond qu’"au regard de la situation politique au Liban (…) on n’en n’est pas du tout à maîtriser, encadrer ou accompagner des cas d’usages d’application en intelligence artificielle, malgré la présence de talents".
"Aujourd’hui, les seuls à avoir accompagné la vague de l’IA, ce sont les mondes académique et universitaire au Liban (AUB, USJ…) qui ont des formations en IA et qui produisent des promotions brillantes", note-t-il, en expliquant que son entreprise "a embauché des consultants «data scientists» de l’USJ au Moyen-Orient et ça s’est bien passé".
Nasri Badaoui affirme enfin suivre "de près" les formations académiques en intelligence artificielle au Liban, mais aussi "des initiatives entreprises, ici et là, comme BeirutAI, avec qui nous sommes entrés en contact".
Nasri Badaoui, 33 ans, est ce que l’on appelle un passionné. Son temps professionnel, comme son temps libre, il le consacre à l’intelligence artificielle. Plus communément appelée "IA", cette discipline connaît un boom mondial spectaculaire ces derniers mois, et nourrit fantasmes comme inquiétudes.
Né d’un père tripolitain et d’une mère bretonne, Nasri Badaoui voit le jour à Tripoli, dans le nord du Liban. Il y passe la majorité de son enfance et y effectue presque toute sa scolarité, basée sur le programme libanais.
Il est âgé de seize ans lorsqu’il s’envole pour l’Arabie saoudite, et plus exactement pour Djeddah, sur les bords de la mer Rouge.
Là-bas, son cursus bascule. Il suit ses cours de première et de terminale au lycée français afin de préparer son baccalauréat, cette fois avec le programme français. Il se rend ensuite en France où il suit des études scientifiques, et intègre en 2011/2012, la prestigieuse école d’ingénieurs Centrale Paris, pour se spécialiser en ingénierie pétrolière. Il en sort diplômé en 2015.
Trilingue, puisqu’il maîtrise le français, l’anglais et l’arabe – marque de fabrique de la diaspora libanaise – Nasri Badaoui confie avoir travaillé en alternance "dans le domaine de l’ingénierie pétrolière à Londres, avant de partir au Moyen-Orient" en 2016.
Il précise alors avoir travaillé dans le Golfe: à Dubaï, à Doha ainsi qu’à Riyad jusqu’en 2019 pour le cabinet de conseil en management français, Sia Partners. "Lors de ma couverture de ce périmètre géographique et au travers de mes projets, j’ai été très influencé par l’évolution du monde de la «data science». Je commençais de plus en plus à instruire des projets de «data science» appliqués à l’énergie", poursuit Nasri Badaoui.
Il commence alors progressivement à travailler en tant que «data analyst» et «data scientist», toujours dans le domaine énergétique. Mais, dit-il, «le passage du secteur pétrolier à celui de la «data science» a été relativement acté, lorsqu’il y a eu une crise pétrolière dans les pays producteurs, avec des prix du baril au plus bas, et une sorte de gel du secteur, en 2014/2015. Cela m’a permis de me dédier à ma passion pour l’intelligence artificielle».
Il ajoute que l’autre élément qui entre en ligne de compte, c’est la "prolifération des cas d’usage à haut potentiel", c’est-à-dire des applications tournant avec des moteurs d’intelligence artificielle. Par exemple, dans le domaine de la santé, l’analyse des scanners pour les IRM.
Dès février 2019, Nasri Badaoui retourne à Paris, tout en continuant à travailler pour Sia Partners, cette fois, avec un plein focus sur l’intelligence artificielle.
Création d’un groupe de réflexion
Aujourd’hui, Nasri Badaoui dispose d’une double casquette. La première est celle de consultant en intelligence artificielle pour Sia Partners dans la capitale française. La seconde, c’est celle de président d’un "think tank" (groupe de réflexion) dont l’axe repose sur l’IA et ses enjeux: le Mouvement pour l’intelligence artificielle (ou MIA). Il s’agit d’une association (loi 1901), dont l’existence juridique remonte à un peu moins d’un an, et dont Nasri Badaoui est l’un des membres fondateurs, avec plusieurs autres personnes. Ce dernier explique que la "genèse du MIA a eu lieu au moment des débats autour de l’élection présidentielle française" en 2022.
Celle-ci a été l’occasion, selon lui, d’essayer de mettre en avant le thème et les enjeux de l’intelligence artificielle, abordés dans beaucoup d’autres pays avec des programmes ambitieux, mais peu en France. "Je me suis dit: il faut absolument qu’on se positionne et qu’on crée un think tank en capacité de faire des propositions en matière de politiques publiques dans le domaine de l’intelligence artificielle", indique-t-il. Il ajoute qu’en France, "on a une excellente formation en mathématiques et en programmation dans les grandes écoles et les universités. Et pourtant on assiste à une fuite de ces cerveaux-là à l’étranger parce qu’on manque d’ambition".
Parmi les préconisations du MIA: l’émergence d’un GAFA (géant du numérique) européen, la création d’un ministère de l’Intelligence artificielle et du Numérique, d’agences régionales de l’IA, l’élévation de l’informatique au rang des mathématiques dans l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, ou encore la conception d’un plan national d’accompagnement de la mutation de l’emploi vers les métiers de l’IA et du numérique en France.
Il relève que le MIA "adopte une position neutre, et a vocation à donner des éléments de réflexion sur le fond en termes de réglementation, d’encadrement et autres (…) Il s’agit d’accompagner cette évolution, qui est certaine et qui arrive, pour mieux en extraire tout le potentiel, pour la France, l’écologie et la justice sociale". Une ambition que l’on retrouve dans le slogan visible sur la page d’accueil du site du think tank: "L’intelligence artificielle au service de la France, de l’Homme et de l’Environnement".
Le MIA compte aujourd’hui un noyau dur composé d’une dizaine de membres actifs et dispose d’un "réseau de sympathisants qui est assez large", selon Nasri Badaoui.
L'expert souligne par ailleurs que le MIA est "dans une phase de croissance" et qu’il "commence à avoir des adhésions et de la visibilité". Le président du MIA tient par ailleurs à préciser que le think tank est un groupe de réflexion neutre et apolitique.
Quid du Liban ?
Interrogé sur la présence et le développement de l’intelligence artificielle au Liban, son pays natal, Nasri Badaoui répond qu’"au regard de la situation politique au Liban (…) on n’en n’est pas du tout à maîtriser, encadrer ou accompagner des cas d’usages d’application en intelligence artificielle, malgré la présence de talents".
"Aujourd’hui, les seuls à avoir accompagné la vague de l’IA, ce sont les mondes académique et universitaire au Liban (AUB, USJ…) qui ont des formations en IA et qui produisent des promotions brillantes", note-t-il, en expliquant que son entreprise "a embauché des consultants «data scientists» de l’USJ au Moyen-Orient et ça s’est bien passé".
Nasri Badaoui affirme enfin suivre "de près" les formations académiques en intelligence artificielle au Liban, mais aussi "des initiatives entreprises, ici et là, comme BeirutAI, avec qui nous sommes entrés en contact".
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