Les dirigeants ouest-africains réunis dimanche à Accra autour du dossier malien ont adopté dimanche des sanctions "très dures" en raison du non-respect par la junte de l'échéance de février pour des élections ramenant les civils au pouvoir, a dit à l'AFP un participant au sommet.
Les dirigeants de la Cédéao ont entériné les mesures prises lors d'un sommet de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) précédant immédiatement le leur, a dit le même responsable. Les pays de l'UEMOA sont tous membres de la Cédéao.
Au cours de leur réunion considérée comme préparant le terrain à une action concertée, les dirigeants des Etats de l'UEMOA ont affiché leur "fermeté" à l'encontre de la junte, a dit un participant sous le couvert de l'anonymat.
Deux ministres du gouvernement malien dominé par les colonels avaient pourtant soumis samedi à la Cédéao un calendrier révisé pour un retour des civils à la tête du pays, théâtre de deux coups d'Etat militaires depuis 2020 et en proie à une profonde crise sécuritaire.
"La contre-proposition malienne est une transition de quatre ans. C'est de la rigolade", a dit un haut responsable ghanéen, dont le pays assure actuellement la présidence de la Cédéao et qui s'exprimait lui aussi sous le couvert de l'anonymat pour ne pas nuire aux discussions à venir.
La junte qui dirige le Mali demandait initialement jusqu'à cinq ans. La nouvelle offre a été présentée dans le souci de "maintenir le dialogue et une bonne coopération avec la Cédéao", a dit samedi à la télévision nationale l'un des deux émissaires maliens, le ministre des Affaires étrangères Abdoulaye Diop, sans en préciser le contenu.
La démarche visait à l'évidence à apaiser le courroux d'un certain nombre de dirigeants rassemblés à Accra.
Depuis le premier putsch d'août 2020 conforté par celui de mai 2021 intronisant le colonel Assimi Goïta comme président de la "transition", la Cédéao pousse au retour des civils dans les meilleurs délais.
Pour l'organisation dont la crédibilité est en jeu, il s'agit de défendre ses principes fondamentaux de gouvernance, de stopper la contagion du fait accompli et de contenir l'instabilité régionale. Elle avait obtenu après le premier putsch l'engagement des colonels à organiser des élections législatives et présidentielle en février 2022.
La junte avait cédé de mauvaise grâce à la pression. Elle dit aujourd'hui ne pas être capable d'honorer l'échéance. Les autorités invoquent l'insécurité persistante dans le pays, en proie aux violences de toutes sortes, jihadistes, communautaires, crapuleuses... Elles affirment la nécessité de réformes préalables pour que les élections ne souffrent pas de contestations à l'instar des précédentes.
Mesure de l'importance des enjeux pour la Cédéao comme pour le pays au coeur de l'instabilité sahélienne, c'était la huitième fois que les dirigeants ouest-africains se retrouvaient, en présentiel ou en visioconférence, pour parler spécialement du Mali (avec la Guinée après un autre putsch en septembre 2021) depuis août 2020, sans compter les sommets ordinaires.
"La prorogation de la durée de la transition à cinq ans préoccupe l’ensemble de la région ouest-africaine", a déclaré le président en exercice de l'UEMOA, le chef de l'Etat burkinabè Roch Marc Christian Kaboré dans son discours d'ouverture. Il a paru peu enclin à accorder beaucoup de temps aux colonels, exprimant "la conviction que toutes les réformes politiques, économiques et sociales visant la refondation du Mali ne pourraient être conduites que par des autorités démocratiquement élues".
La Cédéao a déjà imposé un gel de leurs avoirs financiers et une interdiction de voyager à 150 personnalités, coupables selon elle de faire obstruction aux élections.
Lors de leur sommet du 12 décembre, les dirigeants ouest-africains avaient brandi la menace de sanctions "économiques et financières" supplémentaires.
En pleine pandémie, l'embargo infligé en 2020 à un pays pauvre et enclavé avait été durement ressenti. Ces sanctions avaient été levées au bout d'un mois et demi.
AFP
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