Inflation: L’heure de la pause n’a pas sonné  

Le mouvement haussier des prix des produits et des services se poursuit alors que la saison des vacanciers de la diaspora est ouverte. Pour l’inflation, l’heure de la pause n’a pas encore sonné. Un facteur qui pourrait causer du tort au Liban.
Selon le dernier rapport du Fonds Monétaire International (FMI) sur le Liban, publié jeudi, la dépréciation spectaculaire du taux de change au premier trimestre de 2023 a entraîné une augmentation de la dollarisation des liquidités et une accélération de l’inflation, qui a atteint 270% en glissement annuel en avril 2023.
Les fournisseurs de services et de produits à la consommation sont, de leur côté, sur la défensive, pour justifier la hausse de leurs prix en dollars, sur un marché à près de 85% dollarisé.
Ils prétextent notamment une augmentation du taux du dollar douanier de 6000% en livres. Celui-ci est passé de 1.500 livres à 45.000 livres avant d’être aligné sur celui de Sayrafa, la plateforme de la Banque du Liban, qui est aujourd’hui à 86.200 livres pour un dollar.
Ils estiment aussi que la hausse du dollar douanier a impacté le calcul de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui est au bout du compte assumée par le consommateur final.
Les agents économiques plaident leur cause également en insistant sur le fait que la hausse du dollar douanier et celle des taxes et des impôts, d’une manière générale, ont eu des retombées directes sur la structure de leurs coûts fixes.
Dans le même ordre d’idées, l’Association des commerçants de Beyrouth souligne que le chiffre d’affaires de ces derniers a augmenté en valeur nominale, c’est-à-dire en prenant en compte l’inflation, mais il a baissé en valeur réelle. Selon une source de l'association, la valeur de l’indice de l’évolution trimestrielle du chiffre d’affaires des commerces de détail a marginalement progressé, passant de 28,90 points, fin décembre dernier, à 29,23 points au premier trimestre de 2023.
Une dollarisation limitée

Contrairement à ce qu’une partie de l’opinion publique croit, la dollarisation limitée et facultative officialisée par le ministre sortant de l’Économie, Amine Salam, est une réaction à l’instabilité économique et à l’inflation élevée. Elle ne peut pas prétendre régler, de ce fait, le problème de la hausse des prix à la consommation. Son objectif, dans un premier temps, est de protéger les actifs des individus contre la dévaluation continue de la monnaie nationale.
Le recours à une dollarisation limitée et facultative des transactions commerciales s’explique par une volonté de mettre en place essentiellement un moyen de paiement et une unité de compte lorsque le coût élevé de l’utilisation de la monnaie nationale pour les transactions pousse le public à chercher des solutions de rechange.
Toutefois, l’un de ses inconvénients est que ce procédé reste ancré dans les habitudes des agents même après la stabilisation de la valeur de la monnaie et du ralentissement de l’inflation.
Mise en garde    
La demande auprès des commerces de gros est moyenne d’une manière générale, explique à Ici Beyrouth, un commercial du secteur privé, qui attire l’attention sur le danger d’une manœuvre des fournisseurs de produits et de services consistant à hausser en continu leurs prix. Il rappelle que les recettes attendues, grâce à la présence massive d’expatriés et de touristes occidentaux, pendant la saison estivale sont ponctuelles et ne peuvent constituer en aucun cas un tampon pour alléger le double déficit de la balance des paiements et du budget de l’État. «La réputation du Liban, comme un pays cher, causera du tort à tous et serait irréversible», dit-il, mettant en garde contre des actes qui pourraient saper les capacités compétitives du pays du Cèdre, faisant allusion notamment au secteur de l’hôtellerie, de la restauration, de la gastronomie et du commerce. Dans ce dernier secteur, il rappelle que le Liban est devenu compétitif depuis l’entrée en vigueur de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans les pays du Golfe.
Bouclier tarifaire et concurrence    
Certes, un contrôle des prix par l’État est un impératif mais il est impossible dans la conjoncture qui prévaut. La réponse du ministère de l’Économie est connue depuis la nuit des temps. Il manque d’effectifs pour une telle besogne. 
Quant au recours à des boucliers tarifaires pour l’électricité et le gaz à titre indicatif, pour certains secteurs productifs, comme c’est le cas en France, il n’est pas possible pour l’heure. La vacance au niveau du pouvoir exécutif ne permet pas de réfléchir dans ce sens.
Il ne reste plus ainsi qu’à laisser jouer la concurrence entre les agents d’un même secteur pour un rééquilibrage des prix sur le marché.
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