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[audio mp3="https://icibeyrouth.com/wp-content/uploads/2023/08/Une-decision-prise-par-lune-des-instances-du-Conseil-superieur-chiite-mettant-a-lecart-quinze.mp3"][/audio]
Une décision prise par l'une des instances du Conseil supérieur chiite mettant à l'écart quinze dignitaires religieux a créé un tollé sur les réseaux sociaux et au sein de la communauté. Pour Ali al-Amine, journaliste, cette décision est «politique» et «crée un précédent dangereux».
Grave précédent au sein de la communauté chiite: l'une des instances du Conseil supérieur chiite, plus précisément l'autorité en charge de gérer les affaires religieuses et l'état civil, a pris l'étonnante décision d'interdire à quinze dignitaires religieux d'exercer une activité religieuse dans le pays. Cette mesure a été rapidement stigmatisée par le directoire du Conseil supérieur chiite, qui l'a qualifiée de caduque.
D’après le document rendu public par l'instance précitée et largement partagé sur les réseaux sociaux, les quinze dignitaires en question - dont certains sont opposés au Hezbollah - sont considérés comme "incapables de mener une orientation religieuse ou de gérer les affaires religieuses et l’état civil des membres de la communauté chiite pour déviation doctrinale ou comportementale, ou encore parce qu’ils ignorent les connaissances religieuses ou prétendent faire partie de la Hawza (école religieuse, NDLR)».
Au nombre de ces dignitaires religieux, figure notamment le cheikh Yasser Aoudé, un farouche opposant au tandem Amal-Hezbollah et un fervent défenseur du mouvement de contestation populaire du 17 octobre 2019. Les autres dignitaires sont Samer Abdel Jussein Ghanaoué, Bilal Ibrahim Salim, Mohammad Youssef el-Hajj Hassan, Nizar Mohammad Hamza, Ibrahim Hassan Harez, Abdel Karim el-Cheik Ali, Youssef Hassan Kanj, Ahmad Abbas Eidi, Abbas Hammoud Makh (Abou el-Hassan Mortada), Mohammad ali fouani, Hachem Ali Moussaoui, Mahmoud Abdallah Fakih, Abdel Salam Niazi Dandach et Nazir Jamal al-Jachi.
Cette décision a suscité une vague d’indignation, de sorte que le Conseil supérieur chiite s’est rapidement rétracté, la considérant comme caduque. Dans un communiqué publié près d’une heure plus tard, il a ainsi déclaré que cette décision «ne reflète pas son point de vue» et que le directeur de l’instance susmentionnée et vice-président du CSC, le cheikh Ali Khatib, n’en a pas été informé. Il a ainsi appelé à «considérer que cette décision est caduque». Le CSC a enfin rappelé qu’«aucun document ne peut être publié que s’il porte la signature exclusive de la présidence du Conseil supérieur chiite».
Pressions du Hezb
«C’est un précédent qui a été créé, s’insurge Ali al-Amine, fondateur du site d’informations en ligne Janoubia. Jamais dans l’histoire du CSC, quinze dignitaires religieux n’ont été radiés à la fois. » «Parmi ces quinze dignitaires, au moins trois ont été radiés pour des raisons politiques, poursuit-il. Il s’agit de Yasser Aoudé, Samer Ghanaoué et Mohammad Youssef el-Hajj Hassan. S’ils étaient affiliés au Hezb ou au mouvement Amal, on n’aurait jamais osé prendre une telle mesure à leur encontre.»
Ali al-Amine estime que la mesure du CSC a été suivie de cette vague d’indignation parce que le cheikh Yasser Aoudé a été visé. «Le cheikh Aoudé a son poids, explique-t-il. Il forme des dignitaires religieux. Il est connu pour être spécialisé dans les affaires religieuses. Il avait son programme sur la chaîne al-Imane (la foi, en arabe) qui relève de la Fondation de l’uléma Mohammed Hussein Fadlallah, dont il était d’ailleurs un élève. Le programme avait eu un grand succès au sein de la communauté. Il y a quelques années, le Hezb avait exercé une grande pression sur la fondation qui a suspendu le programme».
Comportements miliciens
Pour Ali el-Amine, la décision du CSC reflète «le chaos et la confusion au sein de la communauté chiite, au sein du Hezbollah et sa relation avec les autres et avec le mouvement Amal». «Cette décision reflète aussi une approche dans les relations caractérisée par le suivisme, la légèreté, le brigandage et les comportements miliciens, insiste-t-il. L’infiltration milicienne dans cette institution l’a transformée en un terrain de conflits à caractère milicien. D’ailleurs, tous les responsables au sein du CSC ont été désignés par Amal et le Hezbollah.»
«Cette décision trahit, par ailleurs, la tendance dangereuse qu’est l’unilatéralisme et qui fait qu’on œuvre à annuler l’autre et faire fi de l’éthique, de la religion et de toute autre valeur, lance Ali el-Amine. Cet unilatéralisme va à l’encontre de la pensée chiite qui repose sur l’ijtihad (effort de réflexion, en arabe), c’est-à-dire le fait de se tourner vers plusieurs références. Dans le chiisme, il n’existe pas une seule référence ou autorité religieuse. Cette tendance unilatérale est une conséquence du pouvoir iranien. Malheureusement, sur le plan pratique, l’ijtihad n’est plus en vigueur, en raison de cet unilatéralisme qui l’emporte sur le plan politique et religieux.»
Et Ali el-Amine de conclure: «Sur le plan culturel et religieux, le chiisme passe par la période la plus faible de son histoire. La régression se fait ressentir. Il manque d’élites.»
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Une décision prise par l'une des instances du Conseil supérieur chiite mettant à l'écart quinze dignitaires religieux a créé un tollé sur les réseaux sociaux et au sein de la communauté. Pour Ali al-Amine, journaliste, cette décision est «politique» et «crée un précédent dangereux».
Grave précédent au sein de la communauté chiite: l'une des instances du Conseil supérieur chiite, plus précisément l'autorité en charge de gérer les affaires religieuses et l'état civil, a pris l'étonnante décision d'interdire à quinze dignitaires religieux d'exercer une activité religieuse dans le pays. Cette mesure a été rapidement stigmatisée par le directoire du Conseil supérieur chiite, qui l'a qualifiée de caduque.
D’après le document rendu public par l'instance précitée et largement partagé sur les réseaux sociaux, les quinze dignitaires en question - dont certains sont opposés au Hezbollah - sont considérés comme "incapables de mener une orientation religieuse ou de gérer les affaires religieuses et l’état civil des membres de la communauté chiite pour déviation doctrinale ou comportementale, ou encore parce qu’ils ignorent les connaissances religieuses ou prétendent faire partie de la Hawza (école religieuse, NDLR)».
Au nombre de ces dignitaires religieux, figure notamment le cheikh Yasser Aoudé, un farouche opposant au tandem Amal-Hezbollah et un fervent défenseur du mouvement de contestation populaire du 17 octobre 2019. Les autres dignitaires sont Samer Abdel Jussein Ghanaoué, Bilal Ibrahim Salim, Mohammad Youssef el-Hajj Hassan, Nizar Mohammad Hamza, Ibrahim Hassan Harez, Abdel Karim el-Cheik Ali, Youssef Hassan Kanj, Ahmad Abbas Eidi, Abbas Hammoud Makh (Abou el-Hassan Mortada), Mohammad ali fouani, Hachem Ali Moussaoui, Mahmoud Abdallah Fakih, Abdel Salam Niazi Dandach et Nazir Jamal al-Jachi.
Cette décision a suscité une vague d’indignation, de sorte que le Conseil supérieur chiite s’est rapidement rétracté, la considérant comme caduque. Dans un communiqué publié près d’une heure plus tard, il a ainsi déclaré que cette décision «ne reflète pas son point de vue» et que le directeur de l’instance susmentionnée et vice-président du CSC, le cheikh Ali Khatib, n’en a pas été informé. Il a ainsi appelé à «considérer que cette décision est caduque». Le CSC a enfin rappelé qu’«aucun document ne peut être publié que s’il porte la signature exclusive de la présidence du Conseil supérieur chiite».
Pressions du Hezb
«C’est un précédent qui a été créé, s’insurge Ali al-Amine, fondateur du site d’informations en ligne Janoubia. Jamais dans l’histoire du CSC, quinze dignitaires religieux n’ont été radiés à la fois. » «Parmi ces quinze dignitaires, au moins trois ont été radiés pour des raisons politiques, poursuit-il. Il s’agit de Yasser Aoudé, Samer Ghanaoué et Mohammad Youssef el-Hajj Hassan. S’ils étaient affiliés au Hezb ou au mouvement Amal, on n’aurait jamais osé prendre une telle mesure à leur encontre.»
Ali al-Amine estime que la mesure du CSC a été suivie de cette vague d’indignation parce que le cheikh Yasser Aoudé a été visé. «Le cheikh Aoudé a son poids, explique-t-il. Il forme des dignitaires religieux. Il est connu pour être spécialisé dans les affaires religieuses. Il avait son programme sur la chaîne al-Imane (la foi, en arabe) qui relève de la Fondation de l’uléma Mohammed Hussein Fadlallah, dont il était d’ailleurs un élève. Le programme avait eu un grand succès au sein de la communauté. Il y a quelques années, le Hezb avait exercé une grande pression sur la fondation qui a suspendu le programme».
Comportements miliciens
Pour Ali el-Amine, la décision du CSC reflète «le chaos et la confusion au sein de la communauté chiite, au sein du Hezbollah et sa relation avec les autres et avec le mouvement Amal». «Cette décision reflète aussi une approche dans les relations caractérisée par le suivisme, la légèreté, le brigandage et les comportements miliciens, insiste-t-il. L’infiltration milicienne dans cette institution l’a transformée en un terrain de conflits à caractère milicien. D’ailleurs, tous les responsables au sein du CSC ont été désignés par Amal et le Hezbollah.»
«Cette décision trahit, par ailleurs, la tendance dangereuse qu’est l’unilatéralisme et qui fait qu’on œuvre à annuler l’autre et faire fi de l’éthique, de la religion et de toute autre valeur, lance Ali el-Amine. Cet unilatéralisme va à l’encontre de la pensée chiite qui repose sur l’ijtihad (effort de réflexion, en arabe), c’est-à-dire le fait de se tourner vers plusieurs références. Dans le chiisme, il n’existe pas une seule référence ou autorité religieuse. Cette tendance unilatérale est une conséquence du pouvoir iranien. Malheureusement, sur le plan pratique, l’ijtihad n’est plus en vigueur, en raison de cet unilatéralisme qui l’emporte sur le plan politique et religieux.»
Et Ali el-Amine de conclure: «Sur le plan culturel et religieux, le chiisme passe par la période la plus faible de son histoire. La régression se fait ressentir. Il manque d’élites.»
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