À Aïn el-Héloué, le jeu sournois de services occultes
Les propos tenus par l’émissaire du comité central du Fateh, Azzam el-Ahmad, au Sérail, au sujet d’une implication de services des renseignements étrangers dans les combats qui continuent de faire rage dans le camp palestinien de Aïn el-Héloué, sont passés quasiment inaperçus au niveau officiel. Du moins, en apparence.
Ces propos ne font pourtant que confirmer ce qui a été dit dès le départ au sujet de la guerre dans laquelle sont engagés le Fateh du président palestinien, Mahmoud Abbas, et les groupuscules palestiniens, notamment Jund el-Cham et Chabeb el-Islam (les jeunes de l’Islam), soutenus par l’Iran et le Hezbollah, à Aïn el-Héloué. À savoir que l’assassinat dans une embuscade, en juillet, d’Abou Achraf el-Armouchi, un cadre du Fateh responsable de la sécurité à Aïn el-Héloué, et quatre de ses compagnons n’est que le détonateur d’une opération militaire d’envergure, dont l’enjeu est le contrôle du camp.
Aucun des responsables libanais n’a d’ailleurs pris la peine d’interroger Azzam el-Ahmad sur l’identité de ces services et sur les raisons pour lesquelles ils ont mis le feu aux poudres à Aïn el-Héloué, alors que les forces de la Moumanaa (axe Hezbollah-Iran-Syrie) s’étaient empressées, dès le premier échange de tirs à Aïn el-Héloué, d’accuser Israël d’être l’instigateur des affrontements meurtriers.
De sources palestiniennes, on indique que l’identité de ces services ne sera révélée qu’au moment opportun, mais on pose dans le même temps une série de questions supposées donner une indication sur cette identité: comment les armes et les munitions employées dans les affrontements sont-elles arrivées aux mains des fondamentalistes palestiniens? Quelles sont les parties qui les protègent et qui les incitent à ne pas honorer les engagements pris à la faveur des nombreux accords de cessez-le-feu, à savoir remettre aux autorités libanaises les meurtriers d’Abou Achraf el-Armouchi et des compagnons?
Selon ces mêmes sources, ces forces semblent chercher à détruire Aïn el-Héloué ou, du moins, à le contrôler entièrement en en chassant le Fateh.

Les forces du Fateh avaient tenté d’appréhender elles-mêmes les huit assassins présumés d'Abou Ashraf Al-Armouchi, mais sans succès, d’où leur insistance pour que ces derniers soient livrés volontairement aux autorités libanaises. Ce qui n'a pas eu lieu pour des raisons évidentes, de l’avis de ces sources. Leur interrogatoire par les forces de sécurité libanaises aurait, en effet, permis de découvrir qui se cache derrière eux et qui leur fournit les armes et munitions qu'ils utilisent lors des combats. Il aurait en outre conduit à connaître les détails du plan qu'ils mettent en œuvre.
Dans ce contexte, de mêmes sources, on fait état des craintes de voir les événements de Aïn el-Héloué s’étendre à d’autres camps, dans une tentative d’affaiblir le Fateh. Ces craintes ont été essentiellement alimentées par deux éléments: d'une part, la distribution, dans le camp de Beddaoui, non loin de Tripoli, au Liban-nord, de tracts attribués à Chabeb el-Islam, menaçant de se venger du Fateh, à cause de ce qui se passe à Aïn el-Héloué. Et, d'autre part, les rumeurs relayées par certains médias proches du camp de la Moumanaa faisant état d’une détérioration des relations entre le Fateh et les autorités libanaises, notamment l’armée, toujours en raison des événements de Aïn el-Héloué.
Pour l’heure, la situation sur le terrain dans ce camp montre la difficulté pour l'une et l’autre des deux parties adverses d’imposer un contrôle total sur le camp. La poursuite des violences risque d’entraîner la destruction totale du camp et le déplacement forcé de la plupart de ses habitants, lesquels ne disposent d'aucun autre refuge.
Un énième accord de cessez-le-feu a été conclu jeudi soir. Il est entré en vigueur à 18h, à la faveur de contacts menés à cette fin par le président de la Chambre, Nabih Berry. La question reste de savoir s’il va tenir, vu que les contacts et les efforts déployés par des responsables libanais et d’autres acteurs politiques en vue de mettre fin aux affrontements n’ont jusque-là mené à rien, partant du principe que la décision à cet égard dépend principalement des Palestiniens et de ceux qui exercent un contrôle sur les groupes extrémistes.
Aucune des décisions prises par les Palestiniens lors de leurs rencontres avec les partis libanais n'ayant été mise en œuvre, le Fateh avait choisi de ne pas publier de communiqué concernant le cessez-le-feu annoncé après le dernier round de combats, laissant ce soin aux groupuscules intégristes. Quoi qu’il en soit, ce cessez-le-feu avait à peine tenu quelques heures. Reste à voir si celui qui a été annoncé jeudi soir tiendra.
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