L'Ukraine a affirmé dimanche avoir des "preuves" de l'implication de la Russie dans une cyberattaque d'ampleur ayant visé cette semaine plusieurs sites gouvernementaux, dans un contexte de vives tensions entre Kiev et Moscou.
La cyberattaque menée dans la nuit de jeudi à vendredi a visé les sites de plusieurs ministères ukrainiens, restés inaccessibles plusieurs heures.
Ce sabotage, selon le ministère, "est une manifestation de la guerre hybride que la Russie mène contre l'Ukraine depuis 2014", année de l'annexion de la Crimée par Moscou, qui a été suivie d'un conflit toujours en cours entre les forces de Kiev et des séparatistes prorusses dans l'est du pays (plus de 13.000 morts).
L'objectif est "non seulement d'intimider la société", mais aussi de "déstabiliser la situation en Ukraine" en "sapant la confiance des Ukrainiens dans leur pouvoir" avec de "fausses informations sur la vulnérabilité des structures informatiques d'Etat", selon le ministère.
Kiev et ses alliés occidentaux accusent Moscou d'avoir déployé près de 100.000 soldats à sa frontière en vue d'une agression.
Selon des experts, une éventuelle invasion pourrait être précédée par du sabotage informatique visant à désorganiser les autorités ukrainiennes.
Dans ce contexte instable, le retour prévu lundi, après un mois d'absence, de l'ex-président ukrainien Petro Porochenko (2014-2019) risque de provoquer une crise politique. Principal rival de l'actuel président Volodymyr Zelensky, M. Porochenko est accusé par Kiev de "haute trahison" pour avoir commercé avec les séparatistes prorusses de l'Est.
Plusieurs pourparlers entre la Russie et les Occidentaux cette semaine ont échoué à calmer les tensions.
"En général, sur les questions de principes, nous pouvons désormais dire que nous restons sur des positions (...) totalement divergentes", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, dans une interview diffusée dimanche par la chaîne américaine CNN.
Washington se prononcera en début de semaine sur l'avenir de ces pourparlers.
"Si la Russie veut continuer sur la voie diplomatique, nous y sommes tout à fait prêts (...) Si la Russie choisit la voie de l'invasion et de l'escalade, nous y sommes prêts aussi avec une riposte ferme", a prévenu sur la chaîne CBS le conseiller à la sécurité nationale des Etats-Unis, Jake Sullivan. "Nous sommes prêts à tous les scénarios".
"Il faut comprendre que l'agresseur, c'est la Russie", a dit dimanche le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, à la chaîne publique canadienne CBC. "La Russie doit engager une désescalade", mais il faut aussi "envoyer à la Russie le message que nous sommes prêts à discuter et à écouter ses préoccupations", a-t-il ajouté.
Les Etats-Unis ont accusé vendredi Moscou - qui a nié - d'avoir déployé en Ukraine des agents chargés d'opérations de "sabotage" afin de créer un "prétexte" pour une invasion.
"Personne ne menace personne de mener une action militaire (...) Ce serait une folie", a assuré Dmitri Peskov sur CNN. "Mais nous serons prêts à mener des représailles" si l'Otan rejette les exigences russes.
La Russie réclame des "garanties" visant selon elle à assurer sa sécurité, à commencer par un engagement de l'Otan à ne pas accepter Kiev comme membre.
Grave avertissement de Microsoft
M. Peskov a nié tout rôle de son pays dans la cyberattaque. "Nous n'avons rien à voir avec cela", a-t-il dit.
Vendredi, les services secrets ukrainiens (SBU) avaient indiqué que les attaques ont visé 70 sites internet gouvernementaux, dont dix ont fait l'objet d'une "ingérence non autorisée", mais "leur contenu n'a pas été modifié et aucune fuite de données personnelles n'a eu lieu".
Mais le géant informatique américain Microsoft a averti dimanche que cette cyberattaque massive pourrait rendre toute la structure informatique du gouvernement ukrainien inopérable.
Même si le logiciel malveillant détecté ressemble à un rançongiciel, qui bloque généralement l'accès à l'ordinateur en réclamant le paiement d'une rançon, il vise en fait "à détruire et rendre inopérables les sites visés, et non pas à récupérer une rançon", a écrit Microsoft sur son blog.
De plus, l'attaque semble avoir visé plus d'organismes qu'on ne le pensait initialement.
"Nous avons trouvé ce logiciel malveillant sur des dizaines de systèmes appartenant au gouvernement, mais aussi à des ONG et à des organisations d'informations technologiques, toutes basées en Ukraine. A ce stade, nous ne pouvons dire quel est le cycle opérationnel de cette attaque, ni combien d'autres organisations peuvent en être victimes", a précisé Microsoft.
Le groupe a indiqué n'avoir pas pu identifier l'origine des attaques pour le moment.
AFP
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