Valérie Cachard et «des mots sur un mur»
©Crédit photo: Myriam Boulos


Dans le cadre du Festival actoral, La Marelle et Montevidéo ont convié l’autrice Valérie Cachard, à un rendez-vous littéraire consacré à son projet innovant, Des mots sur un mur. Ce mercredi 27 septembre, à Montevidéo, Marseille, Valérie Cachard dévoilera des extraits de son œuvre en gestation, s'inspirant de tout ce qui a été inscrit sur les murs de Beyrouth entre octobre 2019 et octobre 2023.

S’imprégnant des mots, des dessins, des éléments effacés et barrés qui ornent les murs de Beyrouth depuis octobre 2019, Valérie Cachard tisse un texte sonore et modulaire. Son œuvre explore l’histoire en mutation, sondant des notions telles que la révolte, la révolution, la conscience, le désir de construire une nouvelle mémoire, l’excès de vie, l’autocensure, le voyeurisme, l’inertie, l’éjection et le souffle.
Raconter Beyrouth est une tâche ardue; tenter de l’entendre l’est encore plus. Au gré des guerres et des silences, de la colère et de la peur, les êtres se relèvent, explorent ses rues, cherchent les souvenirs, enterrent l’avenir, et espèrent la résurgence du passé. Beyrouth, dans son tumulte, laisse Valérie Cachard sans mots, mais l’inonde de ses maux. C'est cette richesse linguistique qui captive et inspire l’écrivaine, alors que tant de passants traversent les rues, inattentifs, silencieux. Valérie Cachard écrit, transcrit des phrases sans maître ni Dieu et grave la mémoire d’une ville meurtrie aux quatre coins du monde.
Crédit photo: Valérie Cachard
Les mots de Valérie Cachard comme source d’inspiration:
«Des mots sur un mur est un projet que je porte depuis juillet 2019. Son point de départ est un dialogue que j’ai eu à l’été 2019 avec un ami auteur Vincent Fontano que j’ai accompagné dans les rues de Beyrouth. Il est venu vivre et comprendre ma ville mais aussi questionner la notion de pardon dans des zones ayant connu des guerres. Il est reparti avec aucune réponse et encore plus de questions.
- Comment vous avez fêté la fin de la guerre? Tu t’en souviens?
- Je ne peux pas m’en souvenir vu que nous ne l’avons pas fêtée.

- Pourquoi vous ne l’avez pas fêtée? Je ne comprends pas.
- Moi, j’ai du mal à comprendre le sens de ta question.
Deux mois après le passage de Vincent, des manifestations et un grand mouvement de revendication et d’occupation du centre de la ville a commencé. De nombreux sociologues et historiens ont lu ce mouvement comme une manifestation dicible de la fin de la guerre civile. Ce fut un mouvement de désobéissance civile qui s’est distingué par de la joie, une créativité débordante et un humour décapant. Ce fut un mouvement festif, jeune, qui m’a montré que j’ai passé un cap, que je fais partie désormais d’une autre génération que celle qui bouillonne dans les rues.
Au Liban, chaque génération souhaite à la suivante de réussir là où elle a échoué, à savoir relancer l’économie du pays, obtenir de l’eau, de l’électricité, la sécurité... C’est un mouvement dans lequel j’ai eu du mal à trouver ma place et dans lequel j’ai été incapable de faire entendre ma voix. Je suis restée à sa périphérie, en écoute et aux aguets. J’ai été d’accord avec ce que ce mouvement exige, ai été capable de l’écrire, mais pas de le dire. Je suis descendue dans la rue quand il y a eu besoin de grossir les rangs ou de bloquer les accès au Parlement pour empêcher le vote d’une loi qui amnistierait les crimes écologiques et financiers des députés au pouvoir, mais n’ai pas été capable d’initiative propre et n’ai jamais repris les slogans scandés.
J’ai marché à la périphérie, vu, entendu, ai été submergée par les voix qui se sont élevées.
Je les ai collectionnées pendant des mois.»
L’engagement profond de Valérie Cachard à documenter l’esprit de Beyrouth, son riche vécu tissé de mots et de mémoire, met en lumière une perspective singulière, un regard pénétrant et une plume vive, sur une ville à la fois bouleversante et bouleversée.
Marie-Christine Tayah
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