Le bloc 9, sur lequel le Liban avait bâti tous ses espoirs, aurait finalement livré le secret de ses entrailles: les quantités découvertes ne seraient pas à la hauteur des attentes, mais cela ne veut absolument pas dire que la Zone économique exclusive (ZEE) ne contient aucune richesse gazière. Les théories complotistes ont commencé à circuler et les responsables d’y aller de leurs commentaires.
Le bloc 9 de la Zone économique exclusive (ZEE), sur lequel le Liban a bâti tous ses espoirs, aurait livré son secret: les quantités de gaz découvertes ne seraient pas à la hauteur des attentes. Une déception d’autant plus grande que le Liban avait négocié la délimitation de ses frontières maritimes avec Israël en pariant sur le trésor caché dans le bloc 9.
Des sources bien informées ont révélé à Ici Beyrouth que les quantités découvertes ne sont effectivement pas à la hauteur des attentes. «À l’emplacement foré, nous ne sommes pas tombés sur des découvertes brillantes ou des torrents de gaz, mais il existe des données positives. Tout d’abord la qualité des puits est bonne et puis il existe des ressemblances avec les réservoirs exploités dans les pays voisins. Des échantillons prélevés seront étudiés et des conclusions seront données. Cela demande du temps, et l’intégration des données nécessitera au moins deux mois». Ces dernières permettront, assurent les sources précitées, de compléter les études afin d’évaluer les opportunités de découvertes gazières en quantités commerciales et de localiser les zones. Le consortium TotalEnergies, Eni et QatarEnergy décidera alors s’il forera encore.
Toujours est-il que c’est ce dernier qui fore, c’est donc lui qui doit donner les résultats et un rapport, et non pas les hommes politiques, encore moins les médias ou les réseaux sociaux. Chacun est désormais un spécialiste ès gaz.
7 sur 8 puits ne contiennent rien
Il ne faut pas non plus oublier que le consortium a ses propres considérations et que tous les forages d’exploration ne se soldent pas par des découvertes. Selon des statistiques mondiales, 7 sur 8 puits forés ne contiennent ni gisements ni quantités commerciales de pétrole et de gaz. Ainsi, le résultat négatif qui pourrait être enregistré dans le bloc 9 n’est pas une fin, mais fait partie du processus d’exploration.
Néanmoins, «ne pas trouver de gaz dans un puits foré ne signifie pas qu'il n'y en a pas dans les autres zones de la ZEE», explique Laury Haytayan, experte du pétrole et du gaz au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, à Ici Beyrouth.
«Ne pas trouver de gaz dès le premier forage n’a rien d’anormal. Il faut parfois explorer plusieurs puits avant d’en trouver», poursuit-elle avant d’ajouter «que même si les investissements sont colossaux, cela fait partie des risques du forage».
Rappelons dans ce cadre que le consortium a présenté, début octobre, une offre pour l’exploration des deux blocs 8 et 10 de la ZEE.
Le Liban a en outre, lancé en août une étude sismique en trois dimensions (3D) du bloc 8, dont les résultats seront publiés à la fin du premier semestre 2024. L’étude sismique en 3D donne une vision plus précise des volumes en hydrocarbures susceptibles d’être découverts. À noter que le bloc 8 n’est pas compris dans la délimitation de la frontière maritime avec Israël.
Théories complotistes
Par ailleurs, les hommes politiques n’ont, semble-t-il, rien d’autre à faire que de commenter des rumeurs et des informations qui ne sont pas encore officielles. Les théories complotistes circulent par-ci par-là, affirmant que certains veulent empêcher le Liban d’accéder à ses richesses.
Dans ce sillage, le ministre sortant de l'Économie et du Commerce, Amin Salam, a regretté sur son compte X (ex Twitter) que le consortium ait fait voler les espoirs d’un avenir gazier en annonçant l'arrêt du forage dans le bloc 9 en raison de l'absence de quantités commerciales dans le puits. «Il semble que les événements et les tensions sécuritaires ont facilité le processus et son passage en douce. Les prochains jours clarifieront le tableau sur ce qui s'est passé!», a-t-il écrit.
Avant d’ajouter: «La société n'a pas pu atteindre le réservoir par l'ouverture actuelle du puits. Il aurait fallu, et ceci est approuvé au niveau international, que la plate-forme soit repositionnée dans d'autres endroits pour pouvoir maintenir l'ouverture requise pour accéder au réservoir situé». Et M. Salam de se demander «s’il ne faut pas donner une chance à d’autres entreprises».
Il a demandé que le rapport de TotalEnergies et le plan d’action à venir soient présentés au Conseil des ministres.
Certains députés ont également évoqué une conspiration.
Rappelons que depuis jeudi dernier, certains médias libanais, se référant à leurs sources, ont annoncé que le forage d’exploration lancé le 24 août dernier par le consortium dans le bloc 9 de la ZEE s’était soldé par un échec et n’avait montré aucune trace de réserve de gaz naturel.
Des informations que le ministre sortant de l’Énergie et de l’Eau, Walid Fayad, avaient démenties jeudi soir, soulignant attendre les résultats du forage d’exploration prévus pour la fin du mois d’octobre.
Selon les informations colportées, la plateforme TransOcean Barents aurait arrêté son forage après avoir mené des observations permettant de déduire une absence de gaz à 3.900 mètres de profondeur du bloc, alors que le contrat stipulait un arrêt à 4.400 mètres.
Le consortium TotalEnergies, Eni et QatarEnergy a commencé les opérations de forage au large de Naqoura, au Liban-Sud, dans le bloc 9, le 23 août dernier, une semaine après l’arrivée au large du Liban, le 16 août, de la plateforme d’exploration Transocean Barents.
Il convient de rappeler que le consortium mené par TotalEnergies a enlevé en 2018 l’adjudication lancée par les autorités libanaises pour l’exploration et l’exploitation des ressources en hydrocarbures offshore de blocs 4 et 9 de la ZEE libanaise composée de 10 blocs. Le forage d’un premier puits dans le bloc 4 en 2020 a conclu à la présence de gaz, mais pas en quantités suffisantes pour être commercialisées. Décision que les autorités libanaises avaient alors quelque peu contestée, évoquant des complots.
Au lieu de jeter la pierre, le gouvernement n’aurait-il pas dû établir un mécanisme de surveillance pour éviter de «soi-disant» telles situations?
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