Appel de phares et menaces dans le discours de Nasrallah
Trois idées maîtresses peuvent être dégagées du discours du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui a repris grosso modo, mais avec quelques nuances, son exposé de la semaine dernière au sujet du conflit militaire entre Israël et le Hamas à Gaza.

Dans une intervention télévisée pour la «journée du martyr», commémorée chaque année le 11 novembre par la formation pro-iranienne, Hassan Nasrallah a lancé un appel de phares aux Américains, certes assorti de menaces, pour leur demander de mettre fin aux attaques menées sans relâche par Israël contre Gaza, depuis l’opération militaire d’envergure du Hamas, sur le sol israélien, le 7 octobre dernier. Il s’est aussi adressé aux Israéliens pour pratiquement leur dire qu’ils sont engagés dans une guerre d’usure dont ils ne sortiront pas vainqueurs. Quant au troisième message du discours d’une heure, il concerne aussi bien les Israéliens que les Libanais, puisque Hassan Nasrallah a réaffirmé indirectement qu’il se conforme aux règles du jeu qui commandent, depuis l’ouverture du front du sud, le 8 octobre, la bataille entre sa formation et l’armée israélienne.

Hassan Nasrallah a commencé par stigmatiser des «agressions intensives et continues de Tel Aviv contre les hôpitaux à Gaza» qu’il a situées dans le cadre d’une «opération israélienne vindicative, dont le principal objectif est d’obtenir une soumission des Palestiniens, des Libanais et de l’ensemble des peuples de la région et de neutraliser ainsi leurs revendications de leurs droits légitimes».

Ce préambule lui a permis d’interpeller directement les États-Unis qui «soutiennent, dirigent, voire même mènent les opérations militaires à Gaza», estimant que les pressions exercées «doivent être orientées vers l’Administration américaine». «Le sommet arabe et islamique de Riyad se tient en présence des dirigeants de 57 États (…) à qui les Palestiniens réclament le minimum: l’adoption d’une position unifiée dans laquelle ils demandent aux Américains de mettre fin à l’offensive menée contre Gaza», a-t-il dit.

Le chef du Hezbollah, qui a dénoncé un soutien britannique aux États-Unis au sujet de Gaza, a mis l’accent sur «l’importance de la mobilisation internationale contre les agissements d’Israël». «Le monde ne tolère plus cette situation à Gaza, a-t-il martelé, en soulignant la nécessité, pour les dirigeants arabes et islamiques, de tirer profit de cette mobilisation, laquelle représente à ses yeux, «une importante pression exercée sur les Américains et les Israéliens». «Ce sont des pressions qui vont embêter l’ennemi», a-t-il insisté, avant de s’étendre longuement sur l’importance tactique des fronts ouverts par les milices pro-iraniennes, dont la sienne fait partie, au Yémen, en Irak, en Syrie et au Liban. Il n’a évoqué le Hamas que pour tourner en dérision l’objectif que s’est fixé le gouvernement de Benjamin Netanyahou, à savoir «anéantir» le groupe palestinien islamiste.

«Des fronts de soutien»

Et si Hassan Nasrallah a structuré son discours de manière à donner un aperçu de ce que chaque milice entreprend à son propre niveau, «pour soutenir le front de Gaza», en ciblant notamment des objectifs américains dans la région, c’est essentiellement pour adresser le message suivant à Washington: «Si vous voulez que ces opérations s’arrêtent, vous devez arrêter la guerre à Gaza», a-t-il marchandé, tout en minimisant l’importance «des menaces américaines relayées à travers divers canaux» et en soulignant l’importance de ce qu’il a appelé «les fronts de soutien», dont la Syrie. Sauf qu’en évoquant ce pays, il s’est évertué à justifier sa non-implication dans le conflit, en mettant l’accent sur toutes «les difficultés et les pressions» auxquelles la Syrie est confrontée.


En revanche, le Liban, selon Hassan Nasrallah, fait partie de «ces fronts de soutien». Le chef du Hezbollah s’est voulu encore une fois plus ou moins rassurant sur ce plan, en réaffirmant implicitement l’attachement de sa formation aux règles d’engagement qui commandent depuis le 8 octobre la bataille entre sa formation et l’armée israélienne. Tout en menaçant bien entendu du pire.

Il a promis aux Israéliens «de poursuivre les attaques aux drones» et souligné que depuis que ces derniers ont ciblé des civils, la semaine dernière, tuant à Aïnata, une femme et ses trois petites-filles, sa formation a eu recours aux roquettes Katioucha «pour la première fois depuis le 8 octobre, et aux missiles Bourkane (volcans) qui peuvent larguer 300 à 500 tonnes d’explosifs». Hassan Nasrallah a aussi expliqué que sa formation a également réagi à ces tirs «en attaquant en profondeur, Israël, pour la première fois aussi». «Nous le disons officiellement, ce sera des civils contre des civils»,a-t-il averti, tout en soulignant que c’est le terrain qui, au final, déterminera l'évolution de la bataille.

Le chef du Hezbollah s’est arrêté ensuite sur le facteur temps qui va, selon ses explications, «user Israël et l’empêcher de sortir vainqueur de cette guerre». «Nous menons une guerre d’usure contre l’ennemi qui est confronté à de nombreuses difficultés, économiques, sociales, avec le déplacement de populations, et humanitaires, à cause de la pression des familles des prisonniers à Gaza. Toutes ces pressions ne jouent pas en sa faveur et le mèneront à sa défaite», a-t-il commenté, en oubliant que les Libanais, entraînés dans ce front, ploient sous des difficultés énormes, quoique différentes.

Le seul commentaire de Hassan Nasrallah à ce sujet, est que l’action de sa formation «bénéficie d’un soutien large au Liban» et que ses détracteurs «représentent une minorité qui ne mérite pas qu’on lui réponde».

La réaction israélienne au secrétaire générale du Hezbollah n’a pas tardé: «À la moindre erreur grave, Beyrouth subira le même sort que Gaza», a menacé le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant.

Plus tard dans la soirée, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, a de nouveau mis en garde le Hezbollah contre toute intervention dans la guerre entre Israël et le Hamas.

«Ce serait l’erreur de votre vie, a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse, et cela scellerait le destin du Liban.»
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