Avec les atermoiements que connaît la procédure libanaise confiée au juge Tarek Bitar dans l’affaire de l’explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020, il n’est pas illusoire de penser à des mesures plus musclées, sans négliger le recours à une enquête internationale, toujours possible.
Une certaine classe politique libanaise, se fondant sur des textes imprécis et souvent méconnus, refuse de se laisser imputer les négligences et les fautes lourdes qui ont rendu possible la « machine de mort » et, ensuite, l’explosion du 4 août.
Pourtant, il faut insister : l’explosion du port de Beyrouth a détruit une région entière de la ville et occasionné la mort violente de près de 216 personnes, sans épargner la population de la ville. Les faits délictueux incriminés constituent une complicité avec un ensembles d’actes, d’actions et de négligences ayant abouti à un crime contre l’humanité, voire un génocide ; ils résultent d’une violation délibérée ou tolérée des droits fondamentaux d’un groupe d’individus, inspirée par des motifs politiques, ou une politique étatique, entraînant au moins un transfert forcé et violent d’un groupe de la population libanaise.
En tout cas, il faut signaler le fait que la définition du crime contre l’humanité reste « ouverte » et pourrait être élargie par les juridictions qui en seraient saisies. Seuls les États craignant pour leurs dirigeants n’ont pas adhéré au Traité de Rome qui a institué le tribunal pénal international permanent.
Il y a dans le procès du responsable syrien à Coblence en Allemagne de quoi inspirer d’autres pays et capitales. L’Allemagne semble en effet adopter un principe de droit pénal international public, la « compétence universelle ». En vertu de cette notion, il n’est pas besoin de vérifier que les critères communément adoptés pour retenir la compétence des tribunaux (le domicile, le lieu de la commission du délit, etc…) afin que le tribunal national puisse se saisir de l’affaire. Ce fut le cas, en 2003 , quand la Cour de cassation belge a confirmé la possibilité de poursuivre et juger Ariel Sharon, lorsqu’il aura cessé ses fonctions de Premier ministre.
Aujourd’hui, un réfugié syrien en Allemagne, Wassim el-Moqdad, avocat syrien de son état qui avait lui-même défendu des prisonniers syriens, a reconnu dans la rue, par pur hasard, le bourreau Anwar Raslan qui l’avait torturé et qui avait mis à mort des dizaines de concitoyens « dans les sections 251 et 285 » du centre de détention d’al-Khatib. L’avocat a pu obtenir la poursuite du responsable syrien devant le tribunal de Coblence.
Il faut dire que la torture systématique et la mise à mort atroce pratiquée par certains régimes totalitaires, à condition qu’elles soient documentées, sont universellement reconnues comme crimes contre l’humanité et/ou comme génocides ; elles ne sont pas, par définition, jugées dans le pays où la torture et l’extermination des opposants sont pratiquées. Laisser ces actes sans jugement participerait du déni de justice, insupportable au regard de certains systèmes juridiques.
Avec une telle évolution du droit pénal international en faveur de la compétence universelle, rien n’empêcherait que des personnes poursuivies par le juge Tarek Bitar, moyennant une documentation et des preuves disponibles même auprès de certaines chaînes de télévision libanaises (al-Jadeed, notamment) et largement disséminés, puissent être incriminées et déférées devant des juridictions européennes dans le dossier de l’explosion du 4 août. Même les suspects prennent parfois l’avion.
Il est temps que le Liban cesse d’être le pays du déni de justice et de l’impunité. Nous avons certes déchanté jusqu’ici avec la justice internationale ; il n’en demeure pas moins qu’une idée venue d’Allemagne peut alimenter notre puits sans fond. En eau de rose !
Une certaine classe politique libanaise, se fondant sur des textes imprécis et souvent méconnus, refuse de se laisser imputer les négligences et les fautes lourdes qui ont rendu possible la « machine de mort » et, ensuite, l’explosion du 4 août.
Pourtant, il faut insister : l’explosion du port de Beyrouth a détruit une région entière de la ville et occasionné la mort violente de près de 216 personnes, sans épargner la population de la ville. Les faits délictueux incriminés constituent une complicité avec un ensembles d’actes, d’actions et de négligences ayant abouti à un crime contre l’humanité, voire un génocide ; ils résultent d’une violation délibérée ou tolérée des droits fondamentaux d’un groupe d’individus, inspirée par des motifs politiques, ou une politique étatique, entraînant au moins un transfert forcé et violent d’un groupe de la population libanaise.
En tout cas, il faut signaler le fait que la définition du crime contre l’humanité reste « ouverte » et pourrait être élargie par les juridictions qui en seraient saisies. Seuls les États craignant pour leurs dirigeants n’ont pas adhéré au Traité de Rome qui a institué le tribunal pénal international permanent.
Il y a dans le procès du responsable syrien à Coblence en Allemagne de quoi inspirer d’autres pays et capitales. L’Allemagne semble en effet adopter un principe de droit pénal international public, la « compétence universelle ». En vertu de cette notion, il n’est pas besoin de vérifier que les critères communément adoptés pour retenir la compétence des tribunaux (le domicile, le lieu de la commission du délit, etc…) afin que le tribunal national puisse se saisir de l’affaire. Ce fut le cas, en 2003 , quand la Cour de cassation belge a confirmé la possibilité de poursuivre et juger Ariel Sharon, lorsqu’il aura cessé ses fonctions de Premier ministre.
Aujourd’hui, un réfugié syrien en Allemagne, Wassim el-Moqdad, avocat syrien de son état qui avait lui-même défendu des prisonniers syriens, a reconnu dans la rue, par pur hasard, le bourreau Anwar Raslan qui l’avait torturé et qui avait mis à mort des dizaines de concitoyens « dans les sections 251 et 285 » du centre de détention d’al-Khatib. L’avocat a pu obtenir la poursuite du responsable syrien devant le tribunal de Coblence.
Il faut dire que la torture systématique et la mise à mort atroce pratiquée par certains régimes totalitaires, à condition qu’elles soient documentées, sont universellement reconnues comme crimes contre l’humanité et/ou comme génocides ; elles ne sont pas, par définition, jugées dans le pays où la torture et l’extermination des opposants sont pratiquées. Laisser ces actes sans jugement participerait du déni de justice, insupportable au regard de certains systèmes juridiques.
Avec une telle évolution du droit pénal international en faveur de la compétence universelle, rien n’empêcherait que des personnes poursuivies par le juge Tarek Bitar, moyennant une documentation et des preuves disponibles même auprès de certaines chaînes de télévision libanaises (al-Jadeed, notamment) et largement disséminés, puissent être incriminées et déférées devant des juridictions européennes dans le dossier de l’explosion du 4 août. Même les suspects prennent parfois l’avion.
Il est temps que le Liban cesse d’être le pays du déni de justice et de l’impunité. Nous avons certes déchanté jusqu’ici avec la justice internationale ; il n’en demeure pas moins qu’une idée venue d’Allemagne peut alimenter notre puits sans fond. En eau de rose !
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