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- Guerre à Gaza: quelle différence entre une trêve et un cessez-le-feu?
Si, sur le plan juridique, les notions de trêve et de cessez-le-feu sont «fixes», sur le plan politique, elles sont plus «flexibles». Souvent instrumentalisées, elles peuvent servir de message révélateur des intentions des belligérants, mais aussi des différentes parties prenantes, quant à la résolution (ou non) du conflit.
À Gaza, les efforts du Qatar, de l’Égypte et des États-Unis ont abouti à une trêve, entrée en vigueur vendredi matin. En vertu de cet accord, une «pause humanitaire» a été décidée et le gouvernement israélien a obtenu la libération de 50 otages aux mains du Hamas en échange de 150 prisonniers palestiniens. Leur libération se fera par étapes.
Trêve, cessez-le-feu, armistice. Un vocabulaire qui fait référence à des notions juridiques qui semblent distinctes les unes des autres, mais qui, dans la pratique politique, sont employées de manière fluide. «Quand vous parlez de cessez-le-feu, d’armistice ou de trêve, vous désignez juridiquement des situations assez différentes», explique Jean-Yves De Cara, agrégé des Facultés de droit et professeur émérite de droit international public à l’université Paris Descartes, interrogé par Ici Beyrouth. «L’armistice signifie la cessation des hostilités. Prenons l’exemple de l’armistice de 1918, à la suite duquel allait s’ouvrir une période de négociations pour rétablir la paix», poursuit-il, avant d’indiquer que l’armistice signifie une détermination à se lancer dans un processus de paix.
Aujourd’hui, et dans le cas de la guerre qui oppose Israël et le Hamas, l’enjeu est de comprendre où se situe l’accord, d’un point de vue politique, puisque l’emploi de chaque terme a son importance, étant donné les divergences de positions.
Un cessez-le-feu, selon le professeur De Cara, «appelle à la fin des hostilités; il peut être temporaire ou durable et définitif, dépendamment des considérations politiques et du degré d’engagement des parties à vouloir mettre fin au conflit armé».
En revanche, la trêve constitue, toujours selon le professeur De Cara, une «sorte d’épisode préliminaire à des opérations diverses, à caractère notamment humanitaire»: évacuation de civils, échange de prisonniers ou d’otages, intervention de la Croix-Rouge, ouverture de couloirs humanitaires, détermination de zones pacifiques, etc. «Provisoire, elle peut permettre de progresser dans le sens d’une solution politique et, plus rarement, à l’ouverture de négociations», indique-t-il.
En temps normal, ces termes sont utilisés dans des combats entre États. Or, en raison de l’évolution des formes des conflits armés, les notions de cessez-le-feu et de trêve peuvent désormais être employées lorsqu’il s’agit de combats entre un État et des groupes rebelles ou armés.
«Dans des cas pareils, ces accords ne sont évidemment pas solennels. Ils sont souvent faits sur la ligne de front», précise le professeur De Cara.
Comment se décident la trêve et le cessez-le-feu?
Dans certaines situations, les belligérants décident du cessez-le-feu ou de la trêve. Dans d’autres, il peut s’agir d’une décision émanant d’une organisation internationale qui, en général, est tenue d’être respectée. À la question de savoir quelle est l’instance chargée de «surveiller» le respect du «bon déroulement» de la trêve ou du cessez-le-feu, le professeur De Cara répond: «En ce qui concerne la guerre à Gaza, on peut parler d’autosurveillance, c’est-à-dire qu’Israël et le Hamas s’engagent à s’interdire le recours à la force, sans aucune garantie, étant donné que la décision de la trêve n’a pas été prise par les Nations unies. Dans ce cas, une force internationale s’interpose entre les parties pour garantir les effets de la trêve ou du cessez-le-feu».
Moins formelle et moins règlementée, la trêve peut aboutir, si elle perdure, à une négociation autour d’un cessez-le-feu, avec fixation de lignes «frontalières» que les parties s’engagent à ne pas transgresser. D’un point de vue politique, évoquer la trêve signifie que la guerre n’a pas pris fin, et que les combats reprendront jusqu’à l’atteinte des objectifs voulus par les belligérants.
Et la pause humanitaire?
L’expression «pause humanitaire» a été récemment employée dans le cas de la guerre entre Israël et le Hamas. De quoi s’agit-il? «Juridiquement, ce terme n’est pas retenu par les textes de loi. Il est plutôt utilisé à des fins politiques pour signifier qu’il pourrait s’agir d’une étape un peu plus durable, intermédiaire entre la trêve et le cessez-le-feu», explique le professeur De Cara.
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