Baux commerciaux: le contentieux sempiternel entre propriétaires et locataires

Le Parlement a voté article par article la loi du 15 décembre 2023 sur les baux commerciaux. L’exercice, auquel l’Assemblée nationale s’est prêté avec soin, n’a pas empêché les locataires et les propriétaires d’exprimer leur insatisfaction. Une réaction, pour le moins, attendue.
Sur fond d’une grande fragilité socio-économique, la loi du 15 décembre 2023 a mis une fin progressive, étalée sur une période de quatre ans, au blocage des baux commerciaux anciens. Elle a ainsi emboîté le pas à la loi sur la libéralisation progressive, étalée sur neuf ans, des baux résidentiels votée en 2014 et légèrement amendée en 2017.
Les deux législations s’inscrivent dans le cadre de l’offre et de la demande, c’est-à-dire sans dispositions contraignantes. La conclusion d’un bail résidentiel ou commercial est laissée à l’entière liberté contractuelle du bailleur et du locataire dans le respect du droit à la propriété individuelle consacrée par l’article 15 de la Constitution libanaise.
Il fallait bien que «la législation d’exception» sur les loyers résidentiels et les espaces commerciaux, en vigueur depuis la Seconde Guerre mondiale, prennent fin, un jour.
Une marchandise
Au même titre que les produits de consommation durable, le logement est une marchandise, entend-on dire dans les milieux des bailleurs de fonds. Partant de là, il est naturel que le prix du produit, que représente le logement commercial ou résidentiel, accuse des modifications à la baisse ou à la hausse, selon les taux d’inflation et le principe de la loi de marché, s’articulant autour de l’offre et de la demande. En un mot, le loyer d’un local commercial doit être en adéquation avec sa valeur locative. La révision du bail commercial s’avère donc indispensable.  
Pour rappel, la valeur locative fait référence à l’estimation du loyer qu'un bien peut générer dans des conditions normales de marché, en tenant compte de divers facteurs tels que l'emplacement, la taille, les installations, les commodités et l'état du bien. Cette estimation est d’autant plus importante que les propriétaires peuvent l’utiliser pour établir un loyer compétitif tout en prenant en compte les caractéristiques spécifiques de leur propriété et du marché local.
Une option réaliste

La loi sur le bail commercial à laquelle fait référence la loi du 15 décembre 2023 est le contrat de location d'un espace dans lequel est exercée une activité commerciale, industrielle, artisanale ou une profession libérale réglementée par la législation. Le local doit donc servir à l'exploitation d'un fonds de commerce.
La loi, pour être juste à l'égard des commerçants et des propriétaires, a stipulé la libéralisation du bail commercial en accordant au locataire une période de transition de quatre ans, vers le nouveau régime de loyers. Lors de ce délai, les prix des baux seront progressivement ajustés, de sorte qu'ils atteignent, à la fin de cette période, 8% de la valeur locative.
En revanche, la législation donne au propriétaire le droit de raccourcir la période de transition à deux ans s’il renonce aux augmentations progressives.
Elle a également prévu la possibilité de récupérer le bien loué avant l’expiration du délai dans certains cas, obligeant le propriétaire à verser au locateur une indemnité pouvant aller jusqu’à 15% du prix de vente du bien-fonds.
Pas d’inflation des prix des loyers

En libéralisant les baux commerciaux, la valeur des estimations des biens-fonds ainsi que les prix des loyers reculeront de facto en raison de l’abondance de l’offre. De ce fait, le marché trouve seul son équilibre. Une inflation des prix des loyers est ainsi à écarter. Certes, les propriétaires, longtemps frustrés, ne vont pas louer à perte. En revanche, ils voudraient louer leur actif immobilier afin de générer des revenus.


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