Niché au cœur d’Achrafieh, dans le couvent orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation (Saydé), le musée byzantin, qui vient d’ouvrir ses portes, est une divine surprise, lieu totalement inattendu, aux riches collections d’objets et d’archives retraçant tout un pan de l’histoire de Beyrouth.
Le père Élias Farah, qui en fait la visite guidée avec un extraordinaire talent de conteur, explique l’origine du couvent et des merveilles qu’il abrite. «Que laisserons-nous à nos enfants de nos racines et de nos origines si nous ne faisons pas ce travail de mémoire?», dit-il.
Tout commence en 1888, alors qu’une jeune fille très pieuse du nom de Catherine Karkabi, prie seule et intensément pendant sept ans d’affilée depuis son domicile à Khandak el-Ghamik à Beyrouth. D’autres jeunes filles et jeunes femmes la rejoignent bientôt dans sa prière, dont Saada Abourrous, épouse d’un bâtisseur du nom de Dimitri Andraos Gholam. Cet homme souffre depuis un certain temps d’une forte douleur au bras qui le paralyse et nuit à son travail. Saada l’emmène voir Catherine qui lui enduit le bras d’huile en lui demandant de réciter une prière à la Sainte Vierge. Trois jours plus tard, à son immense surprise, Dimitri ne ressent plus aucune douleur. Lui et son épouse décident alors de rendre grâce à la Vierge en posant les fondations d’un couvent qui abritera Catherine et son groupe de prière. Nous sommes en 1909 et la région de Sioufi, tout d’abord choisie, est encore extrêmement sauvage et inhospitalière. Il est donc décidé de construire le tout premier bâtiment en contrebas de la colline, à son emplacement actuel et de l’appeler «La maison des vierges qui ne dorment jamais», car elles se relayaient dans la prière de façon à assurer une présence continue de 24 heures auprès de l’icône de la Madone. Le couvent ne prendra son nom actuel qu’en 1935.
Au fil de la visite, le père Farah explique la signification de chaque objet qui porte en lui une part de la fascinante histoire du couvent. Des exemplaires manuscrits d’évangiles des dix-huitième et dix-neuvième siècles, des croix byzantines de toute beauté, des coupes richement décorées, des icônes, des œufs d’autruche hautement symboliques du soin qu’il faut accorder à la religion, d’innombrables lettres et documents, des registres retraçant la vie quotidienne du couvent, bref autant de preuves et de témoignages de l’érudition des religieuses et de la relation du couvent avec le monde extérieur et notamment avec Moscou, Jérusalem ou la Sublime porte. Et bien sûr, trônant tels d’infatigables veilleurs, les portraits du couple de fondateurs, Dimitri et Saada.
La mère Catherine, fondatrice et première supérieure du couvent, décédée en 1915, est bien sûr à l’honneur. Des portraits, photos, icônes trouvées à proximité de son domicile et dont l’origine est inconnue, objets divers lui ayant appartenu, sont exposés avec un soin extrême. Et pour clôturer la visite, voici sa chambre, extrêmement touchante et conservée exactement à l’identique.
Avec une extraordinaire faconde, le père Farah est intarissable. Les légendes défilent et on ne s’en lasse pas: ici un patriarche surnommé «Abourghif» qui, pendant la famine de 1915, distribuait du pain indifféremment aux chrétiens et aux musulmans, là une sœur aveugle qui pourtant voyait que l’on n’avait pas fait le nombre imposé de génuflexions pendant la prière, plus loin, une icône miraculeuse qui suinte de l’huile, mais la visite, si vivante et instructive doit bien se terminer à un moment donné. On l’écouterait bien quelques heures encore!
Haut lieu d’histoire et de spiritualité, le couvent ne compte plus aujourd’hui que cinq religieuses. Mais sa mémoire est préservée grâce au musée, fondé à l’initiative de Liliane Chammas et Robert Matta et superbement aménagé par Jean-Louis Mainguy. Il est à découvrir absolument.
Article rédigé par Zeina Saleh Kayali
À savoir
L’Agenda Culturel organise une visite guidée du musée le mercredi 17 janvier 2024 à 17h00. La visite sera guidée par le père Élias Farah.
Lieu: Achrafieh - Couvent orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation (Saydé)
Localisation
Langue: Arabe
Durée: 1 heure
Inscription: (78) 959670; [email protected]
Visite gratuite, inscription obligatoire – places limitées.
https://www.agendaculturel.com/article/le-musee-byzantin-de-beyrouth
Le père Élias Farah, qui en fait la visite guidée avec un extraordinaire talent de conteur, explique l’origine du couvent et des merveilles qu’il abrite. «Que laisserons-nous à nos enfants de nos racines et de nos origines si nous ne faisons pas ce travail de mémoire?», dit-il.
Tout commence en 1888, alors qu’une jeune fille très pieuse du nom de Catherine Karkabi, prie seule et intensément pendant sept ans d’affilée depuis son domicile à Khandak el-Ghamik à Beyrouth. D’autres jeunes filles et jeunes femmes la rejoignent bientôt dans sa prière, dont Saada Abourrous, épouse d’un bâtisseur du nom de Dimitri Andraos Gholam. Cet homme souffre depuis un certain temps d’une forte douleur au bras qui le paralyse et nuit à son travail. Saada l’emmène voir Catherine qui lui enduit le bras d’huile en lui demandant de réciter une prière à la Sainte Vierge. Trois jours plus tard, à son immense surprise, Dimitri ne ressent plus aucune douleur. Lui et son épouse décident alors de rendre grâce à la Vierge en posant les fondations d’un couvent qui abritera Catherine et son groupe de prière. Nous sommes en 1909 et la région de Sioufi, tout d’abord choisie, est encore extrêmement sauvage et inhospitalière. Il est donc décidé de construire le tout premier bâtiment en contrebas de la colline, à son emplacement actuel et de l’appeler «La maison des vierges qui ne dorment jamais», car elles se relayaient dans la prière de façon à assurer une présence continue de 24 heures auprès de l’icône de la Madone. Le couvent ne prendra son nom actuel qu’en 1935.
Au fil de la visite, le père Farah explique la signification de chaque objet qui porte en lui une part de la fascinante histoire du couvent. Des exemplaires manuscrits d’évangiles des dix-huitième et dix-neuvième siècles, des croix byzantines de toute beauté, des coupes richement décorées, des icônes, des œufs d’autruche hautement symboliques du soin qu’il faut accorder à la religion, d’innombrables lettres et documents, des registres retraçant la vie quotidienne du couvent, bref autant de preuves et de témoignages de l’érudition des religieuses et de la relation du couvent avec le monde extérieur et notamment avec Moscou, Jérusalem ou la Sublime porte. Et bien sûr, trônant tels d’infatigables veilleurs, les portraits du couple de fondateurs, Dimitri et Saada.
La mère Catherine, fondatrice et première supérieure du couvent, décédée en 1915, est bien sûr à l’honneur. Des portraits, photos, icônes trouvées à proximité de son domicile et dont l’origine est inconnue, objets divers lui ayant appartenu, sont exposés avec un soin extrême. Et pour clôturer la visite, voici sa chambre, extrêmement touchante et conservée exactement à l’identique.
Avec une extraordinaire faconde, le père Farah est intarissable. Les légendes défilent et on ne s’en lasse pas: ici un patriarche surnommé «Abourghif» qui, pendant la famine de 1915, distribuait du pain indifféremment aux chrétiens et aux musulmans, là une sœur aveugle qui pourtant voyait que l’on n’avait pas fait le nombre imposé de génuflexions pendant la prière, plus loin, une icône miraculeuse qui suinte de l’huile, mais la visite, si vivante et instructive doit bien se terminer à un moment donné. On l’écouterait bien quelques heures encore!
Haut lieu d’histoire et de spiritualité, le couvent ne compte plus aujourd’hui que cinq religieuses. Mais sa mémoire est préservée grâce au musée, fondé à l’initiative de Liliane Chammas et Robert Matta et superbement aménagé par Jean-Louis Mainguy. Il est à découvrir absolument.
Article rédigé par Zeina Saleh Kayali
À savoir
L’Agenda Culturel organise une visite guidée du musée le mercredi 17 janvier 2024 à 17h00. La visite sera guidée par le père Élias Farah.
Lieu: Achrafieh - Couvent orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation (Saydé)
Localisation
Langue: Arabe
Durée: 1 heure
Inscription: (78) 959670; [email protected]
Visite gratuite, inscription obligatoire – places limitées.
https://www.agendaculturel.com/article/le-musee-byzantin-de-beyrouth
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