Basket/Liban: un remaniement au sein des Verts?
Le tonnerre gronde chez les ultras, mécontents des performances, pour le moins modestes, de La Sagesse. Le dernier match, face à Antonine (80-79), a été la goutte qui a fait déborder le vase. Après un passage loin d’être concluant à Dubaï, avec seulement une victoire sur cinq matchs, Ragheb Haddad n’a pas tardé à réagir sur les réseaux sociaux: «Vous ne représentez pas ce club. Vous ne comprenez pas la valeur du maillot que vous portez. Vous ne connaissez pas l’histoire et la passion que les fans ont pour ce club. Vous jouez uniquement pour votre salaire que vous ne méritez pas!!! C’est honteux!!!»
Cette réaction vive d’un jeune président traduit une frustration latente chez les ultras de La Sagesse. Qu’en est-il réellement?
L’âge d’or de La Sagesse
Impossible d’aborder la refonte des Verts sans évoquer l’un des pionniers du basketball libanais et une figure emblématique de La Sagesse, Antoine Choueiry. Petit retour en arrière. Lorsqu’il a été élu président du club en 1992, les Verts ont immédiatement suscité l’attention sur la scène internationale. Visionnaire, alliant nouveauté de format et arrivée de nouveaux talents étrangers sur le parquet libanais, le basketball local brille avec un palmarès complet, tant en Asie qu’au niveau mondial. Les Verts ont fait leurs premiers pas dans le monde du basketball en 1992 et, depuis, les trophées se sont succédé au sein de ce club libanais, qui a été champion du Liban à huit reprises, vainqueur de la Coupe du Liban (7), de la Coupe arabe des clubs champions (2), de la Coupe d’Asie des clubs champions (3) et de la Coupe d’Asie de l’Ouest des clubs champions (3).
La saga prend fin brutalement avec la démission d’Antoine Choueiry en 2004. Il a marqué l’histoire du club d’une empreinte indélébile. Malgré le sursaut sous la direction de Henry Chalhoub, qui a remporté le championnat du Liban lors de la saison 2005-2006, les Verts n’ont plus retrouvé le goût de la victoire depuis 17 ans. Les années ont défilé, les entraîneurs se sont succédé, l’esprit d’équipe était souvent au rendez-vous, mais le succès a échappé à La Sagesse.
Les problèmes internes ont affaibli le club, notamment au début de la saison 2013-2014, marquée par de nombreuses querelles au sein du conseil d’administration. Cela a abouti à l’élection d’un nouveau président, Elie Yachouchi, qui a finalement démissionné il y a quelques mois, laissant sa place au jeune Ragheb Haddad.
Une jeunesse en force
Qu’est-ce qui se passe à La Sagesse? L’arrivée tonitruante de Ragheb Haddad à la présidence du club, succédant à Elie Yachouchi, semble incarner une volonté de renouveau et de jeunesse au sein de l’équipe menée par Jad el-Hajj. Les réactions vives du jeune président à la suite des récentes (contre)performances suscitent des interrogations sur le bon fonctionnement du club mais, selon une source proche du club, fervente partisane de La Sagesse: «Ragheb Haddad est un jeune président qui apporte une mentalité nouvelle dans le sport moderne. Il tirera des enseignements de ces obstacles pour gagner en expérience. Nous sommes conscients des attentes des supporters et comprenons leurs réactions.»

Avec un budget avoisinant les 2 millions de dollars, est-ce le moment de donner carte blanche au sélectionneur des Cèdres pour constituer l’équipe nécessaire à la relance des Verts? Ragheb Haddad exprime son mécontentement à la suite des défaites répétées de l’équipe, qui n’accorde aucune importance au maillot et ne joue que pour l’argent. Les performances stagnent malgré un Jad el-Hajj plus que compétent pour mener La Sagesse vers un nouveau titre. Entre cohésion d’équipe et alchimie, c’est potentiellement le talent qui fait défaut. Selon nos mêmes sources: «Nous œuvrons actuellement pour le recrutement de nouveaux joueurs. Les meilleurs talents évoluent actuellement en division chinoise. Nous pouvons confirmer à nos supporters que, dès la mi-mars, de nouveaux joueurs rejoindront nos rangs à la position 4 (ailier fort)  et 5 (pivot-centre).»
Restant fidèle à la philosophie des années Choueiry, un mercato peut être fructueux pour La Sagesse. Qui garder et qui laisser partir? Selon nos sources sûres au sein du club, une rotation impliquant certains joueurs internationaux comme le Kényan Acuoth Deng et le Tunisien Redhouane Slimane semble imminente, ces derniers ne répondant pas aux performances de Jonathan Gibson qui s’intègre dans un système gagnant. La tendance pourrait changer au cours de la saison, mais une chose est sûre: le basketball local est à la hauteur des attentes. Ragheb Haddad pourrait être la solution pour dynamiser le club. On note également la nomination récente de Jean Abdelnour en tant que responsable du basketball à la Sagesse. L’ancien capitaine de la sélection nationale et joueur de l’équipe du Riyadi pourrait apporter une nouvelle dynamique à l’équipe. «Il a une mentalité de gagnant et une longueur d’avance dans le jeu. Il apportera également de la fraîcheur dans la rotation des joueurs aux côtés de Jad el-Hajj», comme l’indique notre source. Le vice-président Sami Saleh exprime sa confiance dans la jeunesse que le club incarne, mais il sait que le succès ne viendra pas d’un simple coup de baguette magique. «Cela ne fait que trois mois que nous sommes là. Le club a connu des défaites et des victoires, mais il se trouve actuellement à la deuxième place du championnat. Nous comprenons les supporters et travaillons également en coulisses sur des projets au sein de l’équipe pour apporter du sang neuf.»
Où sont les ultras?
Les ultras ont exprimé leur mécontentement au cours des dernières semaines, entre injures, dégradations et rassemblements violents. La frustration est palpable et devient incontrôlable. Cette pression a incité le conseil de La Sagesse à réagir. Le président Ragheb Haddad a dit: «Il n’y aurait pas de Sagesse sans nos supporters», lors d’un entretien accordé à la MTV.
Pour comprendre ce qui s’est passé, un ultra, souhaitant rester anonyme, s’exprime: «Je soutiens La Sagesse depuis 40 ans. Nous attendons et continuons d’espérer, mais il doit y avoir des changements dans le jeu. Nous avons un excellent entraîneur mais l’équipe ne me convainc pas. Nous devons changer de système de jeu. Ce qui s’est passé la dernière fois était un rappel aux dirigeants et aux joueurs que nous ferons tout pour le club.»
Saleh, quant à lui, reste plutôt optimiste: «Nous avons une bonne équipe et un bon classement au championnat. Mais nous devons être patients et effectuer de meilleurs recrutements. Tout le staff n’est pas mauvais. Nous, les supporters, devons rester loyaux et ne pas agir de manière violente. C’est notre club et nous perdons tous ensemble.»
La Sagesse perd des supporters et la loyauté de certains est remise en question, certains basculant même dans le «camp adverse», comme cette personne qui préfère garder l’anonymat: «Je change de club, je suis maintenant du côté du Riyadi. C’est mieux pour moi.»
Les attentes autour de la performance de La Sagesse sont élevées en cette deuxième moitié de saison. Est-ce que ce remaniement sera stable et durable? C’est aux hommes de Jad el-Hajj de répondre dimanche. La Sagesse affrontera le Beirut Club à domicile (16h45), une occasion parfaite de redonner aux supporters et aux ultras une raison de continuer à y croire.
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