Situation humanitaire catastrophique à Gaza, veto américain à l'ONU sur une trêve
Des frappes israéliennes meurtrières ont visé mardi la bande de Gaza plongée dans une situation humanitaire catastrophique, au moment où les États-Unis ont mis leur veto à un projet de résolution à l’ONU exigeant un cessez-le-feu «immédiat».

Près d’un million et demi de personnes, selon l’ONU, sont massées dans la ville de Rafah, située dans le sud du territoire palestinien contre la frontière fermée avec l’Égypte, dont la population a été multipliée par six depuis le début de la guerre, le 7 octobre dernier, entre Israël et le Hamas.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a annoncé une prochaine offensive sur la ville surpeuplée, visée quotidiennement par des frappes israéliennes, afin de vaincre le mouvement islamiste palestinien dans son «dernier bastion» et libérer les otages retenus à Gaza.

Cette perspective inquiète la communauté internationale, alors que les espoirs d’un arrêt des combats sont de plus en plus minces. Le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, installé au Qatar, est toutefois arrivé mardi au Caire pour de nouvelles discussions sur une trêve avec des responsables égyptiens.

Dans le même temps, les États-Unis ont mis leur veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui exigeait un cessez-le-feu «humanitaire immédiat».

Premier soutien d’Israël, les États-Unis estiment que cette résolution aurait mis en danger les négociations diplomatiques délicates sur le terrain pour obtenir une trêve incluant une nouvelle libération d’otages.

L’ambassadeur palestinien à l’ONU a fustigé un veto «dangereux», le Hamas y voyant un «feu vert» à Israël pour perpétrer davantage de «massacres».

Au moins 15 personnes ont été tuées mardi soir dans «un bombardement israélien qui a visé une maison à Deir al-Balah», dans le centre du territoire, selon le ministère de la Santé à Gaza.

Plus tôt, des frappes ont visé Khan Younès, à quelques kilomètres au nord de Rafah, selon un journaliste de l’AFP, où les soldats israéliens traquent les combattants du Hamas au milieu des ruines.

L’ONG Médecins sans Frontières (MSF) s’est dite inquiète de la situation à l’hôpital Nasser de Khan Younès, où selon elle du personnel médical et des patients sont bloqués depuis le raid de l’armée israélienne du 15 février. «Profondément préoccupée» par le sort de ces patients, MSF a appelé «à leur évacuation en toute sécurité».
«Humiliés et détruits»

«Nous ne savons pas où aller», a raconté Abdullah Al-Qadi, un homme de 67 ans qui habite Zaytoun, un quartier de Gaza-ville, dans le nord, également bombardé. «Nous mourrons dans notre maison et cela vaut mieux que l’humiliation dont nous parlent nos proches qui ont été déplacés. Les gens sont humiliés et détruits», a-t-il ajouté.

Les rapports des organisations humanitaires sont de plus en plus alarmants sur la situation dans la bande de Gaza, dévastée et assiégée par Israël, où 2,2 millions de personnes sont menacées de famine, selon l’ONU.


Les denrées alimentaires et l’eau potable sont devenues «extrêmement rares» à Gaza, selon les agences de l’ONU qui s’inquiètent d’une «explosion» imminente du nombre de décès d’enfants.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a suspendu à nouveau mardi la distribution de son aide dans le nord du territoire, en proie «au chaos et à la violence».

L’aide humanitaire, toujours insuffisante, entre dans la bande de Gaza essentiellement par Rafah via l’Égypte, mais son acheminement dans le nord est rendu presque impossible par les combats et les destructions.

«Les gens au nord meurent de faim et nous, ici, nous mourons à cause des bombardements», déclare Ayman Abou Shammali, blessé lors d’une frappe à Zawayda, dans le centre du territoire.
«Cimetière»

À New York, les États-Unis ont présenté un projet alternatif au texte auquel ils ont mis leur veto. Alors qu’ils s’étaient jusqu’ici systématiquement opposés à l’utilisation du terme «cessez-le-feu», leur version soutient un cessez-le-feu mais pas immédiat, et sous conditions.

Ce projet prévient en outre qu’«une offensive terrestre d’ampleur» sur Rafah «ne devrait pas avoir lieu dans les conditions actuelles».

Une offensive à Rafah transformerait cette ville en «cimetière», a affirmé mardi la patronne de l’antenne américaine de MSF, prévenant avec d’autres ONG du risque de famine sur place.

Brett McGurk, le conseiller du président américain Joe Biden pour le Moyen-Orient, se rend cette semaine dans la région – mercredi en Égypte et jeudi en Israël – pour s’entretenir avec Israël de cette offensive et tenter de faire avancer l’accord sur les otages, selon la Maison Blanche.

En Israël, les familles d’otages continuent à faire pression sur le gouvernement pour qu’il obtienne la libération de leurs proches.

Des médicaments envoyés à Gaza dans le cadre d’un accord négocié par le Qatar et la France sont par ailleurs parvenus à des otages en ayant besoin, selon Doha.

Adel Zaanoun, avec Emmanuel Duparcq à Jérusalem/ AFP
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